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fonctionnant séparément ou conjointement avec celle qui fait partie du quartier général, sont établies à proximité des champs de bataille, souvent derrière un simple pli de terrain. C’est là qu’on fait les opérations urgentes, les pansements qui ne peuvent attendre. Les hommes en état de marcher sont immédiatement dirigés sur les ambulances de seconde ligne en arrière de l’armée, en lieu sûr, ordinairement dans une ville ou dans un village. Les blessés sont soumis alors à une nouvelle visite : on achève les pansements commencés, on complète les opérations improvisées. Pour éviter l’encombrement, des évacuations journalières refoulent les blessés jusque dans les hôpitaux sédentaires où la guérison s’achève. Ainsi les officiers de santé peuvent se diviser en deux classes : le personnel militant et le personnel hospitalier sédentaire. Aux uns les épidémies, aux autres le risque des projectiles et de la captivité, et à tous le dévouement.

Bans la dernière guerre entre la Prusse, l’Italie d’une part, et l’Autriche de l’autre, ce qu’on ne saurait trop louer, c’est l’organisation donnée au service de santé de l’armée prussienne ; organisation aussi simple et aussi

Ïiarfaite que possible. En dehors des ambuances, on a créé à Berlin et dans d’autres villes des infirmeries militaires, nommés lazarets ; elles sont confiées à des associations libres formées ad hoc ; l’État se contentant de leur payer la petite somme que le budget alloue pour chaque blessé ou chaque malade, et de n exercer que la surveillance nécessaire

Ïiour constater la présence des hommes ou eur décès. Cette institution utilise, on le voit, le dévouement des citoyens, en faveur d’une armée composée de leurs plus proches parents.

— AllllS. llist. Jo ne mo nm point blessé.

Allusion à une belle réponse de l’empereur’ Constantin, et qui exprime le pardon ou le dédain d’une injure. Constantin flottait entre le catholicisme et les sectateurs d’Arius. Ces derniers, furieux de ce que l’empereur n’embrassait pas leurs opinions, brisèrent ses statues. Ses courtisans lui conseillaient la vengeance, o Alors, dit saint Chrysostome, l’empereur, en se tatant la tête et les joues : « Pour moi, dit-il avec un doux sourire, je ne me sens aucune blessure, ni au front, ni au visage, et tout me paraît sain et entier. »

« D’ailleurs, les femmes sont très-bonnes ; elles excusent presque toujours les pierres que la colère d’un ami jette à leur statue, et disent volontiers, avec l’indulgent sourire de l’empereur romain : Je ne me sens pas blessée.’» Charles de Bernard, Gerfaut.

Eicaié* (les deux), tableau de M. Protais, Salon de 1861. Deux soldats, un Français et un Autrichien, gisent sur le champ de bataille faiblement ondulé, qu’éclaire un ciel clair, limpide, parsemé d’étoiles : ils vont mourir. Tout à l’heure ennemis, ils ne sont plus que des hommes, des frères, maintenant que la rage du combat s’est apaisée et qu’ils vont partir ensemble pour la patrie commune. Le Français, étendu sur le dos, pâle, presque éteint, tend sa gourde à l’Autrichien, qui se traîne jusqu’à lui sur les genoux et sur les mains. M. Protais a rendu avec beaucoup de sentiment cette scène touchante, qui a été traitée par une foule d’autres artistes et a servi de prétexte à maintes banalités. L’exécution du tableau, un peu faible dans les fonds, offre dans l’ensemble des qualités sérieuses.

Bleaséa de Magenta (LES), tableau de

M. Loyer, Salon de 1861. Le sujet est le même au fond que celui de la composition décrite dans l’article précédent. Une charrette, couverte d’une toile blanche formant voûte, suit un chemin poudreux, sous un soleil ardent. Deux blessés, un Autrichien et un zouave, sont couchés à l’ombre de la toile ; celui-ci s’est soulevé péniblement et exprime le jus d’une orange sur les lèvres de l’Autrichien, dont la face pâle semble déjà envahie par les affres de la mort. « Ce tableau est émouvant sans effort et sans mélodrame, a dit M. Victor Fournel ; il y a là de très-jolis accords de ton, et la couleur générale est d’une excellente harmonie. Le cercle dessiné au centre par la toile blanche de la charrette forme un tableau dans le tableau, et attire immédiatement les yeux pour diriger toute, l’attention sur la scène ; celle-ci se détache, dans ce cadre lumineux, sur la pénombre de l’intérieur, qui l’adoucit sans la voiler, et les accessoires, touchés d’une main sobre, accompagnent le sujet, mais ne l’étouffent pas, >

BLESSEBOIS (Pierre-Corneille), écrivain de la deuxième moitié du xviie siècle, qu’on croit originaire de Bourgogne. C’est un personnage énigmatique sur lequel se sont élevées des controverses fort vives et qui n’ont rien appris. Il est un exemple de 1 étrange manie des bibliomanes. Ses ouvrages sont aussi méprisables pour le fond que pour la forme ; ce sont des pièces diffamatoires, d’ignobles satires, des comédies absurdes, des romans orduriers, le tout sans aucune espèce de mérite littéraire : et cependant ils sont fort recherchés, et tel bouquin qui ne serait même pas bon à mettre au cabinet s’est vendu, à cause de sa rareté, jusqu’à 250 fr., et brille, couvert de maroquin et de dorures sur la tablette de quelque riche maniaque, qui se croit un amateur éclairé des livres. Charles No BLES

dier n’a pas dédaigné de se mêler aux polémiques sur la vie et les ouvrages de cet écrivain. Outre ses Œuvres satiriques (1678), mentionnons : les Soupirs de Siffroi ou (innocence reconnue (tragédie, 1675) ; la Victoire spirituelle de la glorieuse sainte Reine, remportée sur le tyran Olibre (1686) ; la Corneille de mademoiselle de Sçay, comédie pour l’hostel de Bourgogne (1678) ; le Zt’ure d’Angélie, histoire amoureuse et tragique (1678), etc. On a attribué à ce plat et cynique écrivain deux autres romans : Lupunie, histoire amoureuse de ce temps (1668) ; et le Zombi du grand Pérou ou la Comtesse de Cocagne (1697).

BLESSEMENT s. m. (blè-se-man — rad. blesser). Néol. Action de blesser, violation : Le mat moral n’est pas autre chose que le blessement de la loi de justice absolue. ( P. Leroux.)

BLESSER v, a. ou tr. (blé-sé — du gr. plêssein, frapper, blesser). Frapper d’un coup qui produit fracture, plaie ou contusion : Blesser quelqu’un, le blesser dangereusement, le blesser à mort. Blesser un homme d’un coup de pistolet, d’un coup de sabre, d’un coup de bâton ; le blesser à la tête, à l épaule. Je suis Diomède, qui blessai Vénus au siège de Troie. (Fén.)

On venait de blesser ce guerrier généreux.

De Belloy.

— Par anal. Occasionner, par la pression ou le frottement, une blessure, une contusion, une écorchure, une gène douloureuse : Ces souliers me blessent. Le lien avait blessé ses poignets. La selle a blessé votre cheval. Vous m’avez fait faire des souliers qui me blessent furieusement. (Mol.)

. ■. Plus d’un héros

Dans le soulier qui le blesse

Peut regretter ses sabots. Bérancer.

— Affecter désagréablement les sens : Le son de cet instrument blesse l’oreille. C’est une saveur qui blesse le goût. Les couleurs trop éclatantes blessent la vue. (Acad.)

Je ne sais où je suis ; l’éclat du jour me blesse

Requabd.

Phèdre ici vous chagrine et blesse votre vue.

Racine.

— Fig. Atteindre, toucher, impressionner, en parlant d’une passion ou d’un sentiment désagréable : L’amour vous a blessé. La douleur lui a blessé l’âme. La vie est pleine de choses qui blessent le cœur. (Mme de Sév.)

La main qui me blessait a daigné me guérir.

Corneille.

Vous voulez rendre compte & l’objet qui vous blesse De la bonté d’Octave et de votre faiblesse.

Corneille,

Mon pauvre cœur qu’un ancien amour blesse De sa constance est-il récompensé ?

H. Cantel.

Quelle voix amie

Consolera ce cœur que ce doute a blessé ?

A. db Musbet.

— Fig. Choquer, piquer, offenser, irriter : Blesser son meilleur ami. Je ne vois rien là qui puisse le blesser. (Acad.)On appréhende de blesser ceux dont l’affection est utile et l’aversion dangereuse. (Pasc.) La vérité blesse assez les rois. (Fén.) La première chose qu’il faut éviter dans le monde, c’est de blesser la vanité. (M">e Necker.) L’ingratitude des indifférents effleure, et celle d’un ami blesse mortellement. (La Rochef.-Doud.) Tout ce qui blesse la moralité et la dignité de l’homme blesse la loi de la nature. (A. Martin.) Le genre humain refuse des applaudissements unanimes à ce gui blesse la morale. (Chateaub.) Pour faire ’fortune en littérature, blessons tout le monde, même nos amis. (Balz.) L’ingrat blesse vivement en nous le sentiment de l’équité. (Bautain.) On doit éviter de choquer un indifférent, et craindre de blesser un ami. (La Rocher.-Doud.)

Ici tous les objets vous blessent, vous irritent.

Racinb.

Tout éloge imposteur blesse une âme sincère.

Boileau.

Ah ! je ne pensais pas vous blesser, sur ma vie !

V. Huao.

—Violer, offenser, porter atteinte à : Blesser la justice, la vérité. Blesser la pudeur. Blësseh l’intérêt général. Blesser l’honneur, la réputation de quelqu’un. La clause de cette transaction blesse me ; intérêts. (Acad.) Puissent ces discours licencieux ne jamais blesser l’innocence de vos oreilles ! (Mass.) Il faut adoucir l’éclat de sa supériorité ; tout mérite blesse l’égalité. (A. d’Houdetot.) On ne peut faire la guerre à la propagation de la pensée sans blesser la pensée elle-même. (J. Simon.) Il Être contraire ou opposé à, aux règles de : Rejeter une expression qui ne blesse ni le son, ni le sens, ni le bon goût, ni la clarté, est un purisme ridicule. (Joubert.)

— Absol. dans ces divers sens : L’intention de celui qui blesse ne soulage pas celui qui est blessé. (Pasc.) La persécution a deux tranchants, elle blesse à droite et à gauche. (Lamenn.)

Eh quoi ! dans un âge si tendre, On ne^eut déjà vous entendre.

Ni voir vos beaux yeux sans mourir !

Ah ! vous êtes pour nous et trop jeune et trop belle ; Attendez, petite cruelle,

Attendez pour blesser que vous puissiez guérir.

(Anonyme.)

Savoir où blessé le soulier, où blesse le bât, Connaître des inconvénients personnels, qui échappent à ceux que la chose n’intéresse

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pas : Z ?o«/ l’on me croit heureux, mais je sais OÙ LE BÂT ME BLESSE. On s’étonnait qu’un mari dont la femme était d’une grande naissance et passait pour avoir beaucoup de mérite s’en fût séparé. Il répondit en montrant son soulier ; « Vous voyez qu’il est bien fait, mais vous ne voyez pas où il me blesse. »

Ce n’est pas là, coquine, oïl te bât m’a blessé.

Reonard.

Se blesser, v. pr. Se faire à soi-même une blessure : Se blesser en tombant. Prenez garde de vorjs blesser en maniant cette arme (Acad.) Si nous n’éprouvions pas la douleur, nous mous blesserions à tout moment sans le sentir. (Volt.)

— Particul. Se dit d’une femme enceinte qui, par suite d’accident, accouche avant terme : On lui fait garder le lit de peur qu’elle ne se blesse. (Acad.) Lorsqu’elle apprit que l’électeur s’était fait catholique, elle en fut outrée au point qu’elle s’en blessa, (St.Sim.)

— Fig. S’offenser, se piquer, se formaliser : Celui qui blesse la vérité offense les autres et se blessb lui-même. (Fén.) Les hommes se blessent de l’indifférence. (B. Const.) L’honneur est tendre et se blesse de peu. (Rivarol.) Vouloir le mal, faire le mal, c’est s’en vouloir à soi-même ; c’est se blesser au cœur. (Scipion Pinel.)

— Réciproq., Se faire mutuellement une blessure : Deux adversaires qui se blessent dans un duel. Il S’offenser l’un l’autre : Ils ont voulu disputer, et ils SE SONT blessés l’un l’autre.

BLESSI, IE ou BLETTI (blè-si, blè-ti) part. pass. du v. Blessir ou Blettir : Fruits blessis. Poires bletties.’

BLESS1G (Jean-Laurent), théologien protestant français, né à Strasbourg en 1747, mort dans cette ville en 1816. Quoique rils d’un pauvre pêcheur, Blessig fit néanmoins de bonnes études, fortifiées par un voyage de trois ans à travers l’Italie, la Bohême, la Saxe et la Hongrie. Il entendit, pendant ce voyage, les professeurs les plus distingués, se créa beaucoup de relations parmi les personnages distingués de cette époque, et revint à Strasbourg, où il obtint une place de professeur au gymnase de Saint-Guillaume. Dans la suite, il fut successivement professeur de philosophie (1778), prédicateur au Temple-Neuf et professeur de théologie (1783). Dans un voyage qu’il fit à Paris vers ce temps, il entra en rapports avec d’Alembert, Thomas, Arnaud, l’éloquent prédicateur Elisée, etc. Blessig salua la Révolution française avec enthousiasme ; il voyait la liberté se lever avec elle, et l’heure de la justice enfin venue pour, les protestants si longtemps persécutés. 11 avait prononcé sur ces persécutions un discours qui lui avait valu des poursuites judiciaires. Les nouveaux événements y mirent un terme. Il fut élu notable ; mais, devenu suspect en 1792, il dut quitter Strasbourg et sortir même de l’Alsace. Rentré dans sa ville natale, après avoir payé une amende de 8,000 fr., il fut de nouveau désigné comme suspect, arrêté et jeté en prison. La chute de Robespierre l’en arracha. Pendant ses heures de captivité, il avait étudié la Bible ; et quand la Convention lui permit de remonter dans sa chaire de professeur, il initia ses nombreux auditeurs a ses recherches solitaires. Mais, désormais, il se tint éloigné de la politique, se consacra à la réorganisation du culte public, au rétablissement de la discipline, et rendit de grands services à l’Église protestante. Nous lisons dans la France protestante qu’il garda pendant tout l’Empire un silence prudent et une réserve peut-être excessive. Nous ne saurions l’en blâmer.

Nous avons de lui près de quarante ouvrages, dont voici les principaux : Origines philosophiœ apud Romanos (1770, in-4o) ; Discours prononcé à l’occasion de la translation du corps de M. le maréchal de Saxe dans l’église de Saint-Thomas (1777, in-4») ; Ùeber Unglauben, Aherglauben und Glauben (Strasbourg, 1786, in-8o) ; Zwei Predigten, durch Christum viird mir Gluck in aller Etoigkeit (Strasbourg, 1788, in-8o) ; De l’influence de la religion protestante sur les relations de la vie civile et domestique (Strasbourg, 1808, in-8o) ; Sermons prononcés au commencement du xixg siècle (Strasbourg, 1816).

BLESSINGTON, ville et paroisse d’Angleterre, en Irlande, comté et à 35 kilom. N.-O. de Wicklow, sur la Liffey ; 8,168 hab. Carrières de granit.

BLESSINGTON (miss Poweli. Gardener, comtesse de), femme auteur anglaise, née en 1789 dans le comté de Waterford (Irlande), morte à Paris en 1849. Elle était déjà veuve lorsqu’elle épousa lord Blessington et acquit ainsi une haute position dans l’aristocratie anglaise. À la fois femme du monde et auteur, lady Blessington a, en quelque sorte, deux personnalités très-tranchées. Elle s’est acquis une grande célébrité par le rôle brillant qu’elle joua longtemps dans les hautes sphères de la société anglaise, comme reine de la mode, de la fashion et du bon goût. Mais cette renommée, qui lui a survécu, reposait sur un mérite plus solide ; les femmes qui savent réunir dans leur salon un cercle d’esprits éminents, d’hommes illustres, à l’exemple de MmeGeoffrin, de MmB Récamier et de Mme de Girardin, ces femmes se détachent assurément du vulgaire ; elles aussi sont des esprits d’élite.

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La résidence de lady Blessington, à Gorehouse, faubourg de Kensington, fut le trait d’union de l’aristocratie anglaise et des étrangers de distinction. Il est vrai que sa maison fut enfin presque désertée par les dames anglaises, blessées dans leur amour-propre par les romans où ce spirituel écrivain persiflait impitoyablement la pruderie britannique et son puritanisme hypocrite. Amie de lord Byron, du comte d’Orsay, de Dickens, elle a peint avec une grande vérité, dans ses romans, dans ses nouvelles, etc., les classes aristocratiques de la Grande-Bretagne. Douée d’un esprit délicat et lin, observateur et pénétrant, indépendant et d’une distinction rare, lady Blessington occupe un rang à part dans la littérature anglaise contemporaine. Nous citerons parmi ses ouvrages : la Lanterne magique (1823) ; Conversations de Byron (1834), si intéressantes pour les admirateurs de ce pofite ; Confessions d’un vieux gentleman (1836) ; Confessions d’une dame sur le retour (1838) ; Loisirs d’une femme en France et en Italie ; les Victimes de la société (1837) ; la Loterie de la vie (1842) ; Meredith (1843) ; les Mémoires d’une femme de chambre (1846). Ses premières œuvres ont été publiées sous le titre deWorksoflady Blessington (1838, ïvol.).

Bleuington (MÉMOIRES DE LADY), publiés

en anglais sous ce titre : The literary life and correspondence of the countess of Blessington (Londres, 1855, 3 vol.). Une femme remarquable par son esprit et par sa grâce, jeune encore au seuil de la vieillesse, qui était à peine pour elle la maturité ; une grande dame de la société anglaise, qui, pendant plus d’un quart de siècle, avait eu le privilège d’occuper la curiosité publique par ses aventures, par ses talents et par son influence sociale ; une personne enfin dont le goût était le régulateur de la mode, du caprice et du ton du jour, ne pouvait s’éclipser comme un météore fugitif sans laisser des traces de son passage. La publication de ses Mémoires excita donc le plus vif intérêt, et cet intérêt fut justifié par les renseignements intimes et exacts qu’on y trouva sur sa vie, comme par la variété et le mérite des correspondances qui y sont contenues, et qui proviennent, la

Plupart, des plus illustres personnages de Angleterre et de quelques étrangers distingués. Nous négligerons ici la partie de ces Mémoires qui se rapporte h la vie de lady Blessington ; nous détacherons toutefois, de la biographie tracée par le docteur Madden, le portrait de la divinité, a l’âge de vingt-huit ans :

« Dans la maturité accomplie de sa beauté, ses formes, admirablement proportionnées et arrondies, inclinaient déjà à la plénitude sans avoir dépassé la limite de la grâce. Ce qu’il y avait en elle de particulièrement attrayant, c’était le rapport harmonieux de ses traits avec les émotions de son âme. À l’instant même où une pensée joyeuse s’était emparée de sa fantaisie, on la lisait dans le scintillement de ses yeux, sur ses lèvres souriantes, on l’entendait dans la sonorité de son rire, clair et doux comme les éclats de ta gaieté enfantine... Il y avait tant de naturel dans l’ardeur irlandaise de ses sentiments, tant d’abandon, tant d’insouciance apparente du pouvoir de ses charmes, que la bienveillance du sourire, de l’esprit, de la gaieté de cette femme aimable a été rarement surpassée. Sa voix était harmonieusement modulée, douce, claire, argentine. Auprès de l’incomparable douceur de cette voix, de ses intonations enchanteresses, tous ses autres charmes n’étaient que des attractions secondaires... >

La partie des Mémoires qui offre un intérêt général, ce sont les lettres qui furent adressées à lady Blessington par un grand nombre des hommes remarquables de ce siècle. On y trouve une poésie inédite de Byron sur la mort d’une femme. On y remarque des lettres de M. Walter Savage Landor, le seul, avec Tennyson, qui soit resté vivant de cette pléiade où figuraient Southey, Coleridge, Scott, Byron, Wordsworth, Moore.

Parmi les correspondants de lady Blessington, il en est qui n’appartiennent pas à la littérature : de ce nombre sont lord John Russell et celui que les Anglais appelaient le duc de Fer, dont la brusquerie se mélangeait de galanterie pour la noble dame. Mais la littérature reprend ses droits avec sir E. Bul-wer Lytton, Charles Dickens, Casimir Delavigne, Alfred de Vigny, Eugène Sue, l’excentrique vicomte d’Arlincourt, miss Lœtitia Landon, la Sapho anglaise, etc. La diplomatie échange h. son tour des notes et des protocoles avec la belle correspondante ; elle est représentée par le comte Matuszewcz, le prince de Schwarzenberg, le duc d’Ossuna, et ces messieurs écrivent tout aussi bien que des hommes de lettres de profession.

La lecture de ces Mémoires, si intéressante par tous les points qui se rattachent à des laits historiques, à des personnalités éminentes, amène un sentiment d’ennui et même de dégoût pour un monde stérilement affairé, prétentieusement oisif, où les choses les plus sérieuses et les plus instructives prennent des airs de futilité, tandis que la mode et les convenances ; le sport et la fashion y sont regardés et traités comme de graves affaires.

BLESSIR v". n. ou intr. (blè-sir). V. blettis

blessissement s. m. (blè-si-se-man).

V. BLETTISSEMENT.