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Page:Larousse - Grand dictionnaire universel du XIXe siècle - Tome 3, part. 4, Chao-Chemin.djvu/198

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de toute la différence qui existe toujours entre les prévisions des projets et les réalités de l’exécution ? Nous osons espérer que vous oe le voudrez pas, et nous vous demandons de ne pas le faire. »

Le plan d’expropriation des Compagnies de chemins de fer supposait un pouvoir fort, maître de l’avenir ; il fut emporté par le torrent des événements et ne subit même pas l’épreuve de la discussion. On s’est plu à répéter, on répète encore que ce plan violait des conventions sacrées, était essentiellement contraire à la justiee. « L’expédient de l’expropriation forcée, avant la terme stipulé dans tes cahiers des charges, dit M. Audiganne, était impossible à justifier. Que signifie une concession du genre des concessions de chemins de fer, accordée pour une certaine période, avec réserve de la faculté de rachat au bout d’un certain délai, si elle n’est pas exclusive du droit d’expropriation pendant ee dernier terme ? Autrement la durée n’est plus qu’un vain mot. Autant vaudrait dire que le temps de la concession est abandonné au bon plaisir de l’État. » La distinction si lumineuse faite par M. Bineau, dans son rapport, entre le droit naturel d’expropriation pour cause d’utilité publique, et Je droit écrit, contractuel de rachat, réduit à sa juste valeur cette accusation d’injustice et d’improbité que le projet de la commission exécutive pouvait sans doute attendre des passions réactionnaires et des intérêts menacés, niais qu’on s’étonne de retrouver en 186Î sous la plume refroidie d’un économiste aussi distingué que m. Audiganne. Pourquoi la propriété temporaire, ta propriété concessionnelle ne serait-elle pas soumise au droit d’exp’ropriation comme la propriété perpétuelle ? Si le droit permanent d expropriation, ait de la durée des concessions un vain mot, ne peut-on pas lui reprocher au même titre de rendre illusoire la perpétuité de la propriété ordinaire ? N’est-il pas évident que le droit d’expropriation, impliquant indemnité, laisse absolument intacts tous les éléments de la valeur de la propriété à laquelle il s’applique, et qu’en ce qui concerne la propriété concessionnelle le temps de. la concession reste un élément important de cette valeur ? Que l’on critique le projet de rachat des chemins de fer par l’État, au point de vue politique, au point de vue économique, au point de vue financier, soit ; il soulevait certainement des objections sérieuses ; mais qu’on ne parle plus de spoliation,

— II. Théorie rationnelle du l’exécution

ET DE l’kXPLOITaTION DES CHKMINS DE KEK.

Nous avons exposé les discussions parlementaires soulevées par la question de l’exécution et de l’exploitation des chemins de fer. Il nous reste à examiner cette question en nous plaçant sur le terrain de la théorie, de la science pure. On remarquera d’abord qu’elle a divisé les économistes. Blanqui, dans son Cours d’économie industrielle, se prononce nettement pour le système de l’exécution et de l’exploitation par l’État. € Le système de concession, dit-il, entraîne la création de privilèges, qui donnent naissance à de grandes fortuites, lesquelles profitent seules des avantages que présentent les nouvelles routes- La première condition de succès pour une société concessionnaire est dans la durée de l’exploitation et dans la stabilité des tarifs qui peimettent de prévoir à l’avance le chiffre des revenus ; il ne serait donc pas possible de trouver des sociétés qui consentissent à laisser insérer dans l’acte.de concession une clause emportent la faculté pour l’administration de modifier les péages, toutes les fois que l’intérêt public l’exigerait. Cette difficulté disparaît du moment où l’État fait exécuter lui-même les routes de fer, -car il peut alors abaisser constamment les tarifs, et arriver même à ne demander que les frais d’entretien et de transport, en abandonnant les intérêts et l’amortissement de ses avances, comme il le fait pour les-routes ordinaires, ce dont personne ne sonçe à le blâmer, et ce qu’il serait impossible de demander à une Compagnie. Et qu’on n’invoque pas, contre le bon marché des transports qui résulterait d’un tel système, l’intérêt des finances de l’État. Si le Trésor n’est pas indemnisé de ses avances par des péages spéciaux, il le sera par les mille voies indirectes de Hmpôt, d’autant plus productives qu’il y a plus de richesse dans le pays. Tous ces terrains améliorés ou mis en valeur par les routes nouvelles, tous les produits aujourd’hui invendus qu’elles transportent avec célérité et économie, pour les mettre à la disposition des consommateurs, sont autant de richesses nouvelles qui devront payer leur dltne au Trésor. On n’a pas demandé au gouvernement ce que lui avaient rapporté les millions qu’il a dépensés pour établir dans l’ouest 300 lieues de routes stratégiques, qui ont en quelque sorte ajouté une nouvelle province à la France ; on n’a pas reproché à la ville de Paris d’acheter des maisons pour percer des rues, élargir les quais ; pourquoi donc l’État ne ferait-il pas

Îiour les chemins de fer, ces routes d’une civiisation avancée, ce qu’il a fait pour les routes ordinaires ?» Mais, dit-on, l’administration a un nombreux personnel, des formes souvent trop lentes, et ne peut établir ses travaux avec autant d’économie qu’une société particulière. —Et qu’importe que l’État demande à chaque contribuable quelques fruncs de plus pour les dépenses de premier établissement, si à ce prix il peut faire jouir tout le monde, les pauvres aussi bien que les riches, de ca nouveau

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mode de transport, qui esta la fois un instrument de travail et une source de jouissance. Les chemins de fer, qui sont» l’industrie et au commerce en général ce que les machines sont à l’industrie privée, doivent causer des perturbations, déplacer des existences, supprimer des revenus, en un mot, causer une révolution sociale momentanée, il est vrai, et au grand avantage de la communauté, mais qui ne sera pas moins pénible pour ceux qu’elle froissera. Combien d’aubergistes, de voituriers, de valets d’écurie, de charrons, ne se trouveront pas privés tout à coup de leur industrie et des revenus ou salaires qu’ils en tiraient ? Si cette révolution est inévitable, tâchons du moins qu’elle offre des dédommagements presque immédiats aux maux qu’elle doit causer. Si les ehemins de fer doivent, ainsi qu’il est facile de le supposer, occasionner la chute de la plus grande partie des entreprises de voitures transportant Ses voyageurs, et plus tard celles des voitures destinées aux marchandises, il faut au moins que la modicité des prix du tarif permette à tous ceux qui allaient dans les petites voitures de monter dans Les wagons, afin que, comme cela est arrivé en Angleterre, ils ne soient pas obligés d’aller à pied. « Les chemins de fer concédés a des Compagnies seraient des chemins de grands seigneurs dont les grandes et moyennes fortunes pourraient seules se servir ; exécutés par l’État avec l’argent de tous, ils doivent être faits au profit de tous et devenir les omnibus du peuple. »

M. Dupuit estime que le système de l’exploitation par l’État présente plus d’avantages sans avoir plus d’inconvénients que le système des Compagnies. « L’État, dit-il, est si souvent obligé de contrôler, de surveiller l’exploitation des chemins de fer, que quelques personnes ont pensé qu’autant vaudrait qu’il en fût lui-même chargé, comme cela » lieu en Belgique. Il faut remarquer, en effet, que les considérations sur lesquelles les économistes s’appuient pour refuser à l’État l’exploitation de la plupart des industries sont ici sans application. Il est incontestable, en effet, que lorsque le producteur travaille à la tâche, c’est-à-dire lorsqu’il reçoit un salaire en rapport avec la qualité et la quantité de son produit, il travaille le mieux et le plus possible, tandis que lorsqu’il travaille à la journée, comme le fonctionnaire, c’est-à-dire au moyen d’un salaire fixe, il travaille le moins possible. L’État qui se ferait tailleur, cordonnier, menuisier, etc., produirait donc avec beaucoup plus de frais que l’industrie privée. Mais lorsqu’il s’agit d’une industrie dont presque tous les agents sont à salaires fixes et ne sont pas plus intéressés au bien de la Compagnie que les fonctionnaires publics ne le sont au bien de l’État, lorsque cette industrie est administrée par des conseils nombreux, elle a évidemment tous les inconvénients de l’État. Peut-être n’en a-t-elle pas tous les avantages. L’opinion publique, la presse exerce sur les agents de l’État un certain contrôle auquel échappent les agents des Compagnies, que l’on considère comme des industriels privés, et à l’égard desquels la critique semblerait prendre un caractère diffamatoire. L’organisation de l’État, fruit de longues études et d’une longue expérience, sans être parfaite, il s’en faut, est cependant supérieure à celle des grandes compagnies industrielles, « M. Dupuit reconnaît cependant qu’il est un point sur lequel les Compagnies présentent un avantage ; c’est en ce qui concerne la construction et la direction première du chemin. • Lorsque la question de faire ou de ne pas faire un chemin, dit-il, ou d’en déterminer le tracé s’agite dans les conseils de l’État, beaucoup d’influences étrangères à l’utilité du chemin peuvent amener une décision mauvaise et contraire à l’intérêt public. Il est évident qu’une Compagnie cherchera par-dessus tout les voyageurs et les marchandises. Sans doute elle pourra se tromper ; mais au moins elle n’a aucun intérêt à le faire, et il est probable que, dans la plupart des cas, elle ne le fera pas. Ici son intérêt est conforme a l’intérêt public. C’est là une grande considération, car les dépenses faites pour la construction d’un chemin de fer inutile sont une perte pour la société. •

M. Baudrillart met en parallèle les raisons qu’invoquent les deux systèmes et paraît donner la préférence aux Compagnies, sans cependant condamner d’une manière absolue

l’exécution et l’exploitation par l’État. ■ On a beaucoup agité, dit-il, surtout au sujet des chemins de fer, la question de savoir si les voies de communication devaient être construites et exploitées par l’État ou par des Compagnies, et les différents pays de l’Europe ont suivi divers errements... Les partisans du système qui attribue à l’État ce genre de production se fondent principalement sur le caractère d’intérêt collectif qu’il présente, et sur ce que ces lignes forment un monopole inévitable. Monopole pour monopole, celui de l’État leur paraît présenter plus de garanties pour le public, tant pour la régularité et la sécurité du service que pour le oon marché. Les défenseurs du système d’exploitation par les Compagnies font valoir d’autres raisons et d’abord nient la validité de celles de leurs adversaires. Les chemins de fer constituent-ils, par exemple, un monopole aussi nécessairement qu’on le prétend ? Sans doute on ne construira guère deux ou trois routes parallèles d’un point à un autre se faisant concurrence ; mais la concurrence des voies de communica CHEM

tion, notamment des voies perfectionnées, chemins de fer, canaux, etc., s exerce dans un rayon considérable. Soit le chemin de fer du Havre à Strasbourg, par exemple, surélevant ses prix de transport, le transit des voyageurs et des marchandises vers le centre de l’Europe ne se déplacera-t-il pas en faveur d’Anvers ou d’Amsterdam ? Pour les points intermédiaires, il y a la concurrence des canaux, des rivières, des tronçons a peu près parallèles ou des routes ordinaires, concurrence qui devient plus active en présence d’une tentative de monopole. Faire construire et exploiter les voies de communication par l’État, c’est faire payer à, tous par l’impôt des services dont tous profitent peut-être à quelque degré, mais fort inégalement. Enfin pourra-t-on attendre de l’État cet esprit de perfectionnement qu’inspire seul l’intérêt privé, et de purs fonctionnaires le même zèle que d’agents placés sous la surveillance des Compagnies ? Toutes ces raisons font pencher la balance en faveur de l’exploitation par les Compagnies, bien qu’en matière de voies de communication, et surtout de grandes lignes, le monopole gouvernemental soit loin de présenter d’aussi grands désavantages que relativement aux diverses autres industries. »

M. Joseph Garnier reconnaît qu’entre les mains des Compagnies concessionnaires les voies ferrées présentent incontestablement le caractère de monopole, surtout avec le système de fusion entre les diverses entreprises d’une même région ; que, par.suite, dans ce genre de production, l’avantage de l’industrie privée est moins tranché et plus douteux que dans les autres ; que le mode d’exploitation des grandes Compagnies rappelle, à bien des égards, les inconvénients du monopole gouvernemental. Cependant il estime que l’expérience a prononcé contre le système de l’exploitation par l’État, et se plaît à faire remarquer que ce système offre moins de garanties aux particuliers, ceux-ci pouvant traduire les Compagnies devant les tribunaux et se trouvant désarmés en face des agents de l’État.

M. Poujard’hieu se prononce avec plus de force pour le système des Compagnies. « Est-il de l’essence du gouvernement de se trouver mêlé à chaque instant aux affaires actives du pays, au mouvement des intérêts privés ? L’exploitation, la construction des chemins de fer, réclament le concours d’un personnel accoutumé ou préparé aux expédients de la pratique des transactions industrielles, financières, commerciales et contentieuses, et ce personnel ne paraît réunir aucune des conditions ni réclamer aucune des aptitudes qui seraient utiles à sa métamorphose en un personnel de fonctionnaires. » C’est surtout au point de vue des progrès à accomplir que M. Poujard’hieu considère l’exploitation par l’État comme funeste. « L’administration gouvernementale, dit-il, est essentiellement conservatrice, c’est son devoir et sa mission ; elle ne peut pas être militante, elle ne peut accepter le progrès qu’après de longues épreuves : elle n’a pas d’initiative, parce que l’individualité des personnes n’y ressort pas. Elle est la tradition, la conservation du progrès expérimenté et accepté. Elle régit ce qui est, elle n’a pas" à prévoir ce qui peut être, car l’émulation de l’intérêt privé ne doit pas exister dans son sein. » Ce n’est pas tout : suivant M. Poujard’hieu, l’État, devenu propriétaire des chemins de fer, serait naturellement entraîné à suivre et à étendre le système qu’ont inauguré les Compagnies elles-mêmes, lequel consiste à établir de vastes ateliers pour fabriquer les engins qui leur sont nécessaires. On verrait bientôt apparaître l’absorption par l’État de toutes les industries qui tiennent aux chemins de fer : fabrication de locomotives, de ■ wagons, de matériel de toute sorte, y compris les rails. Sur cette pente on arriverait vite à l’expropriation des usines métallurgiques. Déjà maître de la fabrication des armes, de l’architecture navale, de l’exploitation des forêts, du transport des dépêches privées, l’État, en se substituant à toutes les industries qui puisent leur activité dans les chemins de fer, compléterait un vaste et redoutable système d’accaparement et de monopole. Enfin l’État pourrait difficilement exercer les droits d’un agent ordinaire d’exploitation et se soustraire aux exigences qui méconnaîtraient cette fonction économique ; si, suivant les errements des Compagnies, il changeait ou modifiait à certains moments les bases des tarifs, le relèvement de ces tarifs deviendrait aussi difficile que le rétablissement d’un impôt.

Cette absorption par l’État de toutes les industries qui tiennent aux chemins de fer, si effrayante aux yeux de M. Poujard’hieu, est précisément ce que demande le socialisme autoritaire ; ce n’est même qu’une partie de ce qu’il demande : l’État maître et directeur de toute l’industrie du pays, tel est l’idéal qu’il poursuit. L’État, dit. M. Louis Blanc, doit réaliser la liberté véritable en donnant à l’individu non-seulement le droit, mais le pouvoir de développer ses facultés ; il ne peut donner à l’individu le pouvoir de développer ses facultés qu’en lui fournissant des instruments de travail ; il ne peut lui fournir des instruments de travail qu’en mettant la main sur l’industrie. Comment mettra-t-il la main sur l’industrie ? En créant et commanditant à ses frais des ateliers sociaux destinés à remplacer graduellement les ateliers individuels. Ecoutons l’auteur de l’Organisation du travail : « Jusqu’ici tous les pouvoirs se sont appelé8

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la résistance ; désormais tout pouvoir devra s’appeler le mouvement, ou n’être pas ; car le monde est invinciblement poussé dans des routes nouvelles : aveugle qui l’ignore ; insensé qui le nie. C’est pourquoi la logique même de l’histoire commande la création d un ministère du progrès ayant pour mission spéciale de mettre la révolution en mouvement et d’o.uvrir la voie qui mène aux horizons lumineux. Supposons que ce ministère soit créé, et qu’on lui constitue un budget : — en remplaçant la Banque de Francs par une banque nationale et en mettant les bénéfices qui aujourd’hui ne font que grossir la fortune de quelques opulents actionnaires au service du prolétariat à affranchir ; — en faisant rentrer dans le domaine de l’État et les chemins de fer et les miues ;—en centralisant les assurances ;

— en ouvrant des bazars et entrepôts au nom de l’État ; — en appelant, pour tout dire, à l’œuvre de la révolution, les puissances’ réunies du crédit, de l’industrie etdu commerce... on se trouverait avoir en quelque sorte sacré et armé la révolution. Et voici alors ce qu’il y aurait à faire. Le budget du travail, formé comme il vient d’être dit, serait affecté, en ce qui concerne le travail des villes, à l’établissement d’ateliers sociaux dans les branches les plus importantes de l’industrie. Cette opération exigeant une mise de fonds considérable, le nombre des ateliers sociaux originaires serait rigoureusement circonscrit ; mais, en vertu de leur organisation, ils seraient doués d’une force d’expansion immense.., .. L’État se servirait de l’arme de la concurrence, non pas pour renverser violemment l’industrie particulière, mais pour l’amener insensiblement à composition. Bientôt, en effet, dans toute sphère d’industrie où un atelier social aurait été établi, on verrait accourir vers cet atelier, à cause des avantages qu’il présenterait aux. sociétaires. Au bout d’un certain temps, on verrait se produire, sans usurpation, sans injustice, sans désastres irréparables, et au profit du principe de l’association, le phénomène qui, aujourd’hui, se produit si déplorablement, et à force de tyrannie, au profit de l’égoïsine individuel. Un industriel très-richo aujourd’hui peut, en frappant un grand coup sur ses rivaux, les laisser morts sur la place et monopoliser toute une branche d’industrie. Dans notre système, l’État se rendrait maître de l’industrie peu à peu, et, un lieu du monopole, nous aurions, pour résultat du succès, la défaite de la concurrence, l’association. > On voit que, pour les socialistes autoritaires, le retour au domaine de l’Étatdes chemins de fer, ainsi que des mines, des assurances et de làbanque, n’est que la préface et le moyen d’un vaste système d’organisation de l’industrie par l’autorité publique ; d’après cette école, il ne doit plus y avoir dans la société que des services publics et des fonctionnaires ; le domaine public doit s’étendre à tout ; l’industrie privée doit disparattre progressivement.

Plus d’industrie privée, dit le socialisme autoritaire et fraternitaire. Plus de services publics, plus de domaine publie, répond !e libéralisme économique, poussé intrépidement

jusqu’à l’utopie par M. de Molinari. M. de Molinari nie que les ehemins de fer forment un monopole naturel, et que l’intervention d<j l’État soit nécessaire pour empêcher le prix courant des transports de devenir un prix de monopole. Il veut que les chemins dejer forment une propriété perpétuelle et une industrie absolument libre, comme les propriétés et les industries ordinaires. Et qu’on ne vienne pas, pour justifier l’ingérance de l’État dans l’industrie des chemins de fer, parler des routes et des canaux, lesquels sont laissés en France au domaine public, et par suite construits et entretenus par l’État. Routes et canaux doivent, selon M. de Molinari, être ap-Fropriès, comme les chemins de fer. Il invoque exemple de l’Angleterre. • Les voies de communication, dit-i !, sont bien plus nombreuses dans ce pays qu’en France. Sait-on h, quoi cela tient ? Tout simplement à ce que le gouvernement a laissé les particuliers construire des routes sans se mêler d’en construire lui-même. — Mais les péages ? dit-on. — Ehl croyez-vous donc qu’en France les routes so construisent et s’entretiennent pour rien ? Croyez-vous que le public n’en paye pas la construction et l’entretien comme en Angleterre ? Seulement voici la différence. En Angleterre, les frais de construction et d’entretien des routes sont couverts par ceux qui s’en servent ; en France, ils sont couverts par tous les contribuables, y compris les chevriers des Pyrénées et les paysans des Landes qui ne foulent pas deux lois par an le. sol d’une route nationale. En Angleterre, c’est le consommateur de transports qui paye directement les routes sous forme de pé : iges ; en France, c’est la communauté qui les paye indirectement sous forme d’impôts le plus souvent abusifs et vexatoires. Lequel est préférable ? » Pas plus que les routes, les canaux ne doivent rester dans le domaine public. « Dajjs quels pays les canaux sont-Us le plus nombreux, le mieux construits et le mieux entretenus ? Est-ce dans les pays où ils se trouvent entre les mains de l’État ? Non ! c’est en Angleterre et aux États-Unis, où ils ont été construits et où ils sont exploités par des sociétés particulières- » Tirant toutes les conséquences de son principe dé la propriété pure, M. de Molinari vajusqu’à refuser à l’État le droit d’expropriation pour cause d’utilité publique moyennant indemnité. On prétend, dit-il, que ce droit reai’erme