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venue, le mouvement cesse, et elle fait un tour ds valse avec celui qu’elle a coiffé ; pendant ce temps, les autres, regagnent leur place. Il Chapeau magique, Nom d’une autre figure de la même danse. Un groupe part en valsant ; le cavalier remet à sa dame un chapeau, que celle-ci va présenter à plusieurs autres dames, en les priant d’y déposer un objet quelconque. Cela fait, elle présente le chapeau a un pareil nombre de cavalière, en les invitant à prendre un des objets qu’il contient, puis chaque cavalier valse avec la dame à laquelle appartient l’objet qu’il a pris.

— Prestidig. Tour du chapeau, Tour d’escamotage qui consiste à tirer d’un chapeau une foule d’objets divers.

— Hortic. Abri qu’on met, dans les jardins botaniques, au-dessus et à côté des plantes qu’on veut protéger contre le soleil ou le vent : On se sert des chapeaux depuis avril jusqu’en septembre. (Bosc.)

— Bot. Renflement que présente la partie supérieure de certains champignons, tels que les agarics, les bolets, etc. : Le chapeau est, en général, la partie la plus importante du champignon. (A. Dupuîs.) Il Chapeau cannelle, Nom vulgaire de l’agaric châtain. Il Chapeau d’éoêque, Nom vulgaire de l’épimède des Alpes, du fusain et du paliure épineux, à cause de la forme de leurs fruits.

— Ornith. Partie supérieure du crâne des oiseaux, depuis la racine du bec jusqu’à la nuque. Il Chapeau roux, Espèce de gros-bec.

— Encycl. Hist. La variété des chapeaux n’a pas été moins grande dans l’antiquité que de nos jours ; le premier couvre-chef a dû être le bonnet a poils naturels, fait de la dépouille des animaux. Les Romains appelaient ce chapeau primitif galerus, et les Grecs kunê ; il était surtout porté par les paysans, par las chasseurs, par les habitants du Latium, et on le retrouve aussi bien sur les bords du Tibre que chez les Esquimaux et les Lapons. La coiffure propre aux Égyptiens était appelée calantica par les Romains, chez qui elle pénétra lorsque les mœurs vinrent à s’amollir et que l’on emprunta les modes étrangères. C’était une espèce de coiffe attachée par un lien autour de la tête, avec des plis ou des pans tombant de deux côtés sur les épaules, de telle sorte qu’on pouvait les tirer à volon, té, et s’en voiler toute la figure. Chez les Égyptiens, la calantica, qui avait à peu près la forme d’une casquette sans visière, était portée par les personnes des deux sexes j chez les Grecs et chez les Romains, l’usage en fut restreint aux femmes et à ceux qui affectaient des mœurs efféminées. Dans les peintures ou les sculptures égyptiennes, on voit de nombreuses représentations de cette coiffure, notamment sur la tête de l’Isis qui se trouve au Vatican. Un fait curieux, cité par Hérodote, semblerait indiquer que l’usage de cette coiffure n’était pas général. Cet historien prétend que, longtemps après une bataille, on distinguait encore les crânes des Égyptiens de ceux des Perses, ceux des premiers étant plus durs que ceux des seconds, qui avaient l’habitude de se couvrir la tête Les Perses, en effet, se couvraient la tête de la mitre, qui fut aussi adoptée par les habitants de l’Arabie, de l’Asie Mineure, et par les femmes grecques. Cette coiffure consistait en une longue écharpe qui enveloppait la tête du front à la nuque, et couvrait en mémo temps les joues et le menton, sous lequel ello passait. La grande mosaïque de Pompéi, qui se trouve au inusée de Naples, nous donne un spécimen parfait de cette coiffure et la manière de la porter. Elle a beaucoup d’analogie avec le turoan des Arabes et des Turcs. La mitre d’Asie, particulière aux Phrygiens et aux Amazones, était un bonnet de laine qui couvrait la tête et s’attachait sous le menton. Cette coiffure, dans les représentations artistiques, est le signe distinctif des Troyens, et surtout de Paris.

Outre la mitre, les Perses portaient aussi la tiare, coiffure nationale des Parthes et des Arméniens. C’était une calotte en coton souple, que l’on plaçait sur le sommet de la tête, et quun étroit ruban attachait autour de l’occiput ; elle ressemblait assez aux calottes des Turcs modernes, avec cette seule différence qu’elle laissait passer les cheveux sur le devant du front. La tiare portée par les rois était appelée par les Romains liara recta, et par les Grecs kidaris ; elle se distinguait de îa tiare ordinaire en ce que, au lieu d’être molle et flexible, elle était roide et se tenait dressée au-dessus de la tête comme nos chapeau® ; de plus, eile était entourée d’un diadème blanc à points bleus.

Plusieurs témoignages historiques nous démontrent que les Grecs et les Romains se servaient de chapeaux ; les Lacédémoniens en portaient en feutre, pour se distinguer des Ilotes leurs esclaves, Les Grecs portaient leurs chapeaux eu théâtre, car on lit que les Bgi-Httes accablèrent sous le poids de leurs cAa^aux Dracon, l’ancien législateur d’Athènes, éjU moment ou, placé sur le théâtre, il leur lisait les lois qu’il leur destinait. À Rome, les députés du sénat qui allèrent chercher Cmeinnatus pour le revêtir de la puissance dictatoriale le trouvèrent conduisant sa charrue et la tête couverte d’un cftapeau, au rapport de Danys d’Halicaïnasse. Suétone raconte qu’Auguste ne sortait jamais sans chapeau, bien différent de César, qui allait toujours nutête. Souvent les Romains se contentaient de

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se couvrir la tête d’un par de leur toge ; mais, en mainte occasion, ils portaient des chapeaux. À ce propos, il convient de remarquer que, contrairement à nos usages, c’était chez eux une marque de respect et de déférence que d’avoir la tête couverte, et qu’ils ne priaient jamais autrement les dieux.

Le chapeau le plus généralement porté par les anciens était le causia, qui des Grecs avait passé aux Romains. C’était un chapeau dû feutre, à haute forme, à larges bords légèrement relevés. Il avait été inventé par les Macédoniens, et, dans plusieurs médailles, on le voit sur la tête d’Alexandre. Il ressemble assez aux chapeaux de nos ecclésiastiques.

Un autre chapeau que les Romains empruntèrent aux Grecs, c’est le petasus, chapeau de feutre à fond bas et à larges bords..Comme il était très-soup !e, il prenait toutes sortes de formes ; mais, en général, il ressemblait assez aux chapeaux que portent chez nous les charbonniers et les Vorts.de la halle. Il était retenu par des cordons qui se nouaient soit devant, soit derrière la tête. Il était spécialement usité dans les voyages, et, dans les signes conventionnels adoptés par les artistes, le petasus pendant sur le dos signifiait un homme prêt à se mettre en route. La plupart des cavaliers de la procession des Panathénées portent un petasus.

Le pileus était un bonnet en feutre, porté exclusivement par les hommes. Il y en avait de différentes sortes : le bonnet phrygien, dont nous avons parlé ; le bonnet grec, qui était presque toujours en forme d’œuf, et le bonnet d’affranchi, assez semblable à notre chapeau noir, mais sans aucun bord. Lepileolus était un diminutif dupileus ; il se réduisait à unecalotte absolument semblable, par sa forme et par sa destination, à celle que portent encore les cardinaux et les prêtres catholiques, Le pileus était la coiffure ordinaire des marins, des pêcheurs et des artisans. Pendant les Saturnales, tout le peuple en portait, comme emblème de la grande liberté qui régnait à cette époque. C’était une allusion à l’usage de présenter un pileus à l’esclave-qu’on affranchissait. Quand, au contraire, on en mettait un en vente avec le pileus sur la tête, on indiquait par là qu’on ne voulait pas garantir sa fidélité.

À côté de ces coiffures permises à tous, il y en avait de particulières à certaines fonctions ; tel était, par exemple, Yalbo-galerus, bonnet de fourrure porté par le flamen dialis. Il était fait de la peau d’une victime blanche sacrifiée à Jupiter, et avait à son sommet une pointe saillante de bois d’olivier. Sauf cette pointe de bois, c’est tout à fait la tiare papale, à laquelle il a bien pu servir de modèle. Les flammes et les saliens portaient une calotte sur le sommet de laquelle était également fixé un morceau de bois d’olivier. Les figures qui nous en restent la représentent absolument semblable au casque prussien. Castor et Pollux-, Caron et divers autres personnages mythologiques, ont un chapeau particulier fait en forme de coupe renversée, et qui offrait beaucoup d’analogie avec le chapeau chinois.

Le voile était la principale coiffure des femmes grecques comme des femmes romaines ; il était semblable à celui dont se servent les, femmes turques. On le plaçait sur le haut de la tête, et on s’en entourait la figure de manière à ne laisser à découvert que la partie supérieure du nea et des yeux ; la partie inférieure du voile tombait sur les épaules et descendait jusqu’au milieu du corps ; c’est de ce costume que se parent encore à Rome, le jour de l’Annonciation, les jeunes femmes qui reçoivent une dot de l’État. Cependant les femmes se couvraient la tête d’une manière plus efficace avec le theristrum, - morceau d’étoffe carré, de toile en été, de laine eu hiver, qui les protégeait contre le soleil ou le froid. Cet usage subsiste encore en Italie, et il n’est personne qui ne connaisse ces coiffures si pittoresques des paysannes romaines et napolitaines. Il y avait aussi le caliendrum, sorte de bonnet élevé, à l’usage des dames romaines, et le reticulum, ou met de tête, semblable à ceux que les femmes portent encore aujourd’hui, avec cette différence, toutefois, que les anciens y déployaient un bien plus grand luxe. Dans la plupart des peintures de Pompéi, ce filet emprisonne les cheveux de Vénus, d’Ariane et des autres déesses et femmes mythologiques ; il est d’or et produit le meilleur effet. Mais ceci nous écarte quelque peu du chapitre des chapeaux. Revenons-y.

L’origine première de notre chapeau est le capuchon qui accompagnait la chape, et servait à couvrir la tête ; c’était une simple calotte de velours, de drap ou de feutre, qui s’attachait sous le menton par deux cordons. Tantôt elle était unie, et tantôt ornée de fourrures, de broderies ou de pierreries, selon les fortunes et les conditions. Le passage suivant d’un compte | de la première moitié du xiv» siècle montre

! quel luxe on y déployait déjà : « Baillez à
Kathelot, la chapelière, pour un chapel de

bièvre (castor), fourré d’armines, couvert

! dessus d’un roisier dont la tige estoit guippée

d’or de Chippie, de grosses perles de compte et de grenats, et les roses faites et ouvrées de grosses perles ; et par les costés avoit deux grandes quintefeuilles d’or soudé, semées de grosses perles, de grenats, de pierres esroaillées, et par-dessus le chapel, en haut avoit un dauphin fait d’or, tournant à vis sur un tuyau d’argent ; lequel chapel, garni de boutons, de perles rondètes et menues, et orfroiriées do

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bisète d’or de plites et de grosses perles, mons le Dauphin commanda à l’argentier, et en chargea faire tel et d’ieelle devise, pour donner à’maitre Jehan, le fol du roy. « Sous Louis XII, les calottes en velours qui recouvraient le sommet de la tête, les bonnets et les mortiers qui existaient en petit nombre, disparurent tout à fait pour faire place au chapeau rond à petits bords, assez semblable à notre chapeau moderne, avec cette différence qu’il était pointa et orné d’une plume. Sous Louis XII, la forme du chapeau avait changé. Elle tenait à la fois de celle du mortier et de celle du chapel. Les galons et les plumes l’ornaient toujours. François Ier, adoptant la coiffure espagnole, mit à la mode les chupeaux à larges bords età plume, et les élégants en portaient d’à peu près semblables. Sous Henri II, les chapeaux à grands bords avaientdisparu, et les hommes portaient tous un petit chapeau plat orné d’une plume. Pendant le règne de Henri III, on abandonna le chapeau à plume pour la toque en velours, que le chapeau des ligueurs fit à son tour disparaître. Vers la fin du xvte siècle, le chapeau était à.larges bords, relevé sur un côté et surmonté d’un grand panache. Ce chapeau, dont la forme fut un peu modifiée sous Louis XIII, devint d’une grande richesse j des plumes de prixi’ombrageaientet en faisaient une coiffure somptueuse. Sous Louis XIV, le chapeau à grands bords garni de plumes flottantes gagna encore en élégance ; mais la, mode des perruques étant survenue, le chapeau finit par devenir un simple accessoire de toilette qui descendit de la tête sous le bras. Aussi, le chapeau ne servant plus à rien, on le réduisit à ses dimensions les plus exiguës, et, sous Louis XV, ce ne fut plus qu’un tout petit tricorne. Les ailes avaient été relevées d abord sur un seul, puis sur deux et enfin sur trois côtés. Dans certains diocèses, les ecclésiastiques sont encore coiffés de la sorte. Le tricorne se plaçait généralement sous le bras, et l’aisance avec laquelle un homme l’y jetait négligemment était regardée comme un signe d’excellente éducation : « Quant aux hommes, voyez-les, dit Duîaure, courant chez leurs protecteurs, l’épée au côté, le chapeau sous le bras, vêtus de l’habit français galonné ou brodé ; leurs cheveux, sur le dos, sont réunis dans un sac de taffetas noir qu’on appelle bourse : leur tête est enfarinée de poudre, leur toupet élevé est accompagné de chaque côté de trois ou quatre boudins symétriques ou en ailes de pigeon. »

Par ordre du comte de Saint-Germain, ministre de la guerre sous Louis XVI, les soldats inaugurèrent une nouvelle espèce de chapeau, qui avait quatre cornes au lieu de trois. Cette mode ne prit pas, et on en revint aux trois cornes ; mais alors on disposa les ailes de façon qu elles formassent, 1 une étant plus grande que les deux autres, un triangle écrasé. Ce genre de chapeau se porta jusque sous le premier Empire. La grande aile se plaçait eu arrière et parallèlement aux épaules, de manière que l’angle formé par les petites ailes s’élevait directement sur le milieu du front. Les élégants de l’époque donnaient à cette grande aile des dimensions extraordinaires, et sous cette coiffure les hommes paraissaientêtre métamorphosés en polichinelles.

Il était aussi de bon goût de le placer un peu incliné sur l’oreille, ce qui passait pour donner un certain air crâne ou casseur a la physionomie.

Après une suite de transformations qu’il serait trop long de décrire, les chapeaux ont pris la forme que nous leur voyons aujourd’hui, celle d’un tube cylindrique avec des bords plus ou moins larges, plus ou moins retroussés. Cette forme est loin de briller par son élégance, et ceux qui l’ont comparée a un tuyau de poêle l’ont qualifiée comme elle le mérite. « Sur quel canevas a-t-on jamais brodé plus de plaisanteries, inventé plus de coq-à-1 âno que sur la forme de ce malheureux chapeau ? > a dit avec raison le Moniteur de VExposition. Les imaginations se sont échauffées, et le temps n’est pas encore loin où l’on vit les fouires révoltés adopter les dimensions les plus fantastiques ; mais l’effervescence ne fut pas de longue durée : on s’aperçut bien vite que les convenances ne s’arrangeaient que du chapeau proscrit ; on en médit encore beaucoup aujourd’hui, néanmoins chacun le porte, et les cavaliers ne dédaignent pas, dans un bal, de le réduire en galette avec garniture en soie bleue, et de le placer en dieu Terme sur la chaise de leur.danseuse. On en médit, et mieux, à peine sorti de la ville, on l’échange à l’instant contre une coiffure plus commode, mais il subsiste quand même. Que signifie cette impuissance à le remplacer ? Mystère ; car, comme "nous le disait un homme d’esprit, • ne cherchez pas une nouvelle combinaison du feutre pour abriter notre tête, elles sont toutes à la vitrine des marchands ; du Caucase à l’isthme de Panama, de l’Irlande au Iientucky, toutes les nations nous ont apporté ou nous ont laissé prendre le genre de coiffure propre à chacune d’elles. Nous avons essayé à peu près de toutes, moins du turban et du bonnet d’Astrakhan, et l’impérissable chapeau noir a survécu. » Demandezmoi pourquoi.

Il y a quelques années, une sorte de coup d’État eut lieu dans l’empire de la mode : les chapeaux panama, débarqués des îles, avaient tout à coup coiffé toutes les têtes d’hommes, au moins durant la belle saison ; le panama était.devenu la coiffure obligatoire ; ce chapeau, tressé en fibres blanches, qui jaunissaient très-facilement, n’était pas beau, tant

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s’en faut, mais il coûtait fort cher’, ce qui le mit promptement à la mode. Les chapeliers ne craignaient pas de mettre en montre des chapeaux panama cotés 500 fr. Mais un nouveau caprice détruisit cet engouement ; bientôt les panamas de 500 fr. tombèrent à 3 fr. 50 c, et personne n’en voulut plus. Toutefois, c’est à peu près de cette époque que date l’adoption, dans le costume masculin, du chapeau mou, du petit chapeau plat en feutre, qui n’a pu encore se substituer au classique tuyau de poêle pour la toilette habillée, mais qui est le seul admis aux bains de mer, aux champs, en voyage, etc. Tout le monde connaît les rapporte que l’usage a établis entre le chapeau et la politesse : on ôte son chapeau pour saluer, pour témoifner son respect ; on reste la tête découverte ans les églises, dans les assemblées, dans les salons ; mais il n’en a pas toujours été ainsi, comme nous l’avons déjà remarqué pour les anciens, et comme le prouve l’histoire moderne elle-même. Anciennement, tout le monde était couvert devant les rois, et plus tard, autour du roi, quand quelqu’un avait son chaperon, ceux qui étaient le plus près du roi lui faisaient place, parce que c’était une marque qu’il voulait parler au prince. Le changement des chaperons en bonnets, puis en toques, altéra peu à peu cet usage, et l’abolit & la fin, si bien que personne ne se couvrit plus devant le roi, smon dans certaines circonstances solennelles où- cela était exigé par l’étiquette, comme au sacré, aux pompes funèbres, on comme privilège spécial accordé à un très-petit nombre de courtisans. Voici maintenant ce qui donna le droit à certains seigneurs de rester couverts devant ie roi : « Après la chute de la ligue et la paix de Vervins, il vint en France un ambassadeur, qui était grand d’Espagne. Il alla trouver le roi à Monceaux, où il était avec peu de monde, et il l’accompagna

| dans les jardins que le roi avait fait faire, et qu’il se plut à lui montrer. Dans les commencements de la promenade, le roi se cou.vrit ; l’ambassadeur, accoutumé à se couvrir en même temps que le roi d’Espagne se couvrait, se couvrit. Henri IV le trouva fort mauvais ; il ne voulut pourtant en rien marquer à l’ambassadeur ; mais, jetant les yeux autour de lui, il commanda de se couvrir à M. le Prince, à M. de Mayenne, à M. d’Epernon, qui étaient les seuls grands qui se trouvèrent à cette promenade. » C’est de ce fait que ces courtisans se prévalurent pour revendiquer le droit de rester couverts aux audiences des ambassadeurs. Cette scène ridicule ressemble fort à celle d’Hernani, où un seigneur espagnol ramasse un titre que Charles-Quint a laissé toinber par mégarde. Les grands d’Espagne restent toujours couverts devant le roi ; cet usage vient de la prétention qu’ils ODt d être aussi nobles que lui.

L’industrie des chapeaux faisait autrefois la principale richesse de La Rochelle ; elle fui considérablement diminuée par la révocation de l’édit de Nantes, qui força d’émigrer à l’étranger la plupart des ouvriers en chapeaux. Ils se retirèrent presque tous dans le Brandebourg, où le roi Frédéric-Guillaume leur fit un excellent accueil. Il montra une joie extrêmo lorsqu’on lui présenta le premier chapeau de castor fabriqué dans ses États. En 1692, M. de Guénégaud fit une conférence sur les chapeaux, dans laquelle il disait : « Les peaux de castor dont on fait les chapeaux viennent du Canada en France, et passent en Moseovie, où on leur ôte tous les poils inutiles, et qui gâteraient les bons. Elles viennent à La Rochelle -, on en fait des chapeaux doux, luisants et à poil ; puis, après avoir été portés par les Français, maîtres et valets, ils retournent à La Rochelle, où on les remplit de gomme pour les porter aux Espagnols, qui les demandent durs, ras et sans pous, Après avoir rôdé l’Espagne et le Portugal, ils reviennent à La Rochelle ; on y redonne une petite façon, on les revoitnre à Lisbonne et de là au Brésil, où ils sont fort bien reçus, pourvu qu’ils soient mollasses et claque-bords, et lorsqu’à force de servir ils sont pleins de trous, les Portugais les mènent en Guinée, tout le long des côtes d’Afrique : les galants du Monomotapa y passent des plumes, et enfin les pauvres chapeaux que nous avons sur nos têtes vont mourir à Sofala ou à Mozambique. » Les pérégrinations du chapeau sont aujourd’hui moins lointaines, mais non peut-être moins nombreuses, et l’art des retapeurs parisiens, notamment, n’est guère moins admirable que celui des restaurateurs rochellois. Si, au xvn<* siècle, les chapeaux de La Rochelle étaient estimés, les autres, qu’on tirait généralement de la Normandie, étaient aussi fort prisés. Ceux de Cstudebee étaient en grande réputation, et Thomas Corneille a fait leur éloge. Il les loue surtout comme feutres de campagne et couvre-chefs de voyage ; ils sont, dit-il, fort estimés parce qu’ils résistent à la pluie,

Quoi qu’il en soit, vers la fin du xvil’ siècle^ il resta si peu de bons chapeliers en France, qu’on n’y connaissait plus le secTet de la fabrication des chapeaux fins, et qu’il fallut qu’un huguenot émigré, nommé Mathieu, le rapportât d’Angleterre. Ce fut à cette époque qu’on inventa le chapeau demi-castor ; mais cette industrie de pacotille fut poursuivie à outrance par Colbert, sans qu’il pût parvenir à l’empêcher, même à l’aide des peines les plus rigoureuses. On avait été, en 1673, jus-r qu’à punir le chapelier délinquantpar la privation de sa maîtrise et une amende de 2, O0Û liv. Louis XV rendit aussi des ordonnances contra