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rent, une espèce d’émeute éclata, et Contrafatto, frappé, poursuivi dans la rue, ne put échapper à ses agresseurs qu’en courant se réfugier dans l’église Notre-Dame de Lorette. Le jour même, Ta dame Le Bon porta une nouvelle plainte, en se constituant, cette fois, partie civile. Les amis du trône et de l’autel, comme on disait alors, recommencèrent leurs menées : ils prétendirent que la dame Le Bon n’était qu’un instrument dont se servait le parti libéral pour déshonorer l’Église. Contrafatto n’en fut pas moins arrêté de nouveau, et, le 15 octobre de la même année, il comparut devant la cour d’assises. À la suite de débats où l’immoralité de sa vie fut complètement mise à nu, Le jury le déclara coupable d’attentat à la pudeur consommé avec violence. En conséquence de ce verdict, la cour ie condamna aux travaux forcés à perpétuité, a l’exposition et à la marque. Il fut envoyé au bagne de Brest pour y subir sa peine, et, par un hasard singulier, la chaîne dont il fit partie renfermait un autre prêtre, l’Alsacien Molitor, condamné à la même peine pour vol, faux et attentat à la pudeur. Au milieu de ses compagnons de misère, Contrafatto se fit remarquer par une conduite exemplaire qui lui valut d’être recommandé à la clémence royale. En 183S, sa peine fut commuée en une détention perpétuelle dans les prisons de Rennes, En 1843, cette détention fut réduite à quatre ans. Enfin, en 1845, il fut gracié entièrement. Alors eut lieu un événement singulier dont nous devons dire quelques mots. Devant la cour d’assises de 1827, les intérêts de la daine Le Mon avaient été défendus pur un des premiers avocats du parti libéral, Charles Ledru, que ses opinions avancées, autant que son grand talent, avaient probablement fuit choisir, et qui, du reste, s’acquitta de sa mission avec un complet désintéressement. Après la* l’évolution de Juillet, a. laquelle il avait pris une part des plus actives, diverses circonstances (irent supposer à maître Ledru que Contrafatto aurait bien pu devoir sa condamnation à l’entraînement dus passions politiques. L’exaltation naturelle de son esprit et les mouvements mal réglés de son cœur donnèrent peu à peu un corps à ce soupçon, et il finit par croire à l’innocence du prêtre sicilien. Dès ce moment, il ne cessa de faire des démarches en faveur de celui qu’il avait contribué à faire condamner, et lorsque ce dernier eut obtenu sa liberté, Ledru commit l’imprudence inouïe de lui donner une déclaration écrite, dans laquelle il affirmait non-seulement son innocence, mais encore avançait que plusieursdes principaux témoins étaient venus lui confier, à lui, Ledru, qu’ils avaient altéré la vérité pour perdre l’accusé. Contrafatto comprit aussitôt toute l’importance de cette pièce, et s’empressa de la publier : elle parut, en 1846, d’abord, dans un journal de Rennes, puis dans l’Époque de Paris. En ce temps, Charles Ledru était un avocat démocrate, et la manière dont il avait défendu Alibaud, l’assassin de Louis-Philippe, ne l’avait pas mis en odeur de

sainteté aux yeux du gouvernement. À la suite d’une enquête accablante et d’une confrontation avec les témoins que sa lettre accusait, et qui tous le démentirent énergiquement, le conseil de l’ordre le suspendit pour un an. Lo conseil fonda son indulgence Sur « l’irréflexion et l’entraînement» propres, disait-il, au caractère de maître Ledru ; mais, sur l’appel du ministère public, qui ne trouva pas la punition assez sévère, un arrêt de la cour raya définitivement le nom de l’imprudent du tableau des avocats.

CONTRAHERVA s. f. (kon-tra-èr-va). Pharm. Syn. de contrayerva.

CONTRAIGNABLE adj. (kon-trè-gna-ble ; gn mil. — rad. contraindre). Jurispr. Qui peut être contraint, par quelque voie de droit, il donner ou a. faire quelque chose : Naguère, ceux qui avaient souscrit ou accepté des lettres de change étaient contraignables par corps. Un obligé est contraignable par toutes les voies de droit,

— Pig. Qui peut être contraint à quelque chose : Un Français reste cinq ans en prison, et après il en sort sans avoir payé ses dettes, il est vrai, car il n’est plus contraignable que par sa conscience, qui le laisse toujours en repos. (Balz.)

CONTRAIGNANT {kon-trè-gnan ; gn mil.) part. prés, du verbe Contraindre ; En contraignant les gens on ne gagne pas les cœurs.

CONTRAIGNANT, ANTE adj. (kon-trè-gnan, an-te-, gn mil. — rad. contraindre). Qui exerce de la contrainte ; gênant, pénible : Je vous plains des compagnies contraignantes que vous avez eues. (M»»e de Sév.) Il y a une force intérieure et contraignante qui suscite tout événement. (H. Tuine.)

Non, non, je ne veux point a votre passion Imposer la rigueur d’une explication ; Je ménage les gens, et sais comme embarrasse e contraignant effort de ses aveux en face.

Molière.

CONTRAIGNEMENT s. m. (koil-trè-gneman ; gn mil. — rad. contraindre). Action de contraindre, j] Vieux mot.

CONTRAIGNEUR S. m. {kon-trè-gneur ; gn mil. —rad. contraindre). Celui qui contraint. Il "Vieux mot.

CONTRAINDRRv.a.ou tr. (kon-lrain-dre-Jat. constringere ; de cumt avec, et stringere,

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étreindre : Je contrains, tu contrains, il contraint, nous contraignons, vous contraignez, ils contraignent ; je contraignais, nous contraignions, vous contraigniez ; je contraignis, nous contraignîmes ; je contraindrai, nous contraindrons ; je contraindrais, nous contraindrions ; contrains, contraignons, contraignez ; que je contraigne, que nous contraignions, que vous contraigniez ; que je contraignisse, que nous contraignissions ; contraignant ; contraint, ainte). Serrer, presser, mettre à l’étroit ; Cet habit, cette chaussure le contraint si fort qu’il souffre horriblement, il Ce sens a vieilli.

— Gêner, violenter dans ses goûts, dans ses penchants, dans sa volonté : Je ne prétends pas vous contraindre. Jésus-Christ parlait à tous sans contraindre personne, et laissant à tous la liberté. (St Athanase.) Les enfants cherchent ceux qui les flattent et fuient ceux qui les contraignant. (Fén.),

Contraî’ndres-vous César jusque dans ses amours’

Racine.

tl Violenter, en parlant des goûts, de la volonté : Outre la constitution commune, chacun apporte en naissant un tempérament particulier gui détermine son génie et son caractère, et qu’il ne s’agit ni de changer ni de contraindre, mais de former et de perfectionner. (J.-J. Rouss.) Mieux vaut tout perdre que contraindre le cœur de ce qu’on aime. (De Cu.stine.) Il est aussi malaisé de contraindre la volonté d’une femme que de mener une barque contre le vent. (M»" D.-Valmoro.) On persuade l’esprit, on ne peut le contraindre. (Ed. Scherer.)

Contraindre à ou de, Obliger par la force, pousser contre son gré à : Contraindre à l’obéissance. Contraindre à obéir. Contraindre de quitter le pays. Deux horribles nau- /Vflje.î contraignirent Us Humains n’abandonner l’empire de la mer aux Carthaginois. (Boss.) Ce n’est pas an acte de religion que de contraindre à la religion. (Bayle.) La raison indiqua te bien, mais ne contraint pas l’homme À le faire. (Mesnard.) Le mérite contraint l’envié*, l’estimer. (D’Alemb.) Un tyran, lamort à la main, peut vous contraindra A paraître l’admirer, mais non point k l’admirer en effet. (V. Cousin.) La force irrésistible de la logique humaine contraint l’homme k marcher ton- ' jours dans l’erreur comme dans la vérité. (Laurentie.) Il y a des gens dont le désintéressement consiste à tout refuser, de manière à se faire contraindre à tout prendre. (Latena.) Les douleurs de la vie, en nous montrant notre faiblesse, nous contraignent à chercher un consolateur. (J.’Simon.) Louis XIV croyait que le ciel l’avait envoyé sur la terre pour la contraindre A l’obéissance. (E. Pelletan.)

À tout oser le péril doit contraindre.

Corneille.

Non, je ne vous veux ras contraindre à l’oublier.

Racine.

Elle a, pour premier point,

Exigé qu’un époux ne la contraindrait point A traîner après elle un pompeux équipage.

Boileau.

— Absol. -. Inviter quand on peut contraindre, conduire quand on peut commander, c’est l’habileté suprême. (Montesq.) La force contraint, elle n’oblige pas. (Hoyer-Collard.) De la puissance de contraindre résulte la nécessité de céder. (Lamenn.) La force est la puissance de contraindre ; l’autorité est le droit d’ordonner. (Lamenn.) Dans leur premier degré, les passions demandent ; au second, cites exigent ; au troisième, elles contraignent. (De.scuret.)

— Prov. La nécessité contraint la loi, Lu nécessité mat au-dessus de la loi, dispense do lui obéir.

— Jurispr. Obliger par voies de droit, Contraindre quelqu’un par voie de justice, par justice. Contraindre par corps, par saisie de biens.

Se contraindre v. pron. Être contraint : La pensée ne peut SB contraindîuj. (Boiste.)

— Se faire violence, faire taire ses goûts, son penchant, sa volonté ; empêcher la manifestation de ses sentiments : On ne se peut jamais si bien contraindre qu’il n’échappe toujours quelque chose de naturel. (C. de Retz.) Nous aimons mieux tout risquer que de nous contraindre. (Boss.) Qu’est-ce que savoir vivre ? C’est savoir se contraindre sans contraindre les autres. (P. Bouhours.)

Eclatez, mes douleurs ; a quoi bon vous contraindre ?

CORNEILLE.

L’impatient Néron cesse de se contraindre ; Las de se faire aimer, il veut se faire craindre.

Racine.

On vous devine mieux que vous ne savez feindre, Et le stérile honneur de toujours roui contraindre Ne vaut pas le plaisir de vivre librement.

Voltaire.

Une fois l’an il vient me voir, Je lui rends le même devoir :

Nous sommes tous les deux a plaindre ; 11 «e contraint pour me contraindre.

Combaud.

Se contraindre à, S’astreindre à : Je ne puis me forcer et contraindre A être fier. (La Bruy.) On connaît Dieu facilement, pourvu qu’on ne se contraigne pas k le définir. (J. Jouhert.)

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..... la vous honore assez pour me conirùiurfrc A fuir obstinément tout sujet de me plaindre.

Corneille.

Se contraindre de, Se gêner pour, se priver de : Je ne me contraignis pas devant lui de répandre quelques larmes. (Mme de Sév.) il Peu usité.

— Gramm. Quand le verbe contraindre doit avoir pour complément un infinitif, il demande la préposition à si l’action de contraindre est envisagée comme exigeant de grands eiforts ; c’est, au contraire, la préposition de qu’on emploie si cette action n’est considérable que dans son résultat : Je te contraindrai bien k avouer la vérité. Quand il se vit contraint de céder.

— Syn. Contraindre, forcer, nécessiter,

obliger, violenter. Contraindre, c’est restreindre la liberté, ne laisser le pouvoir de faire qu’une seule chose qui n’est’ pas celle qu’on préfère. Forcer suppose quelque chose d’irrésistible, une puissance qui pousse ou qui entraîne. Nécessiter ou rendre une chose nécessaire ne s’emploie guère qu’en théologie ou en philosophie, et il fait penser a la nature même des choses comme s’imposant à la volonté ou h la marche dos faits. Obliger rappelle l’idée d’une obligation morale, d’un devoir. Violenter ressemble à forcer, mais il exprime une force brutale, matérielle, et il suppose une tentative ou au moins une pensée de résistance.

CONTRAINT, AINTE (kon-train, ain-te) part, passé du v. Contraindre. Serré, emprisonné : Être contraint dans son habit. Un bras de mer contraint entre deux chaînes de montagnes. Il Co sens a vieilli.

— Gêné, mal à l’aise, embarrassé : Air contraint. Mouvement contraint. Attitude contrainte. Il n’y a rien de contraint dans ses manières. C’était un grand homme sec, à taille contrainte, ayant le visage écorché, l’air sec et fat. (St-Siin.) La bouche était muette et le visage était contraint, mais le coaur se faisait entendre. (J.-J. lîouss.) Il Forcé, obtenu avec effort : Caresses contraintes. La jalousie est un aveu contraint du mérite. (La Bruy.) Il Dépourvu de facilité, de naturel : Ches ce peintre, la grâce même a quelque chose de

CONTRAINT.

— Forcé, obligé : J’ai été contraint d’agir comme je l’ai fait. On veut beaucoup quand on n’est contraint sur rien. (M""> je StaèL) Le sexe le ptus faible et le plus docile est celui qui aime le moins à être contraint. (Guizot.)

Ne valait-il pas mieux, renfermée à Mycénc, Eviter ces tourments que vous venez chercher. Et combattre des feux cotMroi’iittde se cacher ?

Racine.

— Mus. Basse contrainte, Celle qui n’a qu’un motif très-simple, très-court, et qui se répète dans tout le cours du morceau.

— Antonymes. Dégagé, franc, naturel, libre, spontané, volontaire, facultatif.

CONTRAINTE s. f. (kon-train-te — rad. contraint). État de gêne de ce qui se trouve à l’étroit : La contrainte de la chaussure, du corset.

— Violence qui gêne ou détruit la liberté ; état de gêne produit par cette violence : Exercer une contrainte. Vivre dans la contrainte. Faire quelque chose par contrainte. La contrainte morale est un genre d’influence qui aie toute espèce de liberté à ceux sur lesquels on l’exerce, et qui, sous ce rapport, est à condamner énergiquement. (St-Prosper.) Toute espèce de contraintb morale est odieuse. (St-Prosper.) Il y en a d’aucunes qii prennent des maris seulement pour se tirer de la contrainte de leurs parents. (Mol.) Le tigre est peut-être le seul de tous les animaux dont on ne puisse fléchir lenaturel ; ni la force, ni la contrainte, ni la violence ne peuvent le dompter, (Buff.) Il y a en nous un principe qui s’indigne de toute contrainte intellectuelle. (B. Const.) La contrainte et l’amour ne vont pas ensemble, et le plaisir ne se commande pas. (J.-J. Rouss.) La contrainte n’a jamais fait que des hypocrites ou des ignorants. (Mme de Puisieux.) La contrainte imposée par les lois prohibitives est précisément ce qu’il faut pour favoriser la paresse de l’esprit, mais non pour conserver l’innocence du cœur. (Mme <ie stasl.) Sous le règne de la liberté, le bien est certain, le mal n’est que contingent, sous celui de la contrainte, c’est le contraire. (Bentham.) En Europe, le désir est enflammé par la contrainte. (H. Beyle.) La contrainte fait des hypocrites et quelquefois des rebelles. (Lamenn.) La contrainte employée sans ménagement à l’égard de la jeunesse ne réussit’ qu’à ta condition de l’abrutir. (P. Janet.)

Quoi ! seigneur, vous iriez jusques a la contrainte ?

Racine.

Vivre dons la contrainte est le plus grand des maux.

Mme Desiioulièkes.

Dans la religion, la contrainte est un crime.

La Grange.

"Une noble fierté n’admet point de contrainte : crainte.

Tel qu’il est, un grand cœur doit se montrer sans

Corneille.

C’est une étrange chose, à vous parler sans feinte, Qu’une femme qui n’est sage que par contrainte.

Molière.

Il Gêne imposée par la bienséance ou par quelque autre motif qui ne force cependant pas les actes et la volonté : La prudence et la

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discrétion tiennent toujours en contraints l’amour de la vérité. (Boss.) L’homme cherche ' la société, mais il fuit la contrainte et la monotonie. (Proudh.)

L’amour fuit la contrainte

De tous ces noms que suit le respect et la crainte.

Racine.

À mon silence, à mon air de contrainte. Irène apprit mon penchant et ma feinte.

Malfilatrg.

Voyez-vous, les cheveux aux vents abandonnés, Sans contrainte, sans art, sans parure étrangère. Marcher, courir, bondir la folâtre bergère ?

Dëi.ille.

— Pig. Gêne imposée par les règles de l’art ou de la composition littéraire : La contrainte de la rime, de la mesure.

— Jurispr. Acte qui a pour but de forcer quelqu’un à faire ou à donner une chose : Contrainte par saisie de biens, il Contrainte par corps, Voie d’exécution qui consiste à priver de la liberté la personne du débiteur, pour le contraindre à remplir ses engagements : Exercer la contrainte par corps. Les besoins du. commerce ne réclament pas l’exécution de la contrainte tar coRrs. (J. Laftitte.) La contrainte par corps est la plus extrême rigueur du droit civil, de même que la peine de mort est le dernier degré de la se''vérité pénale. (Troplong.)

— Fin. Mandement exécutoire décerné contre un débiteur du fisc : Un porteur de contraintes. Contraintes, garnisaires, recors, ventes forcées, tout est mis enjeu par les agents du /îsc. (J.-lï. Say.)

— Encycl. Philosophie du droit. Aux termes comme dans l’esprit de ta loi, la contrainte par corps n’a jamais été considérée comme une peine, niais comme un simple moyen cooicitif accordé dans certains cas il un créancier pour forcer un débiteur à remplir ses engagements. Il n’est pas de question qui, depuis un siècle surtout, ait soulevé plus de débats au sein des assemblées législatives et des conseils d’État. C’est qu’elle touche tout à la fois au droit public, au droit privé, n l’économie sociale, k la morale et il l’humanité. Elle n’a jamais été soulevée sans rencontrer d’éloquents adversaires et des partisans opiniâtres. Avant de dire quelle solution pratique elle a reçue en dernier lieu par la loi de 1867, nous devons l’envisager d’un point de vue plus élevé. Le droit ne serait plus le droit s’il devait se plier à des exigences économiques d’un ordre inférieur, et les minces avantages qu’on peut retirer de telles ou telles mesures législatives ne sauraient compenser à nos yeux la violation du droit.

Parmi les arguments émis en faveur du principe de la contrainte par corps, il en est un dont nous devons nous emparer tout d’abord pour le retourner contre ceux qui l’invoquent. C’est, dit-on, un principe, une coutume, si l’on veut, respectable par son ancienneté même, car elle remonte à l’origine des sociétés politiques. Or c’est précisément parce que cette coutume est vieille comme le monde, que nous la repoussons de toute notre énergie. Nous en connaissons bien d’autres qui, pour être aussi anciennes, n’en sont pas plus res Eectablés. L’esclavage, le servage, le talion, t toiture, les supplices, les dogmes et les superstitions religieuses remontent tout uussi haut dans les annales des peuples, mais ce n’est pas une raison pour perpétuer dans les institutions modernes la barbarie des temps primitifs.

L’homme est sacré à. l’homme ; et dans l’homme co qu’il y a de plus sacré, c’est sa liberté. Infusé dans la conscience moderne par l’esprit chrétien, disent les uns, par l’esprit philosophique, disent les autres, ce principe ne fut point connu de l’antiquité. Ce n’est pas que nos vieux ancêtres fussent dépourvus de toute, notion de justice. Ils reconnaissaient, ils exagéraient même la sainteté des contrats privés. Dans les vieilles religions de l’Inde, il y avait un enfer spécial pour ceux qui mouraient sans avoir acquitté leurs dettes, et, plus tard, la métempsycose condamna l’âme des insolvables à. passer dans le corps d’un animal immonde. Si telles étaient les peines réservées dans la vie future au débiteur malheureux, on doit supposer qu’il ne devait pas être épargné dans la vie présente. La loi livrait tout simplement le débiteur à la merci du créancier, et les dettes privées furent, aussi liien que les guerres et les conquêtes, une des causes de l’esclavage. Les siècles ont adouci par degrés les rigueurs de cette coutume ; mais, comme nous le verrons tout a l’heure, la contrainte par corps repose toujours sur le même principe, puisque le débiteur est livré comme autrefois par la puissance publique % la discrétion de son créancier.

En Égypte, sous les douze premières dynasties, 1 esclavage était, comme en Asie, la sanction des obligations et le dernier mot de la contrainte par corps. Mais, avec le temps, les prisonniers devinrent si nombreux que la société fut menacée d’un bouleversement général. Nous verrons plus tard, à Rome, les mêmes causes produire les mêmes effets. Par une heureuse coïncidence, l’intérêt des castes sacerdotales se trouva cette fois d’accord avec l’intérêt public. Les prêtres, qui n’avaient ni créances à recouvrer ni débiteurs k incarcérer puisqu’ils ne se livraient pas au commerce, prirent en main la cause du pauvre. Sur leurs conseils, Sésostris fit remise de la moitié des dettes et délivra tous les prisonniers. Mais le