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grand jour, l’influence des confesseurs alla s’amoindrissant. Cette charge, occupée alors par le P. Pérusseau, devint presque une sinécure, et le roi n’avait recours à son confesseur que dans ses maladies ou ses rares accès de dévotion. Lorsqu’il tomba malade à Metz, on voulut renvoyer la duchesse de Châteauroux ; il se passa alors dans la chambre du roi une comédie qui mérite d’être rapportée, et qui montre combien la religion s’était avilie en se faisant la servante des grands. Voici comment la rapporte le maréchal de Richelieu, qui y joua un si grand rôle et qui était lié d’intérêt avec la duchesse de Châteauroux. « … Ils imaginèrent de traiter avec le confesseur du roi, le P. Pérusseau, jésuite. Ils le firent venir dans un petit cabinet, à côté du lit du roi, et la duchesse de Châteauroux lui demanda si elle serait obligée de partir, en cas que le roi désirât la confession et les autres sacrements ; mais le jésuite, embarrassé, manifestait ses inquiétudes en balbutiant, et ne lui donnait que des réponses inintelligibles. « Parlez donc, Père Pérusseau, lui disait avec impatience Mme de Châteauoux, et déterminez-vous. Ne permettez pas que je sois renvoyée scandaleusement ; la réputation du roi sera moins compromise si je pars secrètement. Si je sors, au contraire, forcément, cette manière, en outrageant le roi, me déshonorera. » Pérusseau, qui était fin et adroit, se souciait peu intérieurement d’outrager Mme de Châteauroux, s’il pouvait conserver une place précieuse et chère à sa compagnie. En parlant, il ne voulait pas dire ce qu’il voulait faire, et, en ne parlant pas, il impatientait le duc de Richelieu et la favorite, peu endurants de leur naturel. Obligé de leur répondre, Pérusseau répétait sans cesse, dans son embarras : « Mais madame, le roi ne sera peut-être pas confessé. — Il le sera, répondait la duchesse, car le roi a de la religion, j’en ai aussi, et je serai la première à l’exhorter à se confesser pour le bon exemple. Je ne voudrais pas m’exposer à prendre sur moi qu’il ne le fût pas, mais il s’agit d’éviter un scandale : serai-je renvoyée ? dites-le moi. » Pérusseau, aussi embarrassé que la duchesse, répondait encore en balbutiant qu’il n’était pas permis d’arranger d’avance la confession d’un malade ; qu’il ne connaissait pas la vie du roi ; que la conduite du confesseur dépendait de l’aveu du pénitent, et que, n’ayant personnellement aucune mauvaise opinion des rapports intimes du roi avec madame la duchesse, le résultat dépendait des aveux du roi. « S’il ne faut que des aveux, répliqua la dame, je vous confesse, Père Pérusseau, que j’ai péché avec le roi tant que nous l’avons voulu, et avec habitude. Est-ce le cas de me faire renvoyer par le roi Louis XV ? N’y a-t-il pas quelque exception pour un roi ? » L’idée du roi en danger jetait Pérusseau dans un plus grand embarras. Il avait été secrètement résolu, dans le parti des princes, de faire renvoyer la duchesse, si le roi se confessait ; mais, si le roi guérissait sans confession, Pérusseau ne voulait pas s’exposer au ressentiment de la maîtresse, ni être renvoyé lui-même après la convalescence, si le roi la reprenait. Dans cette perplexité, il voulait s’évader et gagner la porte du petit cabinet ; mais le duc de Richelieu, qui en occupait l’entrée et qui tenait la porte entr’ouverte, s’y opposa, et lui répliqua vivement, poussé à bout par ses expressions entortillées : « Ah ! Père Pérusseau, soyez donc galant envers les femmes ; accordez à présent même à Mme la duchesse de Châteauroux la faveur de quitter la cour sans scandale. Vos car, vos peut-être et vos si nous désolent. » Le jésuite, patient et résolu à tout souffrir, persistait à garder un profond silence, et Richelieu, voyant cette résistance soutenue, saute sur le P. Pérusseau, et, l’embrassant avec ses grâces et toute l’expression de sa galanterie ordinaire, le presse étroitement, et dit au jésuite avec le ton de la plaisanterie : « Je vois bien, mon révérend Père, que vous êtes peu sensible à la beauté des femmes » et le serrant encore plus étroitement, il ajoute : « Faites donc pour moi, qui ai toujours aimé les jésuites, ce que les Pères de l’Église les plus galants ont permis aux confesseurs en semblable circonstance. » Pérusseau, encore plus inflexible, persistait dans son mystérieux silence, ne voulant pas être un jour poursuivi par le duc et par la duchesse si le roi guérissait sans confession, ni avouer d’avance ce qu’il avait résolu de faire, et ce qu’il était possible qu’il ne fît pas en cas de guérison. Mme de Châteauroux était dans la désolation, tous les moments lui étaient précieux, et il ne lui restait plus que l’usage de ses attraits et de ses grâces pour gagner Pérusseau. Elle prit donc de ses douces mains le menton du jésuite, et lui dit les larmes aux yeux et avec sensibilité : « Je vous jure, Père Pérusseau, que si vous voulez éviter un éclat, je me retirerai de la chambre du roi pendant sa maladie. Je ne reviendrai plus à la cour que comme son amie, et jamais comme maîtresse ; je me convertirai et vous me confesserez. » Pérusseau, encore plus inflexible, continua à les laisser tous deux dans l’incertitude sur ce qu’il avait à faire s’il confessait le roi. »

Malgré cette conduite prudente et réservée, c’est ici une les dernières intrigues où paraissent les confesseurs de nos rois, et sous Mme de Pompadour la destruction de l’ordre des jésuites mit fin pour jamais à leurs manœuvres souterraines. Depuis cette époque, le confessionnal fut donné à un pauvre curé de campagne qui était comme aveugle, sourd et muet, et restait complètement étranger à la cour.

Parmi les autres confesseurs influents de cette époque, il faut citer celui de Marie Leczinska, qui lui donna de si funestes conseils, et qui, en lui persuadant de tenir la dragée haute à Louis XV, fut la cause première des honteuses débauches dans lesquelles ce prince se plongea. L’abbé Polet, confesseur du cardinal Fleury, exerça longtemps une grande influence ; il n’en usa que pour obtenir des lettres de cachet contre les jansénistes. Enfin le confesseur de la duchesse de Berry, fille du régent, mérite aussi une mention spéciale : celle-ci le faisait assister à toutes ses orgies, pour n’avoir pas ensuite la peine de s’en confesser.

L’Espagne, le pays catholique par excellence, vit aussi le règne des confesseurs du roi. Les plus célèbres sont le P. Nithard et le P. d’Aubenton, Le premier abusa tellement de son influence sur la reine, que l’indignation publique le força de quitter l’Espagne et de se retirer à Rome. Le P. d’Aubenton fut envoyé par Louis XIV pour servir de confesseur à Philippe V, et ce ne fut pas sans peine qu’il put être mis en possession de cette place qui, jusqu’à ce jour, avait été le privilège exclusif des dominicains. Renvoyé par le crédit de la princesse des Ursins, il fut rappelé après la chute de cette intrigante, et confessa le roi jusqu’à sa mort. Son influence, comme celle de tous les jésuites, fut fatale à l’Espagne et à la France, et tous ses efforts ne tendirent qu’à assurer les intérêts de sa compagnie. Louville, ambassadeur de Louis XIV à Madrid, raconte une conversation qu’il eut avec d’Aubenton, et qui montre une fois de plus par quelle curiosité indiscrète et déplacée la plupart des prêtres discréditent le confessionnal : « Encore un trait de fausseté niaise de d’Aubenton. Il me vint trouver l’autre jour, et me dit qu’il trouvait le roi triste, et qu’il attribuait en grande partie ses vapeurs à l’excès de sa passion pour la reine. Il me pria bonnement ensuite de lui apprendre à distinguer l’usage de l’abus sur cet article, attendu que, n’ayant pas été mari, nécessairement il était fort inhabile à donner des conseils en cette matière. « Mon père, lui répondis-je, comme je n’ai pas été plus mari que vous, je ne dois pas en savoir davantage, et vous vous adressez mal. Cependant, j’ai ouï dire aux médecins, ce que je ne garantis pas, que ces sortes de choses ne comportent pas de règles fixes. La constitution des personnes, l’âge, le climat et la saison peuvent influer sur ce qui est utile ou nuisible en ce genre ; et c’est au bon sens de la personne, aidé de sa modération naturelle, à peser le pour et le contre, ou, si vous l’aimez mieux, le plus ou le moins. Par exemple, j’ai entendu fort mal parler de la canicule à ce propos. — Mais, reprit le confesseur, vous connaissez le prince et le climat d’Espagne, expliquez-vous positivement par des nombres. — Ah ! mon Père, m’écriai-je, vous avez volé celle-là à Sanchez ; je vous conseille de retourner à ce savant homme, car il fait assez souvent les demandes et les réponses. — Bon, dit-il, voilà qui est de la plaisanterie. Parlons sérieusement : estimeriez-vous qu’un tête-à-tête tous les deux jours fût une mesure sage ? — Vraiment, répliquai-je, votre proposition est des plus raisonnables, et les gens seraient de bien méchante humeur qui ne s’en accommoderaient pas. — Donc, si le Roi Catholique se renfermait dans son intérieur deux fois chaque jour, il y aurait abus ? — Oui, mon père, et encore plus s’il s’y renfermait trois. — Eh bien, c’est que justement le roi se trouve dans ce cas-ci. — Eh bien, mon père, Dieu lui soit en aide ! Au surplus, ajoutai-je, il serait malheureux que le roi se fatiguât pour une aussi mauvaise besogne, car on assure que nous n’avons point encore de reine d’Espagne. » Là-dessus, notre homme me conta que la nature, qui n’avait rien refusé aux deux époux, tant s’en faut, ne les avait point créés l’un pour l’autre ; et, pour aider mon intelligence, il se servit, en parlant de la reine, du mot areta, qui est du latin de casuiste espagnol. Vous voyez que le bon Père aime les détails de ménage. »

Les rois d’Espagne ont eu bien d’autres confesseurs ambitieux et complaisants. Un des descendants de Philippe V n’allait chez sa maîtresse, qui était religieuse, qu’accompagné de son médecin et de son confesseur, qui l’attendaient à la porte, et qui, à sa sortie, soignaient également et son corps et son âme.

En Espagne, le dernier confesseur officiel a été le P. Claret, dont les suggestions n’ont pas peu contribué à la chute d’Isabelle II. Ce prêtre est un ancien militaire, qui a jeté la casaque aux orties dans la circonstance suivante. En 1824, il faisait partie de la bande de Cabrera, qui était serrée de très-près par les christinos. Un jour, la petite troupe, cernée de tous côtés, se croyait complètement perdue ; Claret fit alors vœu d’embrasser le sacerdoce si la Providence le tirait de ce danger. Il parvint à s’échapper et tint parole. Quelque temps après son ordination, il fut nommé évêque de Cuba et aumônier de la reine, qu’il accompagna lorsqu’elle s’enfuit d’Espagne, au mois d’octobre 1868. C’étaient de semblables causes, c’est-à-dire la direction des jésuites, qui, en 1638, avaient amené la révolution qui chassa Jacques II du trône d’Angleterre ; mais, comme dit le poète :

L’exil jamais n’a corrigé les rois.

Parmi les confesseurs dont l’histoire a gardé les noms, il faut citer ce prêtre de Versailles, nommé Lécuyer, qui osa refuser l’absolution à Mme de Montespan, ce qui fit beaucoup de bruit à la cour ; le roi ne se calma que lorsque Bossuet lui eut remontré que ce prêtre avait agi selon sa conscience. Il y eut aussi le confesseur de Boileau, dont le satirique parlait en ces termes : « Un bon prêtre, à qui je me confessais, me demanda quelle était ma profession : — Poëte. — Vilain métier ! Et dans quel genre ? — Satirique. — Encore pis ; et contre qui ? — Contre les faiseurs d’opéras et de romans. — Achevez votre confiteor. »

Parlons aussi du confesseur du fabuliste. Le confesseur de La Fontaine, voyant son pénitent attaqué d’une maladie dangereuse, l’exhortait à réparer le scandale de sa vie par des aumônes : « Je n’en puis faire, répondit le poëte, je n’ai rien ; mais on prépare une édition de mes Contes, et le libraire doit me remettre cent exemplaires ; je vous les donne ; vous les ferez vendre pour les pauvres. » Le confesseur, aussi simple que le pénitent, alla consulter un de ses confrères pour savoir s’il devait accepter cette singulière aumône.

Terminons par une anecdote moderne, qui ne manque point de piquant. Une coquette sur le retour voulut mettre sa conscience en règle ; elle se présenta chez un bon curé de campagne. « Voyons, ma fille, lui dit le prêtre, commencez. — Je n’ai point volé, je n’ai point prêté à usure, je n’ai point médit de mon prochain… — Mais alors ? — Hélas ! j’ai eu quelques faiblesses. — Ah ! et sont-elles nombreuses ? — Mon Dieu ! on ne tient pas un compte par doit et avoir de ces fantaisies-là. — Eh bien ! ma fille, tâchez de vous rappeler par à peu près, et, pour chaque faiblesse, mettez un cierge brûler devant l’autel des âmes en peine. » Le lendemain, le bon curé sortait de son presbytère, lorsqu’il rencontre sa pénitente, portant une caisse de cierges sur sa tête et une autre sous son bras. « Oh ! fit-il. — Il n’y a pas de oh ! il n’y a pas de ah ! monsieur le curé ; j’en ai encore trois caisses à la maison. »


CONFESSION s. f. (kon-fè-si-on — lat. canfessio ; de confiteri, confessum, avouer). Aveu : La confession généreuse et libre énerve le reproche et désarme l’injure. (Montaigne.) || Aveu de ses fautes : Pour moi, je veux faire ici ma confession sans détour. (J.-J. Rouss.). Paruta fait devant ses lecteurs une confession publique, acte de componction déclamatoire. (E. Quinet.)

— Se dit particulièrement de l’aveu des péchés fait avec l’intention d’en obtenir l’absolution : Le tribunal de la confession. La confession autorise le crime, par l’assurance d’être absous. (St-Evrem.) Il y a, dans toutes les confessions, un péché qu’on ne dit pas. (Volt.) La confession est une chose excellente, un frein aux crimes invétérés- (Volt.). Il n’y a peut-être point d’établissement plus sage que la confession ; la plupart des hommes, quand ils sont tombés dans de grands crimes, ont naturellement des remords. Les législateurs, qui établirent des mystères et des expiations, voulurent empêcher les coupables de se livrer au désespoir et de retomber dans leurs crimes. (Volt.) La confession est très-bonne pour engager les cœurs ulcérés de haine à pardonner, et pour faire rendre aux voleurs ce qu’ils peuvent avoir dérobé au prochain. (J.-J. Rouss.) Que de restitutions, de réparations, la confession ne fait-elle pas faire chez les catholiques ! (J.-J. Rouss.) La confession seule demande le célibat. (J. de Maistre.) L’humble confession est l’antidote suprême de l’orgueil. (Gerbet.) Quand le prêtre et le pénitent sont sincères, la confession peut être encore secourable, (G. Sand.) La confession n’a plus qu’une utilité sociale fort restreinte. (G. Sand.) La confession est la pensée de Dieu. (Ventura.) Je ne crois à la sincérité d’aucune confession faite aux hommes. (Mme C. Bodin.) La confession est une double humiliation. (P. Félix.) || Action d’entendre les aveux d’un pénitent, en parlant du prêtre : Faire la confession, d’un criminel. Les pénitentes étaient nombreuses, la confession lui a pris toute la soirée.

Confession générale, Celle qui s’étend aux péchés de la vie entière : La confession générale brise le lien si étroit qui unit les pasteurs aux troupeaux. (Gerbet.) || Confession auriculaire ou privée, Celle qui est faite en secret à un prêtre. || Confession publique, Celle qu’on faisait autrefois devant le peuple assemblé.

Sceau ou secret de la confession, Obligation pour le prêtre de ne rien faire connaître de ce qu’il a appris par la confession. || Fam. Sous le sceau de la confession, Sous le secret le plus rigoureux : Je vous dis ceci sous le sceau de la confession.

Billet de confession, Certificat de confession qu’on exige particulièrement de ceux qui veulent contracter un mariage religieux, dans l’Église catholique. || Autrefois, Certificat d’adhésion à la bulle Unigenitus, qu’on exigeait des moribonds avant de leur administrer les derniers sacrements.

— Loc. prov. On lui donnerait le bon Dieu sans confession, Son extérieur inspire toute confiance, au point qu’on croirait qu’il n’aurait pas besoin de se confesser avant de communier. Ne se dit guère qu’en mauvaise part, d’une personne hypocrite.

— Théol. Affirmation publique de sa foi : Le spectateur céleste de notre confession nous rendra nos corps plus glorieux et plus éclatants. (Mass.) || Formule catholique d’aveu des péchés, aussi appelée Confiteor, parce qu’elle commence par ce mot. || Confession de foi ou simplement Confession, Tableau résumé des articles qui contiennent la déclaration de la foi d’un individu ou d’une Église : Peu de gens sont disposés à signer une confession de foi en blanc. (Pasc.)

— Hist. relig. Confession d’Augsbourg, Confession de foi protestante présentée à Augsbourg à l’empereur Charles-Quint.

— Liturg. Lieu où l’on garde les reliques des saints : La confession de Saint-Pierre à Rome.

— Jurispr. Diviser la confession, Prendre et laisser dans les aveux d’un accusé : Il ne faut pas diviser la confession.

— Rhét. Figure qui consiste dans un aveu fait à son adversaire. Ex. : L’accusé avait tort, j’en conviens ; mais la faute est-elle condamnée par la loi ?

— Plur. Ouvrage contenant des aveux sur la vie de l’auteur : Les Confessions de saint Augustin, de J.-J. Rousseau. On a dit beaucoup de mal de Rousseau et de ses confessions, tout en les goûtant. (Ste-Beuve.)

Syn. Confession, aveu. V. AVEU.

Antonymes. Dénégation, déni, dissimulation, négation, protestation.

Encycl. Confession auriculaire dans l’antiquité et chez différents peuples. La confession auriculaire paraît avoir été pratiquée par un grand nombre de religions différentes et remonter à une haute antiquité. Nous emprunterons à l’abbé Guillois quelques observations très-curieuses sur ce sujet. « On se confessait, dit-il, dans les mystères de Bacchus, de Vénus et d’Adonis. Les prêtres qui entendaient les confessions portaient une clef pendue aux épaules ; c’était le symbole du secret qu’ils devaient garder. À Samothrace, des sacrifices expiatoires, une confession en règle, précédaient l’admission de l’initié aux mystères cabiriques. Le prêtre qui y présidait se nommait kœès (purificateur, prophète) ; il avait le pouvoir d’absoudre du meurtre ; mais le parjure était considéré comme un crime capital. À Éleusis, ce n’était qu’après avoir subi de longues et difficiles épreuves qu’on pouvait être initié aux mystères de Cérès. Un prêtre était chargé d’examiner et de préparer les candidats ; ceux qui s’étaient rendus coupables de grands crimes étaient exclus ; le prêtre soumettait les autres à des expiations fréquentes, et leur faisait sentir la nécessité de préférer la lumière de la vérité aux ténèbres de l’erreur ; il les exhortait à réprimer toute passion violente, à mériter par la pureté de l’esprit et du cœur l’ineffable bienfait de l’initiation. » À ce sujet, Plutarque raconte l’anecdote suivante : « Lysandre étant sommé par un prêtre de se confesser, lui demanda : « Est-ce à Dieu ou à l’homme que je dois me confesser ? — À Dieu, répondit l’hiérophante. — Alors, retire-toi donc, ô homme ! » s’écria le général lacédémonien. » Les empereurs eux-mêmes n’étaient pas exempts de ces épreuves et de cette confession. L’histoire nous rapporte que Marc-Aurèle, en s’associant aux mystères de Cérès Eleusine, fut obligé de se confesser à l’hiérophante. Chez la plupart des peuples de la Grèce et de l’Asie, les personnes agitées par des remords de leur conscience trouvaient moyen de se délivrer d’un si terrible poids, en se soumettant à l’examen d’un prêtre particulier appelé l’auditeur. C’était à lui qu’il fallait s’adresser pour faire l’aveu de ces mêmes crimes. On ne pouvait être lavé que par le serment d’être vertueux et de mener une vie nouvelle. « Cela est si vrai, dit Voltaire, que l’hiérophante, dans tous les mystères de la Grèce, en congédiant l’assemblée, prononçait deux mots égyptiens qui signifiaient : Veillez et soyez purs. » Il y avait dans l’Élide des devins qui dirigeaient les consciences, et que l’on consultait pour savoir si certaines actions étaient conformes ou non à la justice divine. Chez les Chinois, lorsque l’empereur, à la tête de la nation, remplit l’office de sacrificateur, il pratique un grand nombre de cérémonies, parmi lesquelles se trouve la confession : il s’avance d’abord vers l’autel, fait diverses protestations, brûle des parfums, et prend ensuite le yu-pé, pièce de satin sur laquelle il a écrit le détail de ses actions, bonnes ou mauvaises ; il lit cet écrit à voix basse, fait des actes de repentir sur ce qu’il reconnaît avoir été mal, se propose de mieux faire à l’avenir, dépose le yu-pé dans une cassette, et y met le feu pour le consumer et le réduire en cendres.

Dans le Thibet, non-seulement tous les religieux, mais presque tous les laïques, ont leur père spirituel, à qui ils font en général l’accusation de leurs péchés. Aussitôt que le pénitent a prononcé cette formule : J’ai péché, le directeur fait sur lui une prière pour lui obtenir le pardon qu’il demande. Quatre fois par mois, le 14 et le 15, et ensuite le 29 et le 30 de la lune, les lamas, religieux thibétains, s’assemblent pour entendre l’explication de leur règle. Avant de paraître dans l’assemblée, le grand lama se confesse à celui à qui il a confié la direction de sa conscience ; purifié lui-même de cette manière, il entre dans le temple et commence à recommander à chacun de se confesser. Cet avertissement répété