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le pays de Davos se joignit à une vallée voisine, le Prettigau, et jeta les fondements de la ligue des dix juridictions, qui, s’alliant plus tard avec la ligue Grise et celle de la Maison-Dieu, a formé la république fédérative des Grisons.

DAVOT (Gabriel), jurisconsulte français, né à Auxonne en 1677, mort en 1743. Il fut successivement avocat, substitut du procureur général et professeur de droit à Dijon. Davot a laissé des ouvrages qui attestent une vaste érudition et qui ont été publiés après sa mort ; ce sont des Traités sur diverses matières de droit français (Dijon, 1751 et suiv., 7 vol. in-8o), et les Coutumes du duché de Bourgogne (1776).


DAVOUT et non DAVOUST (Louis-Nicolas), duc d’AUERSTÆDT, prince d’ECKMÜHL, général français, né à Annoux (Yonne) le 10 mai 1770, mort à Paris le 13 juin 1823. On commet généralement en écrivant ce nom, une erreur orthographique qui semble remonter à la campagne d’Égypte. Un général de cavalerie, mort pendant cette expédition, s’appelait Davoust ; mais il n’avait avec le maréchal aucun lien de parenté. Issu d’une famille noble, mais pauvre, Davout entra, en 1785, à l’École militaire de Paris (et non à Brienne, comme l’ont écrit la plupart des biographes, qui le font, à tort, condisciple de Bonaparte), et en sortit, en 1788, avec le grade de sous-lieutenant au régiment de Champagne (cavalerie). Là, au lieu de mener la vie brillante et dissipée des officiers de son régiment, il consacrait à l’étude les loisirs que lui laissait le service. Aussi son oncle, major dans le même corps, disait-il de lui : « Mon neveu Davout ne fera jamais rien ; il ne sera jamais un militaire. Au lieu de travailler sa théorie, il s’occupe de Montaigne, de Rousseau et d’autres farceurs. »

1789 éclate ; Davout, alors en garnison à Hesdin, embrasse avec ardeur les principes rénovateurs et a l’occasion de professer ouvertement sa foi à la liberté. Le régiment dont il faisait partie offrait un banquet à un régiment de passage à Hesdin. Vers la fin du repas, un officier de noblesse se leva et porta ce toast : « Je propose une santé que nous avons tous dans le cœur, bien que, dans ces temps de liberté, on ne nous permette pas de la porter ; et je me flatte qu’il n’y a pas parmi nous de j... f..... qui en propose une autre : à la santé du roi ! » Davout, sur lequel tous les regards s’étaient portés, se leva à son tour et répliqua froidement : « C’est moi, messieurs, qui suis le j... f..... dont monsieur a voulu parler. À la santé de la nation ! »

Davout quitta le régiment : une révolte avait éclaté parmi les soldats, et il avait été considéré comme le fauteur de cette rébellion ; il fut prouvé plus tard, par une enquête, que tout le monde avait eu tort dans cette affaire, excepté Davout ; mais il n’en avait pas moins été mis en disponibilité, et il revint dans l’Yonne organiser les bataillons de volontaires : le troisième bataillon l’élut lieutenant-colonel. Il servit dans l’armée du Nord, successivement sous les ordres de Lafayette, de Kilmaine, de Custine et de Dumouriez, qu’il poursuivit inutilement avec son bataillon lors de la trahison de ce général. Exclu de l’armée en 1793, à cause de son origine noble, il fut réintégré dans les cadres en 1794, et nommé général de brigade pendant le siège de Luxembourg. Il passa alors à l’armée du Rhin sous Pichegru, et fut fait prisonnier à Manheim. Mis en liberté sur parole, il se retira quelque temps dans sa famille, et, pendant son inaction forcée, étudia très-sérieusement l’art militaire. Au bout de quelques mois il rejoignit l’armée du Rhin, commandée par Marceau, prit ensuite part à l’expédition d’Égypte où il se signala par son infatigable courage, et fut le seul général qui refusa de signer, après le départ de Bonaparte, la capitulation du Caire. Quand, malgré ses énergiques protestations, ses collègues eurent apposé leur nom au bas de ce honteux traité, il reprit aussitôt, avec Desaix, le chemin de la France. En 1800, il obtint, à l’armée d’Italie, le grade de général de division ; en 1801, il fut rappelé à Paris par Bonaparte, qui lui fit épouser la sœur du général Leclerc, et lui confia, avec la direction du camp de Bruges, le commandement du troisième corps de l’armée d’Angleterre. Nommé maréchal en 1804, Davout fit ses débuts, comme administrateur et homme politique, dans la présidence des élections de l’Yonne. L’année suivante, il ouvrait la campagne du Rhin à la tête de son corps qui formait l’aile gauche de la grande armée, et enlevait aux Prussiens, en quelques jours, cent quatre-vingt-onze pièces de canon. Aussi reçut-il, en récompense de sa merveilleuse activité, le grand cordon de la Légion d’honneur et le titre de général des grenadiers à pied de la garde. Après la paix de Presbourg, il alla présider les élections de la Côte-d’Or ; puis il prit part à la campagne de 1806 contre la Prusse et gagna la sanglante bataille d’Auerstædt. Profitant de la proximité de la Pologne, il encourage, parmi les libéraux de cette nation, un mouvement indépendant que fait avorter un soulèvement de la Prusse ; contraint alors d’abandonner le peuple qu’il espérait ressusciter, il court se couvrir de gloire à Eylau, à Friedland et à Tilsitt. De juillet 1807 à la fin de 1808, il fut investi du gouvernement de la ville et du duché de Varsovie. C’est alors que des jaloux l’accusèrent d’aspirer à reconstituer à son profit la royauté polonaise. Mécontent de l’élévation de Bernadotte, blessé de la tentative faite, sans autorisation, par Soult, pour se faire adjuger la couronne de Portugal, Napoléon crut aussi à l’ambition de Davout et lui témoigna une injuste défiance. Il ne devait pourtant pas oublier que, dans toute sa correspondance, Davout n’avait cessé de lui présenter le prince Poniatowski comme le seul candidat possible au trône de Pologne, et il eût dû garder toujours présentes à l’esprit les fières paroles de la maréchale Davout qu’il interrogeait sur les velléités royales de son mari : « Hé bien ! maréchale, est-ce que vous n’avez point désiré être reine de Pologne ? » Mme Davout répondit : « Je ne désire que ce que désire le maréchal ; et il tient trop à rester Français pour être roi de quelque pays que ce soit. » Froissé par ces injustes soupçons, Davout remit au roi de Saxe le gouvernement de Varsovie et vint reprendre son service dans la guerre déclarée à l’Autriche. À Eckmühl, il lutte seul pendant trois jours, avec deux divisions, contre l’armée autrichienne entière qu’il force à la retraite. La paix signée à Vienne en octobre 1809, Davout est chargé de la garde de Hambourg et du blocus des côtes du Nord ; en outre, Napoléon lui donne cette écrasante mission, la réorganisation de la grande année pour la campagne de Russie. Non-seulement Davout doit dresser six cent mille soldats ; il lui faut encore rassembler le matériel, l’équipement et les transports nécessaires pour cette masse de combattants. En 1812 s’ouvre cette désastreuse expédition : le maréchal, qui en avait prévu l’échec et les suites fatales, ne put que conjurer par sa valeur, sa fermeté, son dévouement, les malheurs qui fondirent sur nos soldats. Dans la retraite, on le vit se multiplier, payer à toute minute de sa personne. Et pourtant il se vit enlever son commandement, qui fut transféré à Ney. Il alla alors s’enfermer dans Hambourg qu’il défendit contre les Russes, et qu’il ne leur remit qu’en 1814, sur un ordre authentique et exprès de Louis XVIII. De retour en France, il fut très-mal accueilli par le roi, qui lui signifia l’ordre de se retirer immédiatement dans sa terre de Savigny ; les pamphlets royalistes déchirèrent alors à l’envi le défenseur de Hambourg. Le maréchal laissait, impassible, se produire toutes ces infamies ; toutefois, sur les supplications de sa famille, il publia un mémoire justificatif très-digne, et surtout très-concluant, qui fit taire la calomnie.

Aux Cent-Jours, Napoléon chargea Davout de lui organiser une armée et de préparer la défense nationale. Davout émit à ce moment des conseils dont la franchise déplut au souverain. Le prince d’Eckm£uhl croyait toujours à la vitalité de la nation, mais il n’avait plus confiance dans l’Empire ; il parla à cœur ouvert ; aussi, malgré ses instances réitérées, Davout ne put-il obtenir le commandement de l’aile droite. L’impérieux Bonaparte lui préféra Grouchy. On sait ce qu’il advint de cette préférence.

Waterloo brisa l’ambition du maître. Davout essaya de remonter l’esprit de Napoléon. Rien, suivant lui, n’était désespéré ; on pouvait tout attendre en s’adressant au cœur de la France. Mais l’Empereur était démoralisé, et il entendait l’exécration publique monter peu à peu autour de son nom. Le maréchal exposa nettement la situation, donna son avis, et pour soustraire Napoléon aux mille influences contradictoires qui faisaient, à chaque instant, dévier sa résolution, il l’engagea à s’enfermer à la Malmaison.

C’est cet épisode de la vie de Davout que les malveillants et les envieux ont tourné contre lui pour incriminer sa mémoire. On l’a accusé d’avoir manqué de respect à une majesté tombée. Une seule circonstance a suffi pour anéantir cette imputation et pour donner un éclatant démenti au récit apocryphe de Fleury de Chaboulon qui, seul de tous les historiens ou écrivains de mémoires, a raconté la mensongère altercation reprochée à Davout.

À la bibliothèque de Sens se trouve un exemplaire des Mémoires de Fleury de Chaboulon annoté de la main même de Napoléon, à Sainte-Hélène, et donné à la ville de Sens par Saint-Denis, ancien valet de chambre de l’Empereur. Nous reproduisons trois notes extraites de cet ouvrage.

« On doit regarder comme d’invention pure les discours et les propos que l’on prête à l’empereur Napoléon. L’auteur le fait parler et penser selon ses propres opinions et selon les dires des gens du premier salon de service. »

« L’auteur se reprochera toute sa vie cet ouvrage, où il compromet tant de pères de famille et calomnie tant de grands et illustres citoyens. »

Enfin, en marge du récit des prétendues. invectives adressées par Davout à l’empereur, celui-ci a écrit ces mots significatifs : « Quelle injustice que ce portrait ! »

Après le départ de Napoléon pour la Malmaison, commencèrent les indécisions, les négociations, les entrevues. Davout était toujours attaché à l’empereur, tout en considérant l’Empire comme fini. L’ennemi cernait Paris : le prince d’Eckmuhl proposa la résistance, si le gouvernement provisoire autorisait la lutte. Carnot démontra l’impossibilité du succès et Davout dut s’incliner devant l’opinion générale. Mais les insolences des alliés croissant en raison de l’accumulation de leurs troupes, le maréchal voulut leur prouver que la France n’était pas encore écrasée. Il sort avec une poignée d’hommes et va exterminer, entre Verrières et Versailles, plusieurs régiments prussiens ; puis il attend le signal de la bataille. On lui envoie l’ordre de traiter. Il examine alors froidement la position : la lutte longue et périlleuse, la cause impériale perdue, les Bourbons acclamés, la trahison au dedans et au dehors. Il voit la France pillée, Paris bombardé, trente millions d’hommes en péril pour conserver une couronne. Il impose silence à ses sympathies, à ses instincts guerriers, à ses sentiments patriotiques, et il signe la convention de Saint-Cloud du 3 juillet.

Alors, comme il était le plus en vue, comme de lui avait dépendu en quelque sorte le salut de l’Empire, tous les lâches qui avaient trahi rejetèrent sur lui leur infamie, l’accusèrent d’avoir reculé et de leur avoir donné l’exemple de la désertion. Tacite l’a dit : Hœc est pessima bellorum conditio : prospera omnes sibi vindicant ; adversa uni soli imputant.

Davout se démit aussitôt du portefeuille de la guerre et se retira, avec les débris de notre armée, derrière la Loire, emportant avec lui les trésors du musée d’artillerie, les dessins topographiques et les plans en relief des places fortes. Les souverains alliés exigèrent a remise de ces collections : Davout refusa et les garda.

Le 6 juillet, il négocia le ralliement de l’armée de la Loire au gouvernement des Bourbons, en sauvegardant les intérêts de ses compagnons d’armes, dont il se sépara le cœur brisé. Puis il vint à Paris, se vouer corps et âme à la défense de Ney et protester de toutes ses forces contre sa mise en accusation. Une ordonnance royale lui supprima son titre de maréchal avec tous ses traitements et l’exila à Louviers. Toutefois, en 1817, il fut réintégré dans ses titres, et, en 1819, il accepta une place à la Chambre des pairs, où il prêta au libéralisme l’appui de son nom et de sa haute raison.

Cependant la santé du maréchal, qui avait bravé victorieusement tant de périls, tant d’assauts physiques et moraux, reçut tout à coup une grave atteinte. La mort de sa fille lui porta un coup dont il ne se releva point.

Le croirait-on ? Les défiances de la Restauration ne cessèrent pas devant ce cercueil. Les invalides ayant exprimé le vœu d’assister au service funèbre, le gouverneur de l’hôtel reçut l’ordre de les consigner et de tenir les portes fermées pendant toute la durée de la cérémonie. Quelques-uns de ces vieux soldats ayant réussi à braver la consigne et à s’échapper par-dessus les murs pour escorter leur ancien chef à sa dernière demeure, le gouvernement résolut de les punir et de les chasser de leur refuge.

Il fallut que la maréchale Davout fît trêve à sa douleur, et allât, le lendemain de l’enterrement, solliciter elle-même le pardon des insoumis. On eut, au moins, la pudeur de ne pas lui refuser la grâce qu’elle demandait.


DAVOUT (Louis-Alexandre-Edme-François, baron), général français, né à Etivey en 1773, mort à Rovières en 1820, frère du précédent. Il fit les campagnes de la République et de l’Empire, se distingua à Saint-Jean d’Acre, aux batailles des Pyramides, d’Austerlitz, d’Iéna, de Wagram, reçut le titre de baron de l’Empire (1809), et prit sa retraite en 1813 avec le grade de général de brigade.

DAVRE (François), auteur dramatique français du xvne siècle, était curé de la Minière (Seine-et-Oise). Sous prétexte de donner un exemple de ce que doivent être les bonnes pièces de théâtre, il a produit deux tragédies : Dipré, infante d’Irlande (1GG8), et Geneviève ou l’Innocence reconnue (1670), qui ne valent pas mieux par le fond que par la forme.

DAVREUX (Charles-Joseph), chimiste belge, né à Liège en 1806. Il devint pharmacien en 1825, puis professa successivement la chimie et l’histoire naturelle à l’école industrielle et au collège de sa ville natale. Davreux prit part à la fondation de la Société des sciences naturelles de Liège. Il a publié : Leçons sur la minéralogie et la chimie (1828-1829), et Essai sur la constitution géognastique de la prooince de Liège (1833, in-4o).

DAVY (sir Humphry), chimiste anglais, créé baronnet par George IV en 1818, né à Penzame, bourg du comté de Cornouailles, le 17 décembre 1778, mort à Genève (Suisse) le 29 mai 1829. Il était l’aîné de cinq enfants. Son père, qui, après avoir exercé sans profit l’état de sculpteur sur bois et de doreur, s’était retiré dans une propriété qu’il possédait, mourut en 1794, laissant sa veuve dans une situation fort triste. Le jeune Humphry avait profité avec ardeur du peu de moyens qu’il avait trouvés de s’instruire. Livré a lui-même, il en profitait pour parcourir en poète les sites qui environnent sa ville natale et s’essayait à en décrire les beautés, lorsque la mort de son père vint l’arr.’tcher à ses plaisirs favoris. Sa mère, réduite ; i ouvrir une petite boutique de modes et à fonder une pension bourgeoise pour les étrangers, le plaça chez un pharmacien, en qualité d’aide apprenti. Heureusement son maître le chargeait de toutes les courses, et 7Javy trouvait souvent & satisfaire son désir d’apprendre. Un des fils du célèbre Watt étant venu passer quelque temps chez Mme Davy, Humphry chercha obstinément les moyens de se faire remarquer de lui, et, pour pouvoir lier connaissance, se mit à dévorer la

DAVY

chimie deLavoisier, qui lui révéla sa vocation. Soit fantaisie, soit intuition, il se prit à se persuader que la théorie de la combustion de notre illustre compatriote laissait beaucoup à désirer ; il fit part de son opinion à Watt et l’appuya d’expériences assez ingénieuses, de raisonnements assez subtils pour attirer l’attention de son interlocuteur. C’était le seul but qu’il se fût proposé, mais le goût des recherches scientifiques était né en lui, et il trouva une carrière brillante là où il n’avait cherché qu’une distraction passagère. Encouragé par Watt, il adressa au docteur Thomas Beddoes, pour le recueil scientifique qu’il publiait, un mémoire sur la chaleur et la lumière, où il essayait de ruiner la théorie de Lavoisier, et un autre sur la respiration des plantes marines et leur action sur l’eau dans laquelle elles vivent. Beddoes s’empressa de l’appeler près de lui dans son Institution pneumatique, établissement médical où il traitait les maladies du poumon. Le contrat d’apprentissage du jeune Davy fut résilié sans ditficulté par son patron, qui ne le regardait que comme un pauvre sujet. Heureusement Beddoes en jugeait autrement ; il s’empressa de mettre a la disposition de son jeune ami un laboratoire et même son amphithéâtre, pour y donner des leçons. C’est dans l’Institution pneumatique que Davy reconnut, en 1800, l’action exhùarante du protoxyde d’azote, découvert depuis vingt-quatre ans par Priestley, et qu’il fit sur lui - même une série d’expériences relatives aux actions physiologiques de la vapeur du charbon.

Le comte de Rumford venait de fonder à Londres l’Institution royale, destinée à propager les découvertes scientifiques applicables à l’industrie et à tous les arts utiles ; il s’était brouillé avec son professeur de chimie, le docteur Garnett ; les amis de Davy imaginèrent de le lui proposer. La présentation tut aussi pénible que le comportait le caractère de Rumford ; cependant le jeune candidat obtint la faveur de pouvoir faire quelques leçons sur les propriétés des gaz, dans une chambre particulière de la maison. Il n’en fallait pas davantage : la variété des idées, la clarté, la vivacité du nouveau professeur enchantèrent bientôt le public, et l’on se vit aussitôt obligé de lui offrir le grand amphithéâtre. Sa jeunesse, sa jolie figure l’ayant mis à la mode, il se laissa aller volontiers aux douceurs d’une existence si nouvelle pour lui, sans jamais perdre de vue pourtant les. intérêts de la science.

Sa rapide élévation paraîtrait avoir été mesurée à la brièveté de fa carrière qu’il lui était réservé de parcourir ; mais sa fébrile organisation lui imposait une, activité proportionnée. Nommé membre de la Société royale en 1803 et secrétaire de cette Société en 1806, on le voit couronné par l’Institut en 1807, associé à ce corps en 1817, fait baronnet en 1818, élevé enfin à la présidence de la Société royale en 1820. L’énumération parallèle de ses travaux montrera que de si grands honneurs étaient bien mérités.

Dès 1801, Davy avait construit une pile puissante différente de celle de Volta, dans laquelle un seul métal alternait avec deux liquides ; en 1802, il donnait les premiers exemples de décompositions chimiques par la pile ; en 1806, il formulait cette idée hardie que l’affinité chimique n’est autre que l’énergie des pouvoirs électriques opposés ; peu de temps après, il décomposait la potasse et la soude et obtenait deux nouveaux métaux dont les remarquables propriétés ajoutaient encore à l’éclat de leur découverte. C’est lui qui a donné leurs noms au potassium et au sodium. Il avait conservé une sorte de rancune enfantine à la théorie de la combustion, et il y cherchait partout des exceptions. La décomposition des alcalis fixes en métaux et en oxygène, jusqu’alors inconnue, venait déjà de porter un coup assez rude à cette théorie, en montrant l’oxygène aussi bien producteur de bases que d’acides ; mais Davy voulait absolument détrôner l’oxygène. L’acide muriatique lui fournit enfin, en 1810, l’exemple qu’il cherchait depuis si longtemps. Les chimistes s’efforçaient en vain depuis Soheele de découvrir le radical de cet acide ; on se perdait dans les dénominations d’acide muriatique pur, déphlogistiqué et oxygéné ; on s’égarait encore davantage dans les théories qui avaient donné lieu à ces appellations. Gay-Lussac et Thenard venaient bien d’émettre l’hypothèse qui devait trancher la question, mais ils n’osaient pas la formuler catégoriquement. C’est Davy qui proclama le chlore un corps simple et qui le baptisa. Les découvertes de l’iode et du fluor vinrent bientôt après confirmer la théorie de Davy.

Sa réputation était devenue telle, que les industriels ne croyaient plus que rien lui fût impossible. Une terrible explosion étant venue frapper un grand nombre d’ouvriers dans une mine de Cornouailles, un comité de propriétaires de mines vint porter à Davy l’invitation d’indiquer les moyens de prévenir de tels accidents. La question était pressante, mais difficile ; Davy la résolut en quelques mois par l’invention de sa lampe de sûreté, qui a depuis sauvé la vie à des milliers de travailleurs. Cette découverte est d’autant plus belle qu’elle n’a rien de fortuit, la question exigeant une solution d’autant plus prompte qu’il s’agissait de vie et de mort. Davy se mit aussitôt à l’étude ; il commença par analyser le grisou, se rendit compte des proportions dans lesquelles son mélange avec l’air le ren-