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qu’elle refuse ; puis on le voit ouvrir avec l’Autriche une négociation qu’elle n’ose continuer sans le concours de ses alliés ; s’assurer des neutres par des mesures de justice et des démonstrations d’amitié ; essayer de fixer les incertitudes de la Prusse et n’en obtenir que l’inaction ; préparer un concert prochain de principes et de résistance avec les Etats-Unis, le Danemark et la Suède, pour le maintien de la neutralité maritime ; ramener à la France des alliés aigris : l’Espagne, la Hollande et la Suisse, et saisir avec adresse l’occasion de détacher la Russie d’une coalition que seule elle rendait formidable. C’est là que commence l’histoire de la diplomatie française pendant les quinze premières années du siècle. Un tel début présage tout l’éclat des événements, mais non toute leur violence. Le négociateur de Campo-Formio suivra plus tard l’impulsion de son caractère personnel, de son intérêt de famille, de ses passions enflammées par la résistance toujours croissante de ses ennemis. La première année du consulat, cette réorganisation sociale si rapide ; la campagne de Marengo, cette victoire si fructueuse ; celle de Hohenlinden, si décisive, sont pour l’historien des sujets heureux et féconds ou se déploie son talent ; mais c’est à la science du diplomate ou à la politique extérieure qu’il importe de s’attacher.

Arrivé au traité de paix de Lunéville, l’auteur en développe les avantages pour la France et pour l’Italie, sans en signaler les inconvénients et même la fragilité. Ce traité consacrait un principe daugereux, qui consiste à partager les débris des Etats selon les convenances des Etats plus puissants. La France y perdit notablement, comme le prouva l’avenir. Un silence sur ce point équivaut à une apologie : c’est une faute grave. Sur l’importante question de la neutralité maritime, l’historien se montre savant publiciste. La France dut résoudre cette question après la mort violente du czar Paul Ier, celui qui eût pu venger Copenhague, bombardé par les Anglais qui prétendaient faire une tyrannie de la royauté des mers. Le premier consul médite avec l’Angleterre un traité d’équilibre ; mais, voyant l’empereur Alexandre abandonner la politique de son père, et l’Autriche préparer la rupture de la trêve de Lunéville, il fait entrer une armée française eu Portugal, pays allié à l’Angleterre, et ratifie le traité de Madrid, mécontent qu’il était du traité de Badajoz. Il se tourne ensuite vers la Prusse et traite avec elle pour le Hanovre, province qui échappe à la cour de Berlin, toujours irrésolue. Cependant il n’oublie pas les intérêts de la France à l’égard des puissances secondaires. La Bavière, la Hollande, la Suisse éprouvent déjà son influence salutaire. Mais la politique générale est bien loin de ces faibles intérêts ; elle est en Egypte, gage important que se disputent la France et l’Angleterre. Après tous ces grands coups d’épée, on arrive aux négociations, et l’on se restitue réciproquement presque tous les champs de bataille où tant de sang a coulé en pure perte. De simples préliminaires avec le haut banquier de la coalition déterminent la paix avec la Russie, la Porte, les Etats barbaresques. C’est la paix générale de 1801, qui excite l’enthousiasme de la France, et 1 historien en esquisse le tableau. Le premier consul est alors dans tout l’éclat de sa gloire personnelle ; il n’a pas encore échangé sa grandeur sans modèle contre une majesté sans prestige. L’année 1802, année de paix, enfante d’autres conquêtes ; elle est riche en événements graves au dedans et au dehors. Ces événements féconds et réparateurs appartiennent à l’histoire générale ; inutile de les rappeler. C’est précisément leur importance et leur valeur que ses ennemis, mal réconciliés, reprochèrent au premier consul ; c’est le prétexte dont ils se servirent pour rompre la paix d’Amiens, celle de Lunéville, et pour recommencer cette série de combats qui devait durer dix autres années et finir si déplorablement pour la France. L’Europe tout entière passe dans ce vaste tableau où sont représentées les aberrations de la politique, les résistances de l’opinion, les inconstances de la fortune et les progrès de l’esprit humain. Notre analyse s’arrêtera à cette rupture du traité d’Amiens ; plus étendue, elle deviendrait un précis d’histoire ; restreinte à ces limites, elle permettra de reconnaître la valeur du travail de Bignon et de marquer les caractères particuliers qui distinguent cette histoire de Napoléon des nombreux récits dont son règne a été le sujet.

France (Histoire de), par Michelet. A côté de grands et évidents défauts, cet ouvrage offre des beautés de premier ordre et est surtout remarquable par la forme saisissante et le chaud coloris du récit. Un critique distingué, M. H. Taine, a résumé ainsi son jugement sur les qualités et les défauts de M. Michelet comme historien : « L’histoire est un art, il est vrai, mais elle est aussi une science ; elle demande aussi la réflexion ; si elle a pour ouvrière l’imagination créatrice, elle a pour instruments la critique prudente et la généralisation circonspecte : il faut que ses peintures soient aussi vivantes que celles de la poésie ; mais il faut que son style soit aussi exact, ses divisions aussi marquées, ses lois aussi prouvées, ses inductions aussi précises que celles de l’histoire naturelle. M. Michelet a laissé grandir en lui l’imagination poétique. Elle a couvert ou étouffé les autres facultés qui d’abord s’étaient développées de concert avec elle. Son histoire a toutes les qualités de l’inspiration : mouvement, gràce, esprit, couleur, passion, éloquence ; elle n’a point celles de la science : clarté, justesse, certitude, mesure, autorité. Elle est admirable et incomplète ; elle séduit et ne convainc pas. Peut-être, dans cinquante ans, quand on voudra la définir, on dira qu’elle est l’épopée lyrique de la France. » Telle qu’elle est, et revue récemment par l’auteur, cette Histoire de France est excellente à consulter pour composer un travail général plus étudié. Certains chapitres sont da véritables chefs-d’œuvre : par exemple, le Voyage dans les provinces françaises, Jeanne Darc et sa mission, les Templiers, la Guerre des Armagnacs et des Bourguignons, etc. La publication de ce livre a commencé en 1833. Toute la partie qui se rapporte au moyen âge a paru en corps d’ouvrage ; mais la Renaissance et le xviie siècle ont eu des titres différents. Nous les avons analysés à part.

France (Histoire de), de M. Emile de Bonnechose (1834, 1er édit., 2 vol. in-8º ; Firmin Didot, 1869, dernière édition, 2 vol. in-8º). Le travail de l’historien s’arrêtait à la révolution de 1830 ; dans les éditions successives, il fut poussé jusqu’à 1848, et même, sous forme de sommaire, jusqu’à, la dix-huitième année du règne de Napoléon III. Cet ouvrage tient le milieu entre les grands recueils des historiens français, comme les Histoires de France de Sismondi, de Henri Martin, de Michelet, et les simples précis destinés à offrir seulement des résumés. Aussi complet que les premiers dans l’ensemble des faits, d’une sécheresse moindre que les seconds, il met le lecteur plus à l’aise et lui permet de voir dans l’histoire autre chose qu’une succession monotone de commencements et de fins de règnes, de défaites et de victoires.

Le livre de M. de Bonnechose est surtout remarquable par l’étude du développement des libertés municipales. Ennemi de la centralisation des pouvoirs, dans laquelle il voit pour la France, qu’elle soit monarchique ou républicaine, une cause de faiblesse et de décadence, il s’applique à démontrer quelle vitalité possédaient ses institutions à l’époque où chacune de ses provinces formait, sous la tutelle royale, une sorte de gouvernement. Pour lui, cette centralisation, qui date.de la seconde moitié du règne de Louis XIV, « a détruit ou comprimé les libertés nécessaires à l’équilibre des forces sociales ; au lieu de stimuler l’activité, la vigilance et l’énergie des membres de l’Etat, elle les a endormies ou paralysées ; en tendant à se substituer à l’action de tous, à dispenser chacun de vouloir, d’entreprendre et d’agir, elle a cessé d’être un progrès pour devenir un obstacle et un danger. » M. de Bonnechose appelle de tous ses vœux l’accroissement des ibertés communales ou plutôt la formation de sortes d’États provinciaux, qui feraient presque de la France une espèce de confédération féodale. Il regrette profondément que la Convention ait d’un trait de plume effacé l’histoire, glorieuse il est vrai, de nos provinces, et se refuse à voir les bienfaits que l’unité a apportés à notre nationalité. Tout en désirant comme lui qu’il soit fait de grands progrès dans le sens de la décentralisation, il est permis de s’éloigner de ses idées en ce qui concerne la grande œuvre unitaire de la Convention, œuvre nécessaire, que nul autre pouvoir n’aurait eu la force d’accomplir et qui a fait la France ce qu’elle est. Les nœuds puissants de la centralisation se relâcheront peu à peu, et l’unité n’en restera pas moins forte.

L’Histoire de France de M. E. de Bonnechose, comme le Précis de MM. Cayx et Poirson, est surtout destinée aux établissements universitaires. Il y faut plutôt chercher un ensemble complet des événements, d’après les historiens, que des points de vue nouveaux et des découvertes originales. En dehors de ses opinions sur le rôle en France des libertés municipales, M. de Bonnechose ne s’écarte en rien, dans la narration des faits, des doctrines usitées dans les livres universitaires.

France (Histoire de), de M. Laurentie (1841 ; 2e édit., 1857, 8 vol. in-8º). Travail consciencieux dans ses trois premiers volumes, où l’auteur s’applique à résumer, d’après nos grands historiens, les premiers âges de la monarchie, cette Histoire de France devient, à partir de l’époque moderne, une œuvre de parti, écrite au point de vue exclusivement catholique et dont il ne faut accepter les conclusions qu’avec la plus grande défiance. M. Laurentie appartient à cette école d’historiens qui, au lieu de mettre les faits sévèrement contrôlés sous les yeux du lecteur et de le constituer juge, laissent soigneusement de côté tout ce qui pourrait nuire à leur cause, feignent d’ignorer ce qu’ils ne veulent pas savoir, font sortir des textes les conclusions les plus inattendues et s’efforcent d’égarer les esprits par des rapprochements plus ingénieux que solides. De même que M. Capefigue vous démontrera, par des textes, que la cour des Valois fut la plus brillante et la plus spirituelle des cours françaises, et taira toute cette ignoble corruption qui l’a rendue la honte du xvie siècle, ainsi M. Laurentie, par des textes également, vous fera voir que la révocation de l’édit de Nantes s’est accomplie avec la plus grande douceur ; que le roi réprimandait les dragons, ses missionnaires bottés, dès qu’ils se permettaient la moindre licence, et que, d’ailleurs, la plupart des villes réformées accueillirent la révocation de l’édit avec satisfaction. « La preuve, dit M. Laurentie, c’est que l’on conserve encore, dans plusieurs ville du Midi, des déclarations où les municipalités remercient le roi de leur avoir donné la force de vaincre des habitudes d’hérésie où la croyance avait peu de part ! » Et que vouliez-vous qu’ils dissent, ces pauvres gens, menacés de la confiscation et de l’exil, torturés par les missionnaires, bottés ou non pillés par les ordres mêmes du roi et fusillés ou pendus au moindre signe de résistance ? Prendre de telles déclarations pour des documents sérieux, n’est-ce pas se moquer du lecteur ? Prétendre que le nombre des protestants chassés de France par cette cruelle et lâche persécution ne s’élève qu’à 67,732, pas un de moins ni de plus, lorsque les estimations les plus modérées le portent à un demi-million, n’est-ce pas en prendre bien à l’aise avec les documents ? Il est vrai que c’est aussi sur un document que s’appuie M. Laurentie, un document très-sérieux, dit-il, un mémoire « composé par le duc de Bourgogne ! »

On ne peut s’attendre à ce que cet historien impartial de la révocation de l’édit de Nantes, révocation qu’il appelle un bienfait public et qu’il considère comme ayant été l’expression de la pensée de la société française tout entière, garde quelque pudeur lorsqu’il fera l’historique de la Révolution. D’après le même système, les épisodes douloureux qu’il a si soigneusement dissimulés, tant qu’il s’agissait d’encenser Louis XIV et Letellier, ici il les accumulera comme à plaisir, et, ne les jugeant pas assez forts, il trouvera encore moyen de les exagérer. Il ne lui suffira pas de dire que les massacreurs dé septembre ont accompli une odieuse besogne ; il affirmera qu’ils ne se contentaient pas de tuer, mais qu’ils « mangeaient les cadavres ! » (T. VI, p. 452.) Toutes les légendes aujourd’hui réputées controuvées, le verre de sang bu par Mlle de Sombreuil ; le « Fils de saint Louis, montez au ciel, » de l’abbé Edgeworth ; le roulement de tambours ordonné par Santerre, trouvent naturellement leur place dans cette Histoire avec une foule d’autres, plus ou moins apocryphes, que l’esprit de parti a racontées et répandues. C’est l’histoire telle qu’on l’enseigne dans les séminaires, genre Loriquet.

France (Histoire de), de M. Théodore Burette (1842, 2 vol. in-8º). M. Magin a continué jusqu’à la révolution de 1830 l’ouvrage de M. Burette, qui s’arrêtait à 1789. Parmi les abrégés de l’histoire de France, celui-ci mérite une des meilleures places. Malgré sa forme restreinte et la rapidité obligée du récit, il est complet ; aucune partie n’a été négligée pour laisser plus de place à l’autre, aucune époque n’a été développée au détriment des autres. Cet équilibre, ces justes proportions sont remarquables. Écrite d’un style vif, rapide, qui va droit au but, cette histoire n’a la prétention de présenter qu’un tableau des faits, s’interdit toute digression, tout plaidoyer, et juge un homme, un événement, une période eu quelques lignes brèves, mais précises. La sobriété sans la sécheresse, tel est son grand mérite.

M. Th. Burette est de l’école de M. Mignet ; il prône l’impersonnalité dans l’histoire ; il raconte plus qu’il ne juge. On ne saurait mieux comparer son Histoire de France qu’au beau travail où M. Mignet a résumé, en deux volumes aussi, toute la Révolution française. Comme sources, ce sont surtout Amédée et Augustin Thierry, Guizot et Michelet qu’il accepte. Leurs grandes études, qui ont changé la face de l’histoire, lui ont constamment servi de guide ; souvent il s’est contenté d’en réduire les lignes principales, de les rapprocher et de les éclairer l’une par l’autre. Les premiers chapitres, où il met en lumière, d’après MM. Amédée et Augustin Thierry, les âges antéhistoriques de la Gaule et les origines de la nationalité française, sont des modèles de ce genre de composition.

L’Histoire de la Révolution, due à M. Magin, professeur d’histoire comme M. Burette, est écrite avec le même goût, la même sobriété, la même mesure. C’est la partie la plus considérable de son addition ; car le Consulat, l’Empire et la Restauration, événements trop contemporains, ne sont résumés qu’à grands traits. L’auteur a donné toute son attention à l’histoire de l’Assemblée constituante et de la République, et, dans un cadre étroit, a su reproduire avec un grand relief les principales lignes de cette grande époque.

France (Histoire de), par M. de Genoude (1er série, 1844-1847, 16 Vol. in-8º ; 2e série : Révolution, 7 vol. ; 3e série : Restauration, par M. Lubis, 7 vol.). Malgré les idées exclusivement monarchiques et religieuses au point de vue desquelles elle est écrite, cette histoire est une œuvre considérable et estimable à certains égards. M. de Genoude n’a ni la sagacité d’Augustin Thierry, ni la profondeur de M. Guizot, ni la pénétration de M. Michelet et son art magique de faire revivre les personnages ; mais il sait user avec discernement des découvertes faites avant lui et grouper avec art les faits propres à corroborer la thèse qu’il soutient. Comme Rollin pour son Histoire romaine, il avoue qu’il a largement mis à contribution ses devanciers. Rédigeant ainsi sur des documents tout trouvés, sur des faits élucidés d’avance, et ne cherchant pas à puiser à de nouvelles sources, il s’est trouvé plus à l’aise pour tirer de la longue suite de nos annales l’enseignement qu’il se proposait d’en faire sortir. Il ne faut pas chercher dans cette Histoire des données nouvelles, des solutions originales à tel ou tel problème, des recherches et des études sur des points controversés ; on n’y trouverait rien qui ne soit déjà développé dans l’abbé Mably, dans Augustin Thierry, dans Guizot, dans Michelet. M. de Genoude s’est borné le plus souvent au récit des faits ; mais il les a éclairés à sa façon. Tout en montrant, comme M. Guizot, dès l’origine de notre histoire, la lutte des trois grandes forces sociales : la royauté, les seigneurs, les communes, c’est en réalité au clergé qu’il donne le plus de relief, et il en exagère considérablement le rôle en l’idéalisant. Cependant, on ne saurait nier ce que ses recherches sur l’influence catholique dans les Gaules et pendant les premiers siècles de notre histoire ont d’intéressant et de complet. L’auteur a mis à profit avec un rare savoir les écrivains ecclésiastiques, et, s’il faut se défier de ses conclusions, du moins son érudition a-t-elle du charme.

« L’histoire d’un pays, c’est sa constitution politique se développant dans les faits. » Cette phrase de la préface de M. de Genoude sert d’épigraphe à son livre et donne en même temps le point de vue auquel il s’est placé pour l’éclairer. À travers les successions de dynasties et les faits d’armes, c’est surtout l’histoire de la constitution française qu’il s’est proposé de raconter ; cette constitution, le régime politique qui est l’essence même de la France, qui ressort de tout son passé, c’est « l’hérédité monarchique et la représentation nationale. » M. de Genoude a cherché surtout à démontrer que, depuis les premiers siècles, ce qu’il appelle la représentation nationale avait été fondé, s’était peu à peu accru, sous la tutelle de la royauté, et, entravé un moment par la Réforme, mouvement tout aussi féodal que religieux, avait enfin reçu sa pleine consécration à l’ouverture des états généraux par Louis XVI. La conclusion est facile à tirer. La France, ayant alors la meilleure constitution possible, celle qui répondait le mieux à ses vœux, eut grand tort d’en changer. Pour soutenir cette thèse, qui est une exagération singulière des faits, et qui parfois, comme pour la Réforme, les dénature entièrement, M. de Genoude isole avec une certaine adresse des citations de MM. Guizot et Michelet, extrait des textes oubliés, et le lecteur, qui n’est pas prévenu d’avance, voit avec une certaine stupeur que, sous la seconde race, par exemple, nous jouissions déjà d’un gouvernement « en grande partie démocratique. » Le rôle des états généraux, même sous la royauté moderne, a été si mince, et la place du peuple si étroite dans les états généraux, que c’est tout au plus si l’on pourrait dire que le gouvernement d’alors était, en partie, représentatif. Pour les dynasties suivantes, xive et xve siècle, M. de Genoude s’étaye de l’assentiment de Machiavel. « Le gouvernement de France, dit le secrétaire florentin, est à notre connaissance le plus tempéré par les lois. Le royaume de France est heureux et tranquille par ce que le roi est soumis à une infinité de lois qui sont la sûreté des peuples. » Nous voudrions bien connaître cette infinité de lois qui gênaient Louis XI et Louis XIV.

Fidèle à son point de vue, M. de Genoude ne veut voir dans la Réforme qu’une résistance féodale an système représentatif qui était le vœu de la France entière et de ses rois. Ces protestants austères, qui réclamaient comme base de toutes les libertés la liberté de conscience, sont transfonnés en aristocrates, parce qu’ils avaient pris leurs chefs militaires dans la seule classe qui put leur en fournir, la noblesse. Cette insurrection à la fois religieuse et fédérative, presque républicaine, changée en une lutte des nobles contre le pouvoir royal, et la Saint-Barthélémy, considérée comme un simple coup d’Etat, sont de ces énormes hérésies trop bien réfutées maintenant pour être acceptées même par le lecteur le plus distrait.

Quant à la continuation de l’Histoire de France, c’est-à-dire aux 7 volumes concernant la Révolution, qui sont aussi de M. de Genoude, et à l’Histoire de la Restauration (7 vol. in-8º), qui est de M. Lubis, les travaux récents beaucoup plus complets de MM. Thiers, Michelet, Louis Blanc et de Vaulabelle ont fait entièrement oublier ces ouvrages, estimables sous quelques rapports, mais trop empreints de l’esprit de parti.

France (Précis de l’histoire de), par MM. Cayx et Poirson (1852, 3e édit., 2 vol. in-8º). Cet estimable et consciencieux ouvrage n’est pas le fruit d’une collaboration, dans le sens ordinaire du mot. M. Cayx, recteur de l’académie de Paris, a rédigé le premier volume, Histoire du moyen âge en France jusqu’à Charles VII, et M. Poirson, proviseur du lycée Charlemagne, l’Histoire moderne jusqu’à Henri IV, qui forme le second velume. C’est le vigoureux livre de M. Michelet, Précis de l’histoire du moyen âge en Europe, ouvrage à la fois si plein et si concis, où rien