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dit point les deux octaves h, cause de la similitude des signes, il se servit de caractères majuscules pour les notes de la première et de minuscules pour celles de la seconde. La notation de son système se trouvait donc disposée de cette manière :

La, si, ut, ré, mi, fa, sol, la, si, ut, ré, mi, fa, sol. A, B, C, D, E, F, a, a, b, c, d, e, .f, g.

Quant à la note si, qui se trouvait un demiton plus bas dans le premier ton que dans les autres, Grégoire la distingue par 4 mol dans je premier, et par b carré dans les autres ; c’est évidemment de cette différence apportée par lui comme signe distinctif dans la forme du b que nous viennent les signes alteratifs bémol (| ?) et bécarre (ou b carré tj).

Nous voyons, par ce qui précède, que le système grégorien se rapportait d’une façon assez exacte au système actuellement employé : la division par octaves est bien la même ; la différence consiste seulement dans l’étendue, qui était alors beaucoup plus restreinte. Il n en faut pourtant pas conclure que la méthode de Grégoire le Grand réussit de prime saut et ne rencontra point d’obstacles. Loin de la ; ainsi que toutes les réformes utiles, celle-ci ne se fit point sans beaucoup d’opposition, et ce n’est que plusieurs siècles plus tard que la méthode grégorienne prévalut enfin dans l’enseignement musical. Il fallut, avant son adoption définitive et complète, passer par un système monstrueux, celui des hexacordes et de la solmisation par muances, dont nous donnerons plus loin l’explication raisonnes. »

Mais, au sujet des hexacordes et de quelques questions secondaires, bien des erreurs ont été commises, comme aussi en ce qui concerne le mot gamme, qui est devenu le nom du système. On a dit que ce nom était une invention de Guido, moine de l’abbaye de Pompose, plus connu sous le nom de Gui d’Arezzo, de celui de sa ville natale. On lui a attribué la paternité de la solmisation par hexacordes, de la main harmonique, etc. Tout cela est complètement faux, et nous allons voir que ce grand musicien n’est pas aussi . coupable qu’on a voulu le dire.

En ce qui concerne le système des hexacordes, système de six sons, comme l’indique son nom, l’invention n’en peut revenir à Guido ; car, en plusieurs endroits de son célèbre ouvrage, le Micrologue, il déclare que l’échelle musicale rationnelle est composée de sept sons, et qu’il faut sept lettres ou caractères pour les représenter. « Il y a nécessairement, dit-il, sept notes ou sept sons dans toute espèce de chant, comme il y a vingt-quatre lettres dans l’alphabet, comme il y a sept jours dans la semaine. » Quant au mot gamme, voici quelle est son origine : un musicien à peu près contemporain de Guido avait ajouté a l’écnelle musicale, établie par saint Grégoire, quatre notes à l’aigu et une note au grave. Nous avons dit qu’a cette époque les notes ne portaient point de nom, mais étaient désignées par des lettres de l’alphabet. Ce musicien caractérisa celle qu’il ajoutait par le r (gamma) des Grecs, et comme cette note se trouvait être la première du système, il advint que ce gamma, placé en tête de l’échelle, donna son nom à ce système, qu’on appela gamme par la suite.

Arrivons enfin aux noms que portent les sept notes de la musique.

« Oh sait, dit M. Pougin, que les six premiers nous viennent de l’hymne de saint Jean-Baptiste, dont voici la première strophe :

Ùt queanl loris

Reionare fil/ris

, Mira tjeslorum

Famuli tuorum

Soltie yiolluti

Laiu rcatum

Sanctc Jblumnes.

Voilà l’origine des noms ut, ré, mi, fa, sol, la, que Guido, selon la plupart des écrivains, aurait donnés aux six premières notes de la gamme ; mais, en examinant avec soin un fragment d’une lettre adressée par lui à un moine de ses amis nommé Michel (fragment dans lequel se trouve le passage de l’hymne cité plus haut), on acquiert la certitude que le sens qui y fut attaché depuis n’y avait, en aucune façon, été donné par lui. Voici ce fragment : « S’il est un son ou neume que n vous vouliez fixer dans votre morceau, afin que partout et dans quelque morceau que ce soit (de vous connu ou ignoré) il vous n vienne sur les lèvres et que votre voix le b puisse saisir sans hésitation, mettez-vous s dans la tête un chant très-connu, et, pour chaque mélodie que vous désirez apprendre, b ayez présente à la mémoire une mélodie du même genre et commençant par le même son, ainsi, par exemple, que ce chant dont je me sers pour mes élèves, aussi bien pour « les commençants que pour ceux qui sont plus avancés, Ut queant Iaxis, etc. »

b Les maîtres de chant n’avaient point alors d’instruments avec lesquels ils pussent donner la tonalité, yu, cour mieux dire, indiquer à leurs élèves le diapason qu’ils devaient prendre pour entonner tel ou tel morceau. On n’avait alors que le monocorde, qui, comme son nom l’indique, était un instrument à une seule corde, lequel se divisait à volonté, au moyen de petits chevalets mobiles, qui, en changeant de place, changeaient sa tonalité. On conçoit toutes les lenteurs de ce système

vin.

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impossible. Voici donc quelle était la méthode de Guido : il adoptait un chant très-connu, tel, par exemple, que celui qu’il cite dans sa lettre, et cherchait, le plus sûrement qu’on le peut faire avec la voix, le diapason dans lequel on le pouvait chanter ; puis, lorsque, par ce moyen, il avait trouvé la tonalité qui lui semblait préférable, il faisait entonner à ses élèves, dans cette tonalité, le chant qu’il leur voulait apprendre. »

Ce n’est donc qu’une simple démonstration de ce système que Guido a voulu faire à son ami Michel, lui laissant d’ailleurs toute faculté de faire choix à son gré de tel autre chant connu de lui, s’il en trouvait quelqu’un qui lui fut plus familier que ceiui qu’il lui indiquait. On doit remarquer, toutefois, que. le choix fait par lui de l’hymne de saint Jean est une preuve de sagacité, attendu qu’à chaque vers de cette hymne la psalmodie monte régulièrement d’un degré. Ce morceau, plus qu aucun autre, pouvait donc donner de la facilité pour se bien inculquer chaque son dans la mémoire ; cela ne prouve pas néanmoins qu’on n’eût pu obtenir le même résultat avec un autre chant.

Quoi qu’il en soit, et bien que telle ne fût pas l’intention de Guido, les six syllabes que nous avons désignées devinrent bientôt d un usage presque général en Europe ; mais comment se fait-il qu’elles furent appliquées à un système nouveau de six sons ? Comment futon amené à abandonner l’échelle rationnelle de saint Grégoire, et quel fut l’inventeur du système des hexacordes et des muances ? C’est ce qu’il est impossible de savoir. Toujours est-il que la méthode de solmisation par hexacordes envahit promptement l’Europe entière, qu’elle subsista sans opposition jusque ■ vers le milieu du xvie siècle, et que ce n’est quu vers la moitié du Xviie siècle, c’est-à-dire au bout de cent ans, que, sous la pression des efforts réitérés d’un grand nombre de musiciens intelligents, on renonça à un système absurde, dont les défauts étaient innombrables.

Plusieurs artistes, en effet, s’attachèrent à combattre ce système et à remettre en vigueur celui de sept sons établi par saint Grégoire. Le premier de ces réformateurs fut un musicien belge, Hubert Waelrant, qui proposa, vers 1547, de substituer aux hexacordes et aux noms des six notes qui les composaient une nouvelle méthode de solmisation par sept notes, avec sept nouvelles syllabes pour les nommer, qui étaient bo, ce, di, ga, lo, ma, ni. Nommée bobisation ou bocédisation, cette méthode, reçue et adoptée par quelques écoles des Pays-Bas, fut désignée par cette raison sous le nom de solmisation belge ; mais la France, l’Italie et l’Allemagne restèrent fidèles aux hexacordes. Un autre Belge, Anselme de Flandre, entreprit de compléter la gamme en ajoutant une note aux six que comprenait l’hexacorde ; il proposait, pour cette note complémentaire, une septième syllabe qui était si, lorsque la note était dans son état naturel, et bo quand elle était bémolisée.Un troisième Flamand, nommé Henri van de Sutte, publia, à Milan (1599), un livre latin sur les défectuosités de la solmisation par muances et sur la nécessité de se servir d’une septième syllabe à laquelle il donnait, lui, le nom de bi. Un peu plus tard, au commencement du xvn< : siècle, un Allemand du nom de Calwitz, Calowitz ou Calvisius, introduisit dans son pays le système d’Hubert Waelrant, appelé bocédisaiion. Il en exposa les avantages dans un petit ouvrage élémentaire intitulé : l’Art de lire la musique et de la chanter. Il ne réussit pas à propager cette méthode ; car si les Allemands se rendirent à la nécessité d’urfe gamme de sept sons, ils ne tardèrent pas à remplacer les syllabes usitées jusqu’alors par sept lettres de l’alphabet, pour la disposition desquelles ils adoptèrent le système grégorien et qu’ils emploient encore exclusivement aujourd’hui. Quelques années après ce premier essai, vers 1611, Calvisius tenta une autre réforme ; puis un autre Allemand, Daniel Hitzler, prévôt et conseiller à Stuttgard, musicien aussi érudit que théologien savant, publia un ouvrage contre la méthode inventée par Hubert Waelrant et propagée par Calvisius, et proposa dans cet ouvrage un nouveau mode de solmisation qu’il intitulait bebisation, et il appelait les notes la, be, ce, de, me, fe, ge. Son système ne réussit pas plus que celui qu’il combattait. Vint alors un moine espagnol, fierre d’Urena, qui composa, en 1620, un traité de musique dans lequel il demandait l’abandon de la méthode par muances et par hexacordes, et proposait d’ajouter tout simplement aux six notes de ce système la septième syllabe ni. Il ne put jouir du triomphe de ses idées ; car si elles fructifièrent un peu, ce ne fut guère que trente ou quarante années plus tard, époque à laquelle son système fut publié d’une manière développée et louangeuse par Caramuel de Lobkowitz, évêque de Vigevano. Enfin, un prêtre français, Guillaume-Gabriel Nivers, publia, en 1046, la première édition d’un opuscule intitulé : la Gamme du si, nouvelle méthode pour apprendre à chanter sans muances (Paris, Ballard, in-8°). La clarté et la lucidité des préceptes Contenus dans ce petit ouvrage contribuèrent efficacement a propager la réforme en France. Il fut réimprimé pour la. quatrième fois, et sans nom d’auteur, en 1696, sous ce titre : Méthode facile pour apprendre à chan-

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ter en musique, par un célèbre maistre de Paris, et quelques écrivains, qui n’eurent évidemment connaissance que de cette édition, l’attribuèrent à un musicien de Paris, nommé Le Maire ou Lemaire. Ce qu’il y a de vrai, c’est que Lemaire propagea la méthode de Nivers, avec cette différence qu’il appelait bien si la septième note de la gamme dans son état naturel, mais transformait ce nom en sa lorsqu’elle était affectée d’un bémol, — différence qui était encore un défaut dans son système ; car, pour être logique, il eût fallu alors donner un double nom à chacune des autres notes de la gamme, et amener ainsi un abus de dénominations qui eussent encore embrouillé outre mesure les études musicales.

Par ce qui précède, on voit par quelles modifications, par quelles transformations nombreuses et successives a.-gamme a passé

; depuis sa naissance jusqu’à nos jours. Elle
!est enfin, maintenant, établie et arrêtée d’une

façon si solide qu’il ne paraît point probable ique de nouveaux changements doivent sur-Ivenir dans sa constitution. D’ailleurs, nous l’avons dit, le système de sept sons ou de l’heptacorde est le seul logique, rationnel, naturel, puisqu’il se fonde sur la résonnance

!de l’octave, qui revient après chaque série de

■sept sons, résonnance après laquelle on voit ise présenter une nouvelle série, de sons hojmonymes avec les précédents, comme l’écho

; est homonyme du son qui le provoque.

1 Cela est si vrai que des peuples dont la civilisation est bien loin de ressembler "à la nôtre possèdent, comme nous, la gamme desept sons, se reproduisant à chaque octave •ainsi que la nôtre. Nous citerons, entre autres, les Arabes et les Chinois. Les premiers nomment ainsi leurs notes : alif (la), be (si), gim fut), dai (ré), lie (mi), waw (fa), sain (sol), et ils ont l’habitude de peindre en vert la note la plus basse, la seconde en rose, ta troisième en bleu foncé, la quatrième en violet, la cinquième en brun, la sixième en noir et la septième en bleu clair. Quant aux Chinois, voici comment ils notent leur gamme ; be fut), yu (ré), pien-kung (mi) ; kung (fa), scang (sol), kio (la) et pien-ce (si).

La gamme indouè a aussi avec la nôtre une analogie frappante ; même nombre de notes, disposées dans l’ordre correspondant que voici  : sa, ri, gd, ma, pa, da, ni, sa. On sait que Vossius prétendait que les Égyptiens’étaient en possession d’une gamme semblable"a la nôtre, bien des siècles avant que Gui d’Arezzo eût fait connaître la sienne. C’est une question que nous laissons à d’autres le ’ soincf approfondir. Comme les Indous mettent des idées superstitieuses partout, c’eût été miracle si la musique, ce.délassement dés dieux, ne leur avait pas fourni matière à satisfaire leur goût en ce genre. Chaque note de la gamme & trait à quelque divinité, et renferme plusieurs sens cachés tirés du son même que cette note exprime, ou de quelque chose de semblable. Il y a aussi les notes de la joie, celles de la tristesse, celles de la douceur, celles de la colère, etc. Cette gamme remonte d’ailleurs à la plus haute antiquité, car la musique des Indous est aujourd’hui ce qu’elle était à sa naissance.

On voit que le mot gamme, dans son’sens absolu, représente une succession dé sons marchant par degrés conjoints’ et pris, dans l’ordre diatoniqué.’Cependaht, et’tout naturellement, la gamme chromatique, c’est-à-dire par demi-tons, trouve sa place dans un système comme le nôtre ; mais on a étendu la valeur du mot, ’et l’on a donné le nom de gamme à des successions de différentes sortes, à des combinaisons diverses, qui le méritent d’ailleurs, en ce sens qu’elles produisent toujours, mêlées à certains enjolivements, l’audition dela^anime stricte et rudimentaire ; c’est ainsi qu’on a les gammes en tierces, en sixtes, en octaves, en accords, etc., soit brisées, soit simultanées. Du reste, l’exercice des gammes, au point de vue des études musicales faites par les virtuoses, est la base unique, indispensable, de toute bonne éducation. «Les gammes, a-dit fort justement un critique, les gammes des deux genres sont un excellent exercice pour l’étude de la musique instrumentale ou vocale sous le rapport de l’exécution. On ne saurait trop en recommander l’usage aux personnes qui désirent atteindre à un certain degré de perfection. C’est par l’exercice très-fréquent des gammes dans tous les tons que la voix d’un chanteur et les doigts d’un instrumentiste peuvent acquérir cette souplesse, cette flexibilité, cette agilité qui les rendent propres à l’exécution irréprochable des passages les plus difficiles. » Cela est très-vrai. Chanteurs et instrumentistes doivent d’abord s’appliquer à faire des gammes simples en’sons filés ; ils les feront ensuite en détaché, puis en coulé, en atteignant peu à peu la plus grande rapidité possible, tout en conservant la. distinction nécessaire entre chaque note et en évitant la confusion, ce qui est extrêmement difficile ; ils s’exerceront ensuite aux gammes chromatiques. Violonistes et pianistes feront des gammes en tierces, en sixtes, en octaves, en dixièmes, etc. Et même quand un artiste est devenu un virtuose consommé, il ne peut se dispenser de faire, chaque jour, au moins une heure de gammes, afin de conserver la facilité et la sûreté de son mécanisme.

— Techn. et B, -arts. Gamme des couleurs.

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Les couleurs ont comme les sons une gamme, c’est-à-dire un ordre de relations, donné par la nature. Cette gamma comprend les sept couleurs du prisme ; lo jaune, l’orangé, le rouge, le violet, l’indigo, le bleu et le vert. Parmi ces sept couleurs, il en est trois qui peuvent être considérées comme génératrices, ce sont : le jaune, le rouge et le bleu. Dans le langage pictural, chaque couleur s’appelle un ton. On nommo tonalité l’ensemble des tons, subordonné à leur ton dominant. Ainsi, lorsqu’on dit d’un morceau de peinture qu’il est d une tonalité vigoureusej cela signifie que tous les tons en sont vigoureux, pris chacun séparément, et qu’ils le sont encore si on les considère par rapport au ton dominant, a celui qui apparaît à première vue et semble être mêlé à tous les autres. C’est ainsi qu’on dit aussi d’un tableau qu’il est peint dans une tonalité bleue, violette, rouge, verte, suivant que l’une de ces couleurs semble dominer dans tous les tons ou que ces tons sont subordonnés à cette couleur. La gamme est en peinture ce qu’elle est en musique, c’est-à-dire l’ensemble des sept tons dans l’ordre et la relation qui leur sont propres, et qui viennent d’être énoncés. Cette gamme peut être variée à l’infini, sinon dans sa composition, du moins dans son degré d’intensité ou dans les combinaisons auxquelles elle peut donner Heu.

Mais, tandis que la musique a des tons qui ne se modifient que suivant des intervalles déterminés, la peinture peut modifier d’une façon sensible une même couleur, c’est-à-dire un même ton, par un nombre assez considérable d’altérations. Il va sans dire que ces altérations rapprochent toujours le ton ainsi modifié du ton le plus voisin qui se trouve dans la gamme. Ainsi, prenons un exemple : le bleu du ciel n est pas constamment semblable ; tantôt plus intense, tantôt plus pâle, il est, vu dans une certaine étendue, composé de nuances différentes, qui toutes’ appartiennent au bleu ; mais ce bleu, vers le couchant, touche au.violet, et vers le levant tourne au vert. Il en est de même pour toutes les couleurs. Les tons, pris en eux-mêmes, ou considérés relativement à ceux qui les envir’ ronnent, ont certaines qualités qu’il est utile de connaître, dont il est nécessaire de bien se rendre compte ; la connaissance de ces’ qualités formant en quelque sorte toute la science picturale. Ce sont : l’intensité, la tonalité, la vigueur et l’éclat. L’intensité est le degré de coloration d’un ton comparé au ton semblable du prisme qui peut, servir de type ; la’tonalité, que les peintres appellent la valeur, est la différence de coloration d’un ton comparé avec ceux qui l’environnent ; la : vigueur est faite du plus ou moins de noir qui entre.dans un ton, ou plutôt du degré qui rapproche ce ton du noir ; enfin l’éclat est là

firopriété que possède un ton de représenter alumière ou de la, réfléchir. Un seul ton peut, réunir plusieurs de ces qualités ou jWèine toutes ensemble au plus haut degré. Il est d’autres termes qui sont en usage dans la peinture et qui indiquent la manière d’être des tons. C’est ainsi qu’on dit qu’ils sont opaques ou transparents, crus ou rompus. Rompre un ton, c’est le mêler à un autre. Ce qu’on appelle des tons neutres, ce n’est autre chose qu’une gamme de tons rompus, d’une ligueur, en général, médiocre. La façon dont les tons se distinguent les uns des autres est désignée par. le mot enlever. Lorsqu’on dit, d’un ton qu’il s’enlève sur un autre, cela.signifie qu’il tranche, qu’il est visiblement différent, distinct. Les tons s’enlèvent tantôt en valeur, tantôt en-vigueur. Un ton s’enlève en valeur, lorsqu’il est d’une coloration plus inr tense que celle du ton voisin ; il s’enlève en vigueur, lorsqu’il est plus sombre ou plus opaque, quelle que soit d’ailleurs son intensité. Cette distinction n’est pas toujours facile à observer et exige une certaine éducation, une certaine habitude de l’œil. Ainsi, qu’on mette à côté l’un de l’autre deux objets, deux rubans, par exemple, de coloration différente, l’un rouge ponceau d’un grand éclat, et l’autre d’un bleu virant au violet et mélangé d’une nuance de gris, un peu plus clair cependant que le premier ; qu’on présente ces deux couleurs à une personne qui n’est point exercée à distinguer nettement les couleurs, en lui demandant quelle est celle qui s’enlève en vigueur, et il y a gros à parier que, trompéépar l’éclat, elle désignera le bleu, en réalité plus clair. Il en est de même quand il s’agit de distinguer la vigueur d’un ton très-clair placé à côté d’un autre très-intense, mais plus vigoureux. Ce sont là deux modes du ton que 1 œil du peintre doit être exercé à distinguer et à reconnaître facilement.

L’arc-en-ciel, ou le rayon lumineux décomposé par le prisme, nous offre le type complet, absolu, de la gamme des couleurs, avec le passage d’un ton à un autre. C’est là ce qui peut sei’vir à démontrer la théorie ; mais, dans la pratique, on n’a point à son service des gammes aussi parfaites et toutes naturelles. Ces gammes, il faut les produire soi-même. Les couleurs dont on charge la palette sont, en général, d’une coloration très-tranchée, très-distincte ; mais elles n’ont point entre elles les rapports qui constituent la gamme. Ces rapports, le peintre doit les déterminer et les réaliser, par le mélange, les combinaisons, et c’est en cela surtout que consiste l’art de peindre. C’est la possession de cette science pratique qui constitue la qualité da coloriste.

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