Page:Larousse - Grand dictionnaire universel du XIXe siècle - Tome 8, part. 4, Gile-Gyz.djvu/310

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

1564

GRUN

Hampton-Court. Bientôt, une maladie des yeux l’obligea pendant quelque temps à se livrera la peinture décorative, et il lit de nombreuses fresques pour le prince Albert. Simultanément il publia : Études de fresques et de décorations et les Décorations du pavillon du parc dans le palais de Buckingham (1844). Lorsque sa vue le lui permit, M. Grûner se remit à graver. Sa première œuvre fut le Cavalier endormi de Raphaël, puis il publia un album de dessins d’études d’après les grands maîtres, qu’il intitula : Modèles d’art décoratif. 11 reproduisit ensuite le tableau de Raphaël, connu sous le titre de : Pax vobiscum, et celui du Christ au jardin des Oliviers ; puis les mosaïques du palais Chigi et le tableau de Saint Laurent distribuant des aumônes, qui orne au Vatican la chapelle Fiesole. En 1851, M. Grûner s’est activement occupé de la décoration intérieure du palais de l’Industrie à Londres, et, depuis, il a dirigé la publication des dessins des monuments de Ninive, rapportés par M. Layard.

GRUNÉRITE s. f. (gru-né-ri-te — de Grûner, nom propre d’homme). Miner. Bisilicate de fer naturel, ainsi appelé du nom du minéralogiste qui en a fait l’analyse : La grunérite est une substance grise et asbesliforme, dont la densité est exprimée par le nombre 3,7 ; elle se compose de 43,9 de silice, 52,2 d’oxyde ferreux, 1,1 de magnésie, 0,15 de chaux, et 1,9 d’alumine ; on ne l’a encore trouvée qu’à Collobrières, dans le département de l’Aude.

GRIJNERT (Johann-August), célèbre mathématicien allemand, professeur de mathématiques à l’université de Greifswald, membre correspondant de l’Académie des sciences de Vienne, né à Halle le 7 février 1797. Il étudia à l’université de Gœttingue, où il obtint le diplôme de docteur es philosophie en 1820. L’année suivante, il fut nommé professeur de mathématiques et de physique au gymnase de Torgau ; en 1828, à celui de Brandebourg, et, en 1833, à.l’université de Greifswald. Ses nombreux ouvrages ont surtout trait aux diverses branches des mathématiques pures. Il a aussi publié, sur des questions de physique ou d’astronomie, de nombreux mémoires dont la plupart ont été insérés dans les Mémoires de l’Académie de Vienne, ou dans le journal intitulé : Archives de mathématiques et de physique, dont il est l’éditeur à Greifswald. Depuis 1838, il occupe aussi la chaire de mathématiques théoriques et pratiques de l’académie d’Éldena, près de Greifswald. On a de lui : Dissertation sur les mathématiques (Altona, 1822) ; Traité des sections coniques (Leipzig, 1824) ; Traité de statique (Halle, 1826) ; Trigonométrie sphérique (Berlin, 1833) ; Description analytique des éléments de trigonométrie plane, sphérique et sphéroïdale ; Éléments de calcul intégral et différentiel (Leipzig, 1837) ; Guide pour tes premières leçons d’analyse supérieure (Leipzig, 1838) ; Éléments de géométrie analytique (Leipzig, 1839) ; Traité de mathématiques à l’usage des classes supérieures (Leipzig, 1850) ; Traité de mathématiques à l’usage des classes inférieures (Leipzig, 1851) ; Traité de mathématiques et de physique ; Arithmétique politique (Leipzig, 1841) ; Géométrie plane, stéréométrie, trigonométrie plane et géodésie (1842 1843) ; Physique (Leipzig, 1845-1851) ; Études de mathématiques pures et appliquées (Brandebourg, 1840) ; Essai d’une nouvelle méthode pour mesurer la hauteur du pâle (Leipzig,

1844) ; De la distance moyenne d’un point à une figure (Greifswald, 1848) ; Recherches sur l’optique (Leipzig, 1846-1851) ; Recherches pour servir à l’élude de l’optique météorologique et des sciences gui s’y rattachent (Leipzig, 1850) ; Recherches pour déterminer les stations des corps planétaires se mouvant autour du soleil

! Vienne, 1855) ; Théorie des éclipses de soleil

Vienne, 1855) ; Géométrie analytique (Greifswald, 1856). M. Griinert a aussi terminé le Dictionnaire mathématique de Kugel (Leipzig, 1833-1860).

GRtfNEWALD (Mathias), peintre célèbre, né, croit-on, à Francfort-sur-le-Mein vers 1450, mort vers 1530. Il lit ses études artistiques à Asehaffenbourg, où il a exécuté la plus grande partie de ses travaux, pour le compte du cardinal Albert de Brandebourg, de l’électeur de Mayence, etc. On voit encore un certain nombre de ses tableaux dans l’église d’Aschaffenbourg. D’autres se trouvent au musée de Munich, au Belvédère à Vienne, k l’église Sainte-Anne à Annaberg, à l’église Sainte-Marie à Lubeck, à l’église Sainte-Marie à Halle. Les tableaux de ce maître qui ornaient la cathédrale de Mayence furent enlevés par les Suédois pendant la guarre de Trente ans et sombrèrent, avec le navire qui les transportait, dans la mer du Nord. Par le dessin, comme par le coloris, les œuvres de Grûnewald assignent à cet artiste un rang distingué parmi les meilleurs peintres allemands du moyen âge. Comme Albert Durer et Cranach, il appartient à l’école du naturalisme ; il s’attache avant tout au naturel, à la reproduction du vrai, et évite avec soin

— ce qui est la preuve d’un goût que n’avaient pas ses contemporains — d’introduire dans des scènes religieuses et d’un sentiment austère der. types outrés et grimaçants qui appartiennniit au genre de la caricature.

GRiJNPECtt ou GRUENPECK (Joseph), astrologue allemand, né à Burghausen (Bavière) en 1473, mort eu Styrie vers le milieu

GRtJP

du xvie siècle. Il parcourut l’Italie, la Hongrie, la Pologne, entra, en 1498, au service de l’empereur Maximilien, en qualité de secrétaire et d’astrologue, fit représenter à Lintz, en présence de l’empereur, une pièce facétieuse intitulée : Ludus Dianm (1500), et entra, par la suite, dans les ordres. Griinpeck a composé un assez grand nombre d’ouvrages, remplis de rêveries astrologiques, aujourd’hui extraordinairement rares et qui font partie des incunables de la typographie allemande. Nous citerons particulièrement : Josephi Gruenpeck Pronosticon (Vienne, 1496, in-4o), dont on ne connaît qu’un seul exemplaire ; Tractatus de pestilentiali scorra, sive mala de Franzos (Augsbourg, 1496, in-S°)’ ; Spéculum naturalis cœlestis et prophéties visionis (Ratisbonne, 1508, in-fol.) ; Pronostics du docteur Joseph Gruenpeck depuis la trente deuxième aimée jusqu’à la quarantième de Charles-Quint (Nuremberg, in-4o), etc.

GRUNSTEIN s. m. (grunn-stain — mot allem). Géol, Variété de roche de couleur verte, qui est un composé d’amphibole et de feldspath.

GRUNTEN, montagne de Bavière, dans le cercle de Souabe et Neubourg, en face d’Immenstadt, sur le cours supérieur de l’Iller. Altitude, 1,790 mètres.

GRUNWAI.D (Frédéric-Emmanuel), médecin et naturaliste allemand, né à Kupper (haute Lusace) en 1734, mort en 1820. Il pratiqua la médecine à Dresde (1755), puis à Bouillon (1761), et se fit connaître par la publication de la Gazelle salutaire, petit journal où, pendant trente ans, il s attacha à divulguer les découvertes faites dans l’art de guérir. Grunswald collabora au Journal encyclopédique, au supplément de l'Encyclopédie de Diderot et rédigea de nombreux mémoires. Il reçut des gratifications de la Convention, du Directoire, du gouvernement impérial, et, par la suite, du roi des Pays-Bas.

GRUON s. m. (gru-on — dimin. de grue). Ornith. Petit de la grue.

GRPPELLO (Gabriel de), sculpteur belge, né à Grammont en 1644, mort près d’Aix-la-Chapelle en 1730. Il était d’origine italienne. 11 fit ses études à Anvers et à Paris, devint, en 1695, premier sculpteur de l’électeur palatin Jean-Guillaume et, en 1706, premier sculpteur de l’empereur Charles VI. Les nombreuses œuvres de cet artiste ont de l’élégance, de la vie, du mouvement, mais elles manquent de pureté et de largeur dans le style. Nous citerons de lui : la statue équestre en bronze de l’Electeur palatin, à Dusseldorf ; sa Madeleine expirante, en marbre ; Diane, Narcisse, k Bruxelles, etc.

GRUPEN (Chrétien-Ulric), historien et jurisconsulte allemand, né à Harbourg en 1692,

mort en 1767. Il exerça la profession d’avocat à Hanovre (1715), où il fut successivement syndic, bourgmestre, conseiller du consistoire. Il occupa ses loisirs à la composition d’un grand nombre d’ouvrages, parmi lesquels on estime surtout ceux qui sont relatils au moyen âge et à l’histoire du droit romain ; malheureusement la sécheresse et la monotonie du style en rendent la lecture fatigante. Les principaux de ses trente-cinq ouvrages imprimés sont : Disceplationes forenses (Leipzig, 1737, in-4o) ; Origines et antiquitaies hannoverenses (1740) ; Origines pyrmon-tans et swatenbergicœ (1740) ; Antiquités germaniques servant à l’explication du droit commun et du droit féodal de la Saxe et de la Souabe (1746, in-4o) ; De uxore theostica (1748, in-8o) ; Observatio juris criminalis de applicatione tormenlorum (1754) ; Obseruationes rerum et antiquitatum germanicarum et romanarum (Halle, 1763), ouvrage important ; Origines germauics (1764), etc.

GRUPPE (Othon-Frédéric), poète, philosophe et écrivain allemand, né à Dantzig le 15 avril 1804. Il alla achever ses études à Berlin, où il embrassa la carrière du professorat. Mais son opposition à la philosophie de Hegel, alors en vogue et patronnée par le gouvernement prussien, lui causa de nombreux déboires. Il avait composé contre ce philosophe une comédie dans le coût d’Aristophane, intitulée les Vents, qui lui ferma momentanément la carrière de l’enseignement. Il s’adonna dès lors k la littérature. Dès 1830, il devint un des collaborateurs assidus du Moniteur de la Prusse et occupa, de 1S42 à 1843, un poste au ministère des cultes. Enfin il obtint, en 1844, une chaire de professeur extraordinaire à la Faculté philosophique de Berlin. Il est, en outre, devenu, en 1863, secrétaire perpétuel de 1 Académie des beauxarts. Parmi ses nombreux ouvrages, nous citerons : Allain, poëme épique suivi de celui de Theudaline, reine des Lombards (Berlin, 1830) ; Antsus (Berlin, 1831) ; le Zénith de la philosophie du xixe siècle (Berlin, 1835) ; Poésies (Berlin, 1835) ; la Reine Berthe (Berlin, 1848) ; Theudelinde, épopée (Berlin, 1849) ; l’Empereur Charles, trilogie épique (Berlin, 1852) ; Firdousi, poème épique (Stuttgard, 1856) ; Fragments d’Archytas et de quelques autres anciens pythagoriciens (Berlin, 1841) ; Systèmes cosmiques des Grecs (Berlin, 1851) ; Présent et avenir de la philosophie allemande (Berlin, 1855) ; Ariadne ou l’Art tragique des Grecs considéré dans son développement et dans ses rapports avec la poésie populaire (Berlin, 1834) ; l’Elégie romaine (Leipzig, 1S3S-1839) ;

CRUT

De la théologie d’Hésiode, de sa corruption et de sa forme primitive (Berlin, 1831) ; Bauer et de la liberté de l’enseignement universitaire (Berlin, 1841) ; Liberté de l’enseignement et abus de la presse (Berlin, 1843) ; la Forêt des poètes allemands (Berlin, 1849, 3 vol.) ; Contes et histoires du peuple allemand (Berlin, 1854) ; l’Art du traducteur allemand (Hanovre, 1858) ; Reinhold Lens, sa vie et ses œuvres (Berlin, 1861), et Vies et œuvres des poêles allemands (Berlin, 1864 et années suiv.), grand ouvrage d’histoire et de critique littéraire. M. Gruppe a aussi collaboré à l’Almanach des Muses du poète Chamisso, et, depuis 1850, il est l’éditeur d’un Almanach des muses allemandes.

GRUPPETTO s. m. (group-pét-to — mot ital). Mus. Agrément du chant consistant en trois ou quatre petites notes ascendantes ou descendantes, dont la valeur se prend en avant de la note qui en est affectée, quelquefois sur la note même, il PI. gruppetti.

GRURIN s. m. feru-rain). Econ. rur. Nom qu’on donne aux fromagers dans le Doubs : Les associés prennent presque toujours un grurin ou fromager à leurs gages. (A. Hugo.)

GRURY, village et commune de France (Saône-et-Loirej, cant. d’Issy-l’Evêque, arrond. et à 50 kilom. d’Autun, sur le ruisseau de Valence, près d’un bel étang ; 1,151 hab. Dans les environs, trois hautes collines portent les ruines pittoresques d’anciens châteaux forts, dont l’un appartenait, au xme siècle, aux sires de Bourbon.’ Deux tumuli bien conservés. Vestiges d’un camp.

GRUS s. m. pi. (gru). Econ. rur. Sorte de laitage suisse.

GRTJSELLE s. f. (gru-zè-le). Vitic. Variété de raisin.

GHUS1E ou GRUS1NIE, nom russe de la

GÉORGIE.

GRUSSAU, village de Prusse, prov. de Silésie, régence de Liegnitz, près de Landshut ; 325 hab. Abbaye de cisterciens fondée, en 1240, par Henri II, et supprimée en 1810. En 1246, les hussites, conduits par Jean Ziska, y massacrèrent soixante-douze moines. Dans

| la guerre de Trente ans, les Suédois incendièrent les bâtiments, qui furent reconstruits plus beaux et plus grands qu’ils ne l’avaient été par l’abbé Bernard Rosa. À l’apogée de sa puissance, l’abbaye ne posséda pas moins de deux villes et quarante villages. On y remarque l’église de Saint-Nepomuc, bâtie en 1728, et ornée de fresques par Brandi, Willman et Schœffer ; son orgue est le plus estimé de la Silésie. Non loin du couvent, dans les bâtiments duquel on a installé une filature de

■ laine et des métiers à lainages, se trouve, dans un joli bosquet, l’ermitage de Bethléem. À l’E. de l’abbaye, sur le mont Annaberg, chapelle que l’on visite en pèlerinage.


GRUTER ou GRUYTERE (Jean), en lat. Gruterus, savant humaniste et antiquaire d’origine hollandaise, né à Anvers en 1560, mort à Heidelberg en 1727. Son père, qui était bourgmestre d’Anvers, ayant embrassé la religion réformée, fut contraint de chercher un refuge en Angleterre. Sa mère, femme très-savante, lui enseigna les premiers éléments du latin et du grec ; il étudia ensuite à Cambridge et à Leyoe, et, dans cette dernière.ville, il publia ses premiers essais poétiques. Destiné d’abord à la jurisprudence, il préféra bientôt la philologie. Appelé à Wittemberg comme professeur d’histoiro, il se vit obligé de résigner ses fonctions parce qu’il n’avait pas voulu changer de religion. Il enseigna quelque temps à l’université de Rostock et passa ensuite à celle de Heidelberg, où il fut aussi conservateur de la bibliothèque Palatine, une des plus riches de l’Europe. En 1622, lors de la prise de Heidelberg, il eut la douleur de voir piller sa bibliothèque particulière et enlever celle dont il était conservateur et qui fut transportée à Rome. Il erra alors de ville en ville et composa des élégies latines sous le titre de Larmes (Threni). Selon les uns, il mourut en 1B27, pendant ses pérégrinations, au moment où l’université de Groningue venait de lui adresser un appel ; selon d’autres, il était déjà revenu à Heidelberg ; cette opinion est la plus probable.

Les poésies latines de Gruter, fort vantées par Burmann, n’ont cependant pas un grand intérêt. Les premières parurent à Leyde, en 1587, sous le titre de : Pericula. Ses ouvrages savants ont plus d’importance. Ce sont d abord des Observations et conjectures sur les auteurs latins (Suspicionum libri ZA’fWitteinberg, 1591]) ; puis un commentaire sur Sénèque (1594), que Scaliger appelle n un labeur d’escholier ou d’imprimeur. • Gruter publia ensuite des choix de poëmes latins d’auteurs modernes, sous le titre de : Delicix poetarum gallicorum, italicorum, belgicorum, qu’il signe de l’anagramme Ruhuilub G»m ; les Delicise poetarum germanicorum parurent sous les initiales A. F. G. G. Une œuvre de plus longue haleine et qui a quelque analogie avec les Trésors de Gronov et de Grœvius est la Lampas, sive fax artium liberalium, publiée I d’abord k Francfort (1603-1612, 6 vol., plus un 78 en 1634), reproduite à Palerme (1837-1747, 3 vol. in-fol.). C’est un recueil de dissertations des principaux humanistes, embrassant toutes les époques de la philologie. Le septième volume a été publié par Parcus et contient, entre autres, une dispute sur

GRUY

Plaute, dans laquelle Gruter est attaqué très-vivement. Il donna aussi, sous le pseudonyme de Job. Giiniiticrus, sen Chronicon chronicorum (Francfort, 1614, 4 vol. in-8o). Enfin on a encore de lui une Ribliotheca exulum (Strasbourg, 1624, in-12). Mais l’œuvre capitale de Gruter, celle qui lui a donné la plus grande renommée, est son l’résor des inscriptions latines (Thésaurus inscriptionum [Heidelberg, 1601, in-fol.]), entrepris à l’instigation de Scaliger, qui rédit-ea lui-même les tables, indispensables aux «avants qui veulent consulter ce recueil. Cette publication eut aussitôt l’approbation de tous les érudits. Les louanges arrivèrent même aux oreilles de l’empereur, qui voulut dscerner à Gruter une récompense tout à fait exceptionnelle et le nomma comte palatin ; un is sa mort subite l’empêcha de signer le diplôme, et Gruter, plus modeste que la plupart des savants de nos jours, qui travaillent bi>3n plus dans les antichambres que dans leur cabinet, ne réclama pas auprès du successeur les titres qu’on lui avait promis.


GRÜTLI ou GRÜTLY (le), endroit célèbre dé la Suisse, dans le canten d’Underwald, vis-à-vis de Brunnen, dans lu bassin d’Altorf. Trois habitants de ces vallées, Stauffacher de Schwitz, Fürst d’Uri, Melchthal d’Underwald, chacun suivi de dix amis de son choix, se réunirent la nuit dans un endroit écarté (le Grütli) et jurèrent de soutenir la cause commune de leur liberté sans répandre de sang et sans porter atteinte aux droits d’autrui. Leur entreprise fut couronnée de succès ; les trois cantons, animés d’un même sentiment, prirent les armes et, en 1308, chassèrent, sans éprouver de résistance, les maîtres nouveaux qu’on leur avait envoyés. Les Suisses furent favorisés dans leur révolte par la mort d’Albert Ier, après lequel Henri VII de Bavière, ayant fait asseoir une nouvelle maison sur le trône d’Allemagne, ne songea pas à venger la défaite de la famille des Hapsbourg. Le fils d’Albert Léopold, duc d’Autriche, réunit, il est vrai, une armée pour soumettre les paysans qui s’étaient soulevés contre son père. Il envahit leur pays ; mais lorsque, en 1315, il eut été défait à Morgarten par un peuple décidé à périr plutôt qu’à supporter l’esclavage, il se retira sans espoir et ne songea plus à revenir exposer ses soldats si loin de ses États héréditaires.

Le Grütli est adossé aux montagnes du canton d’Underwald ; il n’est accessible que par eau. On ne peut ni monter ni descendre le long des grands rochers au devant desquels il forme la seule marge qu’on trouve dans le bassin d’Altorf, du même côté du lac. Les hérons qui volent sur cette nappe solitaire n’ont pas, hormis ce seul endroit, un pouce de terre où ils puissent poser à sec leur pied léger. Là, une verdure fraîche et riante est sans cesse entretenue par l’humidité des trois ruisseaux qui vont mêler leurs eaux à celles du lac. Des arbustes épais semblent faire une palissade naturelle à cet abri écarté, où quelques arbres répandent leur ombre. Les couches de calcaire mises à nu par les convulsions du globe laissent voir leurs assises déchirées et repliées sur elles-mêmes par l’effet d’une tourmente furieuse. On dirait qu’on assiste encore au moment solennel où ces masses se sont soulevées avec fracas et se sont tordues sous l’effort de la tempête. La nature, par sa révolte, semblait préluder en ces lieux à celle des hommes, et le coin verdoyant qu’elle lui a ménagé au pied des éternels monuments de sa colère est comme le dernier asile où le lion acculé a délibéré avec lui-même de vendre chèrement sa vie, et d’où il s’est précipité sur les chasseurs pour les repousser hors de son empire envahi. C’est de là que la liberté moderne s’est élancée pour faire le tour du monde.


GRUYER, ÈRE adj. (gru-ié è-re — rad. grue). Fauconn. Qui a rapport à la grue. || Faucon gruyer, Faucon dressé pour chasser la grue. || Faisan gruyer, Faisan qui ressemble à la grue. || s. m. Oiseau dressé pour la chasse aux grues : Un bon gruyer.

— Féod. Titre donné aux seigneurs qui avaient des droits sur les bois de leurs vassaux : Seigneur gruyer. || s. m. juge qui prononçait en première instance sur les délits commis dans les bois ou sur les rivières.


GRUYER (Antoine, baron), général français, né à Saint-Germain (Haute-Saône) en 1774, mort à Strasbourg en 1822. Parti comme capitaine dans un bataillon de volontaires, il fit la guerre de la révolution, fut blessé à Fleurus et à Austerlitz (1805). Il fut nommé lieutenant-colonel dans la garde en 1806, colonel après la campagne de Prusse et de Pologne en 1808, aide de camp du prince Borghèse, et général de brigade en 1813. Cette même année, attaqué à Interbroch, près de Tœplitz, et isolé des autres corps de la grande année, il se mit en retraite, marcha en carré, fit à la baïonnette une trouée à travers l’ennemi et parvint à rejoindre l’armée française. Bientôt après, il était blessé à Leipzig. Encore convalescent, il prit le commandement d’une brigade et combattit à Montmirail, à Château-Thierry, à Champaubert, à Montereau, reprit aux Russes Méry-sur-Seine et fut transporté à Paris dangereusement blessé. Il accepta des Bourbons le commandement du département de la Haute-Saône, mais, au retour de l’île d’Elbe, se rallia à Na-