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Méré (1563). À de grand talents militaires, à l’insatiable ambition de sa maison, il joignait quelque grandeur dans le caractère, que ses cruautés envers les protestants font malheureusement oublier. Il a laissé les matériaux de Mémoires intéressants, qui ont été insérés dans la collection Michaud et Poujoulat.


GUISE (Charles DE), cardinal de Lorraine, frère du précédent. V. Lorraine.


GUISE (Louis Ier DE LORRAINE, cardinal DE), frère des précédents, né en 1527, mort à Paris en 1578. Dès sa jeunesse, il fut destiné à l’état ecclésiastique, et à peine eut-il reçu les ordres qu’il fut nommé évêque de Troyes, puis d’Albi. Ensuite il devint archevêque de Sens, mais se démit en faveur du cardinal Pellevé. En 1552, il reçut le chapeau de cardinal, et quelque temps après il fut nommé évêque de Metz. Il avait peu d’ambition et passait pour aimer surtout la bonne chère et le bon vin.


GUISE (Claude DE), abbé de Cluny, né vers 1540, mort en 1612. Il était fils naturel du premier duc de Guise, Claude de Lorraine, et fut élevé par les soins de Charles, cardinal de Lorraine. Après avoir embrassé l’état ecclésiastique, il devint, en 1574, abbé de Cluny. Il n’avait guère de scrupules, surtout en matière d’argent, et trouvait bons tous les moyens de s’en procurer. C’est ainsi qu’à l’époque de la Saint-Barthélemy on ne massacra dans sa circonscription que les huguenots qui ne furent pas assez riches pour racheter leur vie. Un pamphlet, publié d’abord sous le titre de Légende de saint Nicaise (1574), puis sous celui de Légende de dom Claude de Guyse, abbé de Cluny (1581), l’accuse d’avoir empoisonné, pour devenir abbé de Cluny, son oncle le cardinal de Lorraine, et prétend qu’au lieu d’être le fils du duc de Guise il était celui d’un palefrenier.


GUISE (Henri Ier DE LORRAINE, duc DE), dit le Balafré, fils de François de Lorraine, né en 1550, assassiné à Blois en 1588. Il hérita de l’influence de son père sur le parti catholique, se signala contre les protestants à Jarnac et à Moncontour (1560), et dirigea le massacre de la Saint-Barthélémy, pendant lequel il joua un rôle actif. Ce fut lui qui conduisit les assassins à la demeure de l’amiral de Coligny. Il attendit dans la cour jusqu’à ce qu’on eût jeté le cadavre à ses pieds. En 1575, dans un combat contre les huguenots, à Dormans, il fut blessé au visage d’un coup de feu, et reçut, dès lors, ce surnom de Balafré sous lequel il devint si populaire. L’année suivante, il contribua à la formation de la sainte Ligue, dont le but apparent était la défense de la religion catholique, mais dont il comptait se faire un instrument pour arriver au trône. Les Guises prétendaient, en effet, descendre directement de Charlemagne par Lother, duc de Lorraine, et considéraient les capétiens comme usurpateurs. Cette thèse se trouve développée dans quelques pamphlets du temps, et surtout dans un mémoire adressé à Grégoire XIII, et trouvé dans les papiers d’un avocat de la Ligue mort à Lyon. C’est surtout après la mort du duc d’Anjou (1584), événement qui promettait le trône à un calviniste, à Henri de Navarre, que le duc de Guise, soutenu par la puissante association catholique, dissimula à peine ses projets. Fort de l’appui du pape et de l’or de l’Espagne, il se trouva en état de lutter contre Henri III lui-même, devenu un objet de mépris pour les protestants et pour les catholiques, à cause de ses continuelles irrésolutions. Après avoir soulevé la Champagne et la Picardie, et battu à Vimory et à Auneau (1587) les protestants allemands accourus au secours de leurs coreligionnaires de France, Guise entre en triomphe à Paris, malgré la défense expresse du roi, voit le peuple se soulever en sa faveur dans la fameuse journée des Barricades (12 mai 1588), et assiéger Henri III dans son Louvre ; mais l’audace faillit à son ambition, et il n’osa se saisir de cette couronne qu’il convoitait avec tant d’ardeur et qu’un peuple enthousiaste lui offrait. Maître de Paris, pendant que Henri s’en échappait, il négocia au lieu d’agir, et se contenta du titre de lieutenant général du royaume, espérant ressaisir une occasion qui ne renaîtra jamais pour lui. Quelques mois plus lard, il fut assassiné aux états de Blois, par ordre du roi, et dans les appartements mêmes du château (1588). Jusqu'à la fin, il avait méprisé les avis secrets qu’on lui avait fait parvenir sur les projets meurtriers de la cour. « On n’oserait ! » disait-il ; et il alla lui-même au-devant des assassins avec une sécurité insouciante, où il y avait encore plus d’ostentation que de véritable grandeur. « Plus d’orgueil que d’audace, plus de présomption que de génie, plus de mépris pour le roi que d’ardeur pour la royauté, voilà ce qui apparaît dans la conduite du duc de Guise. Il intriguait à cheval comme Catherine dans son lit... Il avait toute une religion et toute une nation derrière lui, et des coups de poignard firent le dénoûment d’une tragédie qui semblait devoir finir par des batailles, la chute d’un trône et le changement d’une race. • (Chateaubriand.)

Guise (l’assassinat du duc de), tableau de Paul Delaroche, V. assassinat.


GUISE (Louis II DE LORRAINE, cardinal DE), frère du précédent, né à Dampierre en 1555, assassiné à Blois en 1588. Il devint archevêque de Reims à la mort de son oncle, le second cardinal de Lorraine (1574), et reçut, en 1578, le chapeau de cardinal. Il prit une grande part aux intrigues de la Ligue, et se rendit presque aussi odieux à Henri III que son frère lui-même, Guise le Balafré. Il assista aux états de Blois (1588), et comme il y présidait l’ordre du clergé, il osa blâmer publiquement le discours qu’avait prononcé le roi, et força le faible monarque à promettre que plusieurs passages de ce discours seraient retranchés.

Lorsque le duc de Guise fut massacré au moment où il allait entrer dans le cabinet du roi, le cardinal était dans la salle des états. Aux cris que poussait son frère, il se leva en disant : « Voilà mon frère qu’on tue. » On le retint et on le conduisit dans un galetas, où il resta enfermé le reste du jour. Avant de se décider à le faire périr, Henri III crut devoir, pour la forme, consulter son conseil : on lui dit que, si le cardinal était épargné, il deviendrait un nouveau danger pour l’État. Alors quatre hommes se chargèrent de le tuer moyennant 400 écus. L’assassinat eut lieu le 24 décembre 1588. Dans le cours de l’année suivante, plus de cent ouvrages parurent pour la justification des Guises et pour protester contre l’indigne conduite du roi.


GUISE (Catherine DE CLÈVES, duchesse DE), femme du Balafré, née en 1547, morte en 1633. Veuve en premières noces d’Antoine de Croy, prince de Porcien, elle se remaria en 1570 avec le duc de Guise ; mais cette seconde union n’arrêta pas le cours de ses galanteries, et elle n’en continua pas moins à être la maîtresse de Saint-Mégrin, qui fut tué par ordre du duc de Guise. Un mois après la mort de ce dernier, elle accoucha d’un fils, dont les Parisiens accueillirent la naissance avec enthousiasme. Après l’entrée de Henri IV à Paris, elle se rapprocha de ce prince, et fut bientôt en grande faveur à la cour. Elle mourut à un âge fort avancé, après avoir cherché à racheter par ses largesses aux églises les erreurs sans nombre de sa jeunesse.


GUISE (Charles DE LORRAINE duc DE), l’un des fils du Balafré, né en 1571, mort en Italie en 1640. Enfermé à Tours après le meurtre de son père, il parvint à s’échapper en 1531, et vint à Paris augmenter les divisions du parti de la Ligue en disputant l’influence à son oncle le duc de Mayenne. Il fut un moment question, dans les états de Paris, de l’élire comme roi, en le mariant à l’infante d’Espagne. Plus tard, il se rallia à Henri IV, qui lui donna le gouvernement de Provence, et qui lui dut la réduction de Marseille et la soumission du duc d’Épernon. Sous Louis XIII, il soutint le parti de Marie de Médicis, et fut obligé de s’exiler en Italie, où il mourut.


GUISE (Louis III DE LORRAINE, cardinal DE), frère du précédent, né en 1575, mort en 1621. Il embrassa de bonne heure l’état ecclésiastique, bien que ses inclinations le portassent plutôt vers l’art militaire, devint archevêque de Reims, puis cardinal en 1615. Six ans plus tard, il accompagna le roi dans son expédition du Poitou, et fut atteint, au siège de Saint-Jean-d’Angely, d’une maladie dont il mourut. Il avait eu de Charlotte des Essarts, maîtresse de Henri IV, cinq enfants, parmi lesquels trois fils. On dit qu’après la mort de Henri IV le cardinal s’était marié secrètement avec elle, et qu’on trouva dans ses papiers une dispense que le pape lui avait accordée.


GUISE (François-Alexandre-Paris DE LORRAINE, chevalier DE), frère des précédents, né en 1589, un mois après la mort de son père, mort en 1614. Sa naissance excita l’enthousiasme des Parisiens, consternés de la mort de leur grand Henri, ainsi qu’ils appelaient la victime de Blois, et l’orphelin fut adopté par la ville de Paris, dont il prit le nom. Le seul fait par lequel il soit connu est le meurtre qu’il commit en plein jour (1613) sur le vieux baron de Luz, qui avait eu connaissance de certains propos tenus par le duc contre la régente, et qui, serviteur dévoué de cette dernière, n’eut pas manqué de les lui révéler. De peur d’exciter de nouveaux troubles, le parlement laissa ce meurtre impuni. Quelques jours après, le chevalier tua le fils du baron de Luz, qui l’avait appelé en duel pour venger la mort de son père. L’année suivante, ce prince mourut d’un accident, que l’on regarda comme une punition du ciel.


GUISE (Henri II DE LORRAINE, duc DE), l’un des fils du duc Charles de Guise et neveu du précédent, né à Blois en 1614, mort en 1664. Archevêque de Reims à quinze ans, et possesseur de nombreux bénéfices ecclésiastiques, il renonça à la prélature, lorsque la mort de son frère aîné l’eut mis en possession du titre de duc de Guise. Il s’est rendu célèbre par ses nombreuses galanteries et l’éclat de ses aventures. Engagé dans le parti du comte de Soissons, il dut s’exiler pour échapper à une condamnation capitale (1641), se jeta dans Naples (1647), après l’insurrection de Masaniello, afin de disputer ce royaume à l’Espagne, faisant ainsi valoir une vieille prétention de sa famille, fut nommé généralissime par les Napolitains, mais fut fait prisonnier en 1648, et demeura en Espagne jusqu’en 1652, époque où le prince de Condé obtint sa liberté. À peine en France, il se jeta dans le parti des frondeurs, qu’il trahit deux mois plus tard, en se réconciliant avec la cour, fit une nouvelle tentative sur Naples en 1554, mais ne parvint pas à s’y maintenir, et fut créé chambellan à son retour en France. Il a laissé des Mémoires sur sa première expédition de Naples.


GUISE (Louis-Joseph de Lorraine, sixième duc DE), neveu du précédent, né en 1630, mort en 1671. Il était fils de Louis de Lorraine, duc de Joyeuse, et hérita du titre de duc de Guise à la mort de son oncle (1664). En 1667, il épousa Élisabeth, fille de Gaston, duc d’Orléans, de laquelle il eut un fils, en qui s’éteignit l’illustre maison des Guises (1675). Les titres et les biens de cette famille passèrent alors à Marie de Lorraine, fille de Charles, quatrième duc de Guise, laquelle mourut, sans avoir été mariée, en 1688.


Guises (LES), les Valois et Philippe II, par M. Joseph de Croze (Paris, 1866, 2 vol. in-8°). C’est un ouvrage des plus intéressants pour l’étude des guerres de religion en France. Cette histoire, qui s’étend depuis le commencement du règne de Henri II, en 1547, jusqu’à l’assassinat de Henri IV, en 1610, a été faite avec les correspondances des princes de la maison de Lorraine, dont la majeure partie était inédite. Voici en quels termes l’auteur expose lui-même le but qu’il s’est proposé en écrivant cet ouvrage. « J’espère, dit-il, que ce récit où les principaux acteurs du drame se retrouvent, les uns, comme les Guises, avec leur âme ardente, leur ambition inquiète, leurs projets aventureux, leurs sentiments superbes et vaillants ; les autres, comme Catherine de Médicis et Henri III, avec leur esprit, leur adresse, leur perfidie, leurs embarras, et le plus grand de tous, Philippe II, avec ses lenteurs, ses indécisions, ses défiances, ses promesses, ses dissimulations, ne paraîtra ni dénué d’intérêt, ni inutile à l’histoire. » M. de Croze, dans cette phrase, a bien résumé et caractérisé son ouvrage : c’est un drame du plus grand intérêt, très-varié, avec des péripéties diverses. Grâce à ces correspondances, nous connaissons tous les ressorts qu’on va mettre en jeu. De là vient peut-être un défaut qu’on pourrait reprocher à M. de Croze : son histoire n’est pas assez synthétique ; l’auteur suit les événements pas à pas, et l’on voudrait souvent comprendre l’idée générale qui les lie entre eux ; il n’y a pas de vue d’ensemble ; on se perd un peu dans les détails, on ne s’élève pas assez à une conception générale qui domine l’œuvre. Mais ce défaut est racheté par de nombreuses qualités, et cet ouvrage fait honneur à l’érudition française.


GUISEAU s. m. (ghi-zô), Ichthyol. Variété de l’anguille commune.

GUISLAIN (saint), fondateur de l’abbaye du même nom dans le Hainaut. V. Ghislaine

GUISNÉE, mathématicien français, mort en 1818. Il eut pour maître Varignon, qui le fit admettre parmi les élèves de l’Académie des sciences (1702), devint professeur, ingénieur ordinaire du roi, et fut reçu, en qualité de mécanicien pensionnaire, au nombre des membres de l’Académie, en 1707. Outre plusieurs mémoires insérés dans le Jïecueil de l’Académie des sciences, on a de lui : Application de l’algèbre à la géométrie ou Méthode de démontrer par l’algèbre les théorèmes de géométrie, etc. (Paris, 1705). Dans ce traité, qui eut beaucoup de succès et fut plusieurs fois réédité, Guisnée a adopté, comme le meilleur moyen de construire les équations, le procédé déjà indiqué par Descartes.

GUISPON s. m. (ghi-spon). Mar. Autre forme du mot gcipon.

GUISSE s. f. (ghi-se). Bot. Nom vulgaire de la gesse.

GU1SSEKY, bourg et commune de France (Finistère), cant. de Lamiilis, arrond. et k 36 Uilom. N.-E. de Brest, au bord de l’Océan ; pop. aggl., 1,939 hab. — pop. tôt., 3,014 hab.

GU1SSONA, autrefois Cissa, bourg d’Espagne, prov. de Lérida, k 13 kiloin. N.-E. de Cervera ; 2,300 hab. Ruines romaines et mauresques.

GUITARE s. f. (ghi-ta-re — du gr. kilhara, lat. cithara, dont les Allemands ont’fait citlier ou zither, les Espagnols guitarra, les Italiens cetra, ehitarra, chitarrone, quinterna, les Flamands cieter, et les Français guisterne, gui~ guergne, guilarne, guitterre, guiterne et guitare). Mus. Instrument k six cordes, d une forme k peu près semblable k celle du violon, et qui se joue en pinçant les cordes avec les doigts : En Espagne, on a longtemps pincé la guitare sous ta fenêtre de la dame de ses pensées. Beaumarchais a montré à jouer de la guitare aux filles de Louis XV' ; par là, il s’est fait bien venir des courtisans. (St-Marc Girard.) À Malte, on joue de la guitare dans les rues. (Th. Gaut.)

La guitare amoureuse exprime la tendresse.

Thomas.

— Fam. Répétition, redite, refrain : C’est toujours la même guitare.

— Constr. Charpente formée de pièces Courbes, qu’on emploie pour soutenir les toits des lucarnes.

— Moll. Nom marchand d’une espèce de murex.

GUIT

— Encycl. Mus. La guitare est une variété de l’antique cithara. Ceux qui ont écrit en latin sur la musique désignent même généralement la guitare sous le nom de cil/tara, et, pour indiquer plus particulièrement l’espèce, sous celui de cithara Itispuuica, parce que la guitare dont on jouait en France no-vs venait d’Espagne.

La guitare était connue en Arabie dèi l’antiquité la plus reculée. De l’Arabie, elle se répandit chez les Turcs et les Persans, qui la transmirent aux Maures, lesquels, k leur tour, la tirent connaître aux Espagnols, dont elle devint l’instrument favori. Aujourd’hui, la guitare est le dernier vestige du luth.^ qui engendra lui-même le téorbe, le sistre, l’angélique, la nmndore, la pandore, le colachon, la mandoline et les lyres de toute espèce.

Au moyen Age, on distinguait deux sortes de guitares : la guitare latine et la guitare espagnole ou moresque, appelée en vieux français moresque ou morache. » Exigeant, dit Kastner, moins d’habileté que le luth, et offrant l’avantage d’être très-portative, la guitare a remplacé tous les instruments k cordes pincées et k manche anciennement en usage. Elle en a même détrôné un qui eut une grande vogue en Allemagne, au xvrs.et au xvne siècle, sous le nom de zither, cyiher ou citker, en français cistre... La principale différenee entre îe luth et la guitare consiste dans hi forme du corps sonore, arrondi et tnilladé k pans dans le luth, plat et uni en dessus et en dessous dans la guitare. Celle-ci, en outre, a des échancrures sur les côtés, que n’a pas le luth ; enfin, son manche, au lieu d’être renversé, est presque toujours droit, ou bien légèrement cintré et recourbé en dedans, k l’endroit où sont fixées les chevilles. Le manche ou touche de la guitare a. des cases ou divisions, ordinairement au nombre de huit, pour poser les doigts et varier les intonations des cordes. Les anciens modèles offrent, rarement plus de quatre cordes ; dans lu suite, il y en eut une cinquième et une sixième..... Les poëtes ont quelquefois parlé de leur gui-, tare comme ils auraient parlé de leur lyre et do leur luth, c’est-k-dire figurément et dans le sens d’inspiration poétique. »

Nous avons vu que c’est de l’Espagne que cet instrument fut importé en France ; l’usage en devint bientôt général, et les amoureux l’employaient pour accompagner les chansons amoureuses et donner des sérénades k leurs belles, ainsi que l’on fit plus lard avec la mandoline. Telle était sa destination du temps de Ronsard, lequel fait dire ktin amant malheureux, réduit k toutes sortes de résolutions désespérées k l’égard de sa maîtresse, qu’il n’ira plus sonner a son huys de sa guiterne, ni pour elle les nuits dormir à terre. Les jeunes gens des deux sexes cultivaient k l’envi cet instrument, parce qu’il était beaucoup plus facile d’en jouer que du luth, et il devint promptement populaire au détriment de celui-ci. Aussi Bonaventure des Périers écrivait-il, vers 1550 : « Depuis douze ou quinze ans en çk, tout notre monde s’est mis k guiterner, le lue (luth) presque mis en oubli, pour être en la guiterne je ne sais quelle musique, et icelle beaucoup plus aisée que celle-là du lue... en manière que trouverez aujourd’hui plus de guiterneurs en France qu’en Espagne. » "

Le caractère vraiment populaire de l’instrument ne l’empêcha cependant pas, sous le règne de celui qu’on appelait le « grand roi, ■ d’être en haute faveur auprès des grandes dames et des seigneurs de la cour ; si bien que Hamilton, dans ses Mémoires de Grammont, dit, en parlant d’une sarabande qui faisait alors fureur : « Toute la guitarerié*de la cour se mit k l’apprendre, et Dieu sait la raclerie universelle que c’était. » Le Sage, de son côté, pour faire entendre qu’une femme avait été belle, dit qu’on jugeait encore k ses traits « qu’elle avait dû faire racler bien des guitares, à Cette vogue, après avoir duré si longtemps, s’épuisa pourtant tout d’un coup, k partir de la hn du règne de Louis XV ; mais la guitare reprit faveur, lors de l’établissement du premier Empire, sous les doigts de virtuoses très-habiles, dont le talent donnait le change sur ia valeur, en réalité très-inince, de cet instrument flasque, sans consistance, et qui joint k ces défauts un manque de caractère presque absolu. La guitare fait cependant un bon effet dans l’accompagnement des voix, qu’elle soutient sans les fatiguer ni les couvrir. Mais cet instrument se refuse k dessiner un chant, et, si l’on abandonne les arpèges de plusieurs cordes pour l’unisson, il ne reste plus qukm faible pizzicato maigre et sec.

Cette fois encore, la guitare fut adoptée par les dames du monde, qui trouvaient la harpe trop difficile et trop fatigante ; ce regain de succès fut cependant de très-courte durée, et, au bout de quelques années, il était d’autant moins question de la guitare que le piano s’implantait victorieusement, et que l’instrument nouveau, k la fois complet, puissant, varié, utile et agréable, faisait bientôt taire toutes les rivalités. Aujourd’hui, la guitare est, depuis longtemps, abandonnée, et rien ne fait présumer, malgré le culte de quelques fanatiques, qu elle puisse jamais retrouver l’ombre même de ses succès passés.

Mais il est temps de décrire enfin l’instrument dont nous venons de faire 1 historique. La guitare, nous l’avons déjà dit, est montée de six cordes, destinées k être pin-