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VIE DE FAMILLE ET DE COUR.

et il ne fait que prendre des notes pour le travail commun. De là les longues lettres où il lui raconte en détail ce dont il est témoin. Il semble qu’il s’aguerrisse peu à peu, et il supporte les ennuis de sa charge avec beaucoup de simplicité, sans songer le moins du monde à s’en faire honneur. Surtout il s’informe avec la plus grande conscience. « Je vois bien, écrit-il, que la vérité qu’on nous demande tant est bien plus difficile à trouver qu’à écrire. » Pour peu qu’elle soit fâcheuse, celui qui la sait « se serre les lèvres tant qu’il peut de peur de la dire ». Il trouve, cependant, de précieuses facilités auprès de Vauban et de Luxembourg. Vauban lui parle à cœur ouvert de la politique étrangère, dans une admirable lettre toute frémissante de patriotisme et d’honneur. Luxembourg, « plus aimable à la tête de sa formidable armée qu’il n’est à Paris et à Versailles », lui envoie « un de ses plus commodes chevaux ».

La mort de Racine et la santé de Boileau les empêchèrent de terminer leur tâche, et ce qu’ils avaient écrit, conservé par Valincourt, fut brûlé en 1726 dans l’incendie de sa maison. Cette perte est des plus regrettables. Assurément, il n’y aurait eu dans cette histoire ni critique ni liberté, mais, traitée par de tels écrivains, elle aurait renfermé de belles pages. Racine avait fini, comme il le dit lui-même, par prendre un grand plaisir à ce qu’il voyait. Il le prouve par sa correspondance, où se trouvent des récits d’un vif intérêt, des tableaux d’un dessin ferme et d’une couleur juste. Celui de la prise de Namur égale les meilleures relations militaires. De