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ces traits ; mais il en a conserva le principal en montrant Achille « bouillant ». Si même il atténue Euripide, il donne à l’amant d’Iphigénie une générosité de sentiments, une fierté de langage et un accent dans la menace qui atteignent tout ce que les contemporains pouvaient admettre dans une querelle entre un prince et un roi.

Hippolyte, lui, ne ressemble plus du tout au modèle d’Euripide. Dans l’état des croyances, des mœurs et du goût, le mystique adorateur de Diane et le chasseur fidèle au vœu de chasteté n’auraient pas été compris. C’est ce que Racine faisait entendre lorsqu’il répondait au reproche d’en avoir fait un amoureux : « Qu’auraient dit nos petits maîtres ? » Outre qu’il avait besoin de cet amour pour provoquer la jalousie de Phèdre, il offrait à un public poli et chrétien ce qu’il pouvait comprendre et sentir. Pour rester dans la donnée d’Euripide, il aurait dû faire d’Hippolyte un jeune moine ou un chevalier de Malte, c’est-à-dire tout autre chose qu’un prince de tragédie. La transposition admise, il devait créer un personnage différent de celui d’Euripide. C’est ce qu’il a fait, et son héros vaut le héros grec. Les deux scènes avec Phèdre et avec Thésée, la seconde surtout, remplacent la simplicité grecque par des qualités d’un prix égal.

Lorsque ces amoureux se trouvent dans des situations sacrifiées, ou même fausses, comme Titus et Bajazet, des accents de tendresse douloureuse et de fière indignation finissent toujours par les relever. On pardonne beaucoup à Titus pour la peinture qu’il fait de Bérénice. Bajazet surtout est d’une