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RACINE.

plus pur, il y mêlait intimement celle de la France monarchique et chrétienne. Il y était encore plus inventeur que dans Iphigénie et Phèdre, où il suivra Euripide de près. Il s’égalera, mais ne se surpassera point, pour la connaissance du cœur, l’habile conduite de l’action, l’énergie et l’harmonie du style.

La duchesse d’Orléans, Henriette d’Angleterre, s’était intéressée à Andromaque avant même la représentation. En lui dédiant sa pièce, le poète se faisait honneur de cet intérêt : « On savoit que Votre Altesse Royale avoit daigné prendre soin de la conduite de ma tragédie. On savoit que vous m’aviez prêté quelques-unes de vos lumières pour y ajouter de nouveaux ornements. » La première, elle l’avait « honorée de quelques larmes ». Cette sorte de collaboration et le suffrage d’une princesse que la cour regardait « comme l’arbitre de tout ce qui se faisoit d’agréable » expliquent que la pièce ait eu l’honneur d’être représentée à la cour, aussitôt après la première représentation à la ville, peut-être même avant.

Le succès fut grand, mais contesté, comme il le sera toujours pour Racine, et, à son ordinaire, le poète ne put se tenir de répondre à ses détracteurs. Il en est deux, le duc de Créqui et le comte d’Olonne, dont il a marqué les noms par deux épigrammes effrayantes de hardiesse. Le grand Condé, qui depuis Alexandre montrait beaucoup de bienveillance à Racine et qui le recevra parmi les familiers de Chantilly, aurait trouvé Pyrrhus « trop violent et trop emporté ». Peut-être Racine faisait-il allusion à ce reproche dans la préface de sa pièce en disant :