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RACINE.

qui portoient des girandoles de cristal, allumées de plusieurs bougies. Celte allée finissoit par un portique de marbre ; les pilastres qui en soutenoient la corniche éioient de lapis, et la porte paroissoit toute d’orfèvrerie. Sur ce théâtre,… la troupe des comédiens du Roi représenta la tragédie d’Iphigénie, dernier ouvrage du sieur Racine, qui reçut de toute la cour l’estime qu’ont toujours les pièces de cet auteur.

Une suite d’estampes gravées par Lepautre nous montre les six journées des fêtes. On y voit les représentations de l’Alceste de Quinault et du Malade imaginaire de Molière. Il est regrettable que l’artiste ne nous ait pas laissé également celle d’Iphigénie. Du moins nous a-t-il conservé le somptueux décor dans lequel « le roi des rois » parut devant Louis XIV.

Le succès fut éclatant et unanime, un succès d’émotion que Robinet constatait en son style burlesque : La cour, dit-il, fut « toute pleine de pleureurs ». Paris voyait à son tour la nouvelle pièce dans les premiers jours de janvier 1675 et lui faisait le même accueil que Versailles. Boileau a consacré le souvenir des pleurs versés devant cet « heureux spectacle ». La critique était réduite à se taire. Un acharné détracteur du poète, Barbier d’Aucour, dans son Apollon charlatan, continuait ses froides plaisanteries sur d’autres thèmes, mais, pour Iphigénie, il lui était impossible, malgré qu’il en eût, de nier l’évidence :

Elle fait chaque jour par des torrents de pleurs
Renchérir les mouchoirs aux dépens des pleureurs.

Un jésuite homme de goût, Pierre de Villiers, constatait que, en concentrant l’intérêt sur un rôle