Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome I.djvu/439

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joue rasée, il se fait une évolution complète pour faire l’autre, chacun changeant de côté.

L’Empereur se lave ensuite la figure et très souvent la tête dans un grand lavabo d’argent f, fixé dans l’encoignure de la chambre, et apporté de l’Élysée. Vient ensuite l’histoire des dents, après quoi l’Empereur quitte son gilet de flanelle. Il est fort gras, peu velu, a la peau blanche ; et présente un certain embonpoint qui n’est pas de notre sexe ; ce qu’il observe parfois gaiement. L’Empereur se frotte alors la poitrine et les bras avec une brosse assez rude, la donne ensuite à son valet de chambre, pour qu’il lui frotte le dos et les épaules, qu’il arrondit à cet effet, lui répétant d’ordinaire quand il est de bonne humeur : Allons fort, comme sur un âne. Il s’inondait ensuite d’eau de Cologne, tant qu’il en a eu à sa disposition ; mais il en a bientôt manqué, et, ne s’en trouvant point dans l’île, il a dû se réduire à l’eau de lavande, ce qui a été pour lui une privation réelle.

Quand il était en gaieté ou sans préoccupation, il lui arrivait d’ordinaire, à la fin du frottage de ses épaules, comme à chaque évolution pour les deux côtés de sa barbe, de considérer en face, quelques secondes, le valet de chambre en service, et de lui appliquer ensuite une bonne tape sur les oreilles, en l’accompagnant de quelques mots de plaisanterie.