Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome I.djvu/602

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que j’étais le premier homme de France ; aussi, ne se sont-ils jamais cru d’autre état que celui dont ils ont joui au temps de ma puissance.

Jérôme était un prodigue dont les débordements avaient été criants. Son excuse peut-être pouvait se trouver dans son âge et dans ce dont il s’était entouré. Au retour de l’île d’Elbe, il semblait d’ailleurs avoir beaucoup gagné et donner de grandes espérances ; et puis, il existait un beau témoignage en sa faveur, c’est l’amour qu’il avait inspiré à sa femme ; la conduite de celle-ci, lorsqu’après ma chute, son père, ce terrible roi de Wurtemberg, si despotique, si dur, a voulu la faire divorcer, est admirable. Cette princesse s’est inscrite dès lors de ses propres mains dans l’histoire. »

À notre grand regret, on est venu annoncer le dîner. L’Empereur a continué d’être fort causant toute la soirée, parcourant comme en famille une foule d’objets divers, principalement la conduite d’un grand nombre de personnages pendant son absence et lors de son retour. Il ne s’est retiré qu’à minuit, et en terminant par ces paroles :

« Qu’est en ce moment la France, Paris ? et que sera-t-il de nous d’aujourd’hui à un an ?… »


L’empereur endormi – Maximes morales et politiques de Napoléon.


Lundi 20.

L’Empereur est monté en calèche de fort bonne heure. Au retour, vers trois heures, il m’a fait suivre dans sa chambre. « Je suis triste, ennuyé, souffrant, m’a-t-il dit ; asseyez-vous dans ce fauteuil, tenez-moi compagnie. » Il s’est étendu sur son canapé et a fermé les yeux ; il s’est en-