Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome II.djvu/282

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J’en veux bien à l’état de mes yeux, qui, m’empêchant d’écrire, me privait la plupart du temps de cette bonne fortune.

Voici ce qu’il s’est trouvé dicter lorsque les papiers ministériels anglais parlaient de grands trésors que Napoléon devait posséder, et qu’il tenait sans doute cachés.

« Vous voulez connaître les trésors de Napoléon ? ils sont immenses, il est vrai, mais sont exposés au grand jour. Les voici : le beau bassin d’Anvers, celui de Flessingue, capables de contenir les plus nombreuses escadres et de les préserver des glaces de la mer ; les ouvrages hydrauliques de Dunkerque, du Havre, de Nice ; le gigantesque bassin de Cherbourg, les ouvrages maritimes de Venise ; les belles routes d’Anvers à Amsterdam, de Mayence à Metz, de Bordeaux à Bayonne ; les passages du Simplon, du mont Cenis, du mont Genèvre, de la Corniche, qui ouvrent les Alpes dans quatre directions, dans cela seul vous trouveriez plus de 800.000.000. Ces passages surpassent en hardiesse, en grandeur et en efforts de l’art tous les travaux des Romains. Les routes des Pyrénées aux Alpes, de Parme à la Spezzia, de Savone au Piémont ; les ponts d’Iéna, d’Austerlitz, des Arts, de Sèvres, de Tours, de Roanne, de Lyon, de Turin, de l’Isère, de la Durance, de Bordeaux, de Rouen, etc. ; le canal qui joint le Rhin au Rhône par le Doubs, unissant les mers de Hollande avec la Méditerranée ; celui qui unit l’Escaut à la Somme, joignant Amsterdam à Paris ; celui qui joint la Rance à la Vilaine ; le canal d’Arles, celui de Pavie, celui du Rhin ; le dessèchement des marais de Bourgoing, du Cotentin, de Rochefort ; le rétablissement de la plupart des églises démolies pendant la révolution, l’élévation de nouvelles ; la construction d’un grand nombre d’établissements d’industrie pour l’extirpation de la mendicité ; la construction du Louvre, des greniers publics, de la Banque, du canal de l’Ourcq ; la distribution des eaux dans la ville de Paris ; les nombreux égouts, les quais, les embellissements et les monuments de cette grande capitale ; ses travaux pour l’embellissement de Rome ; le rétablissement des manufactures de Lyon, la création de plusieurs centaines de manufactures de coton, de filature et de tissage qui emploient plusieurs millions d’ouvriers ; des fonds accumulés pour créer plus de quatre cents manufactures de sucre de betterave pour la consommation d’une partie de la France, qui auraient fourni le sucre au même prix que celui des Indes, si elles eussent continué d’être encouragées seulement encore quatre ans ; la substitution du pastel à l’indigo, qu’on fût venu à bout de se procurer en France à la même perfection et a aussi bon marché que cette production