Page:Lassalle - Capital et travail.djvu/13

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fouriériste) qui agitait déjà le prolétariat allemand et qui n’était pas prête à céder le pas à d’autres conceptions socialistes. Il paraît même que le prolétaire Weitling ne vit pas, sans quelque appréhension, cette invasion de philosophes et de savants dans le socialisme ; il craignit que ces fils de privilégiés ne diminuassent chez les ouvriers l’instinct de classe. Il se trompait toutefois, car ces hommes apportaient au prolétariat une conscience plus sûre de ses intérêts de classe (confondus avec les intérêts de l’humanité) et de sa mission historique.

Les nouveaux socialistes allemands apportaient non seulement une méthode scientifique nouvelle, mais un point de vue nouveau qui les distinguait des socialistes français.

Les premiers socialistes français partent en général de l’idée de justice subjectivement prise, et tous leurs efforts tendent à la réalisation d’un idéal de société parfaite telle qu’ils la conçoivent. Ils ont fait de la société actuelle une critique incomparable ; ils ont organisé des sociétés idéales où se reflète la générosité de leurs sentiments et leur immense amour pour l’humanité. Dans leurs recherches psychologiques, politiques, rationalistes et sociales, ils ont fait souvent des découvertes importantes, aperceptions de génie, qui restent acquises au socialisme expérimental[1]. Enfin, ils ont eu le très grand honneur de poser la question sociale devant le dix-neuvième siècle, et de passionner l’opinion publique pour elle.

Les socialistes allemands cherchent le fondement du socialisme dans les développements historiques :

  1. Les organisateurs pratiques du socialisme ont toujours beaucoup emprunté à Morelly et à Fourier. Après eux, comme fournisseur du matériaux, vient Owen.