Page:Lassalle - Capital et travail.djvu/21

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qu’il y avait organisées. Mais c’est à Francfort qu’eut lieu la grande bataille entre les progressistes (Sonnemann et Büchner) et Lassalle.

Ce dernier parla, à deux reprises et en deux jours, plus de huit heures ; il fut digne de lui-même et de sa cause : les 9/10 des auditeurs se prononcèrent pour lui. Lassalle comprenait que l’agitation doit être complétée par l’organisation, et, après une année d’une activité de toutes les heures, en ce sens, la Société générale des ouvriers allemands fut fondée (23 mai 1863). Il la dirigea lui-même et son activité sembla s’accroître avec la grandeur de la tâche.

Les progressistes, vaincus par l’orateur et l’agitateur socialiste, s’attaquèrent à l’écrivain. C’est le prudhommesque Schulze-Delitsch qui commença l’attaque. Dans sa Lettre ouverte Lassalle avait rendu hommage à ses bonnes intentions, mais Schulze osa, dans son Catéchisme des travailleurs, opposer aux théories socialistes de Lassalle ses rengaines coopératives.

La réponse fut rapide et foudroyante. Le coopératisme trompeur de l’économiste fut pulvérisé avec une maestria philosophique, une sûreté de pensée, une immensité d’érudition, une profondeur de vue et un éclat de style dont on a peu d’exemples ; le lourd juge de paix fut acculé à ce dilemme de devoir souscrire ou à sa mauvaise foi ou à sa profonde ignorance. On n’a pas d’exemple dans l’histoire de la littérature moderne d’une si complète exécution ; Schulze et ses partisans en restèrent comme atterrés.

Après ce succès décisif, on pouvait penser que le socialisme, ayant vaincu par la voix de son chef, allait absorber tout ce qu’il y avait de sincèrement démocratique parmi les partisans du coopératisme