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PIERRE LASSERRE

Le petit nombre de personnes qui avait eu l’indulgence de s’intéresser à cette étude, lors de sa première apparition, est averti que nous l’avons amendée et complétée autant qu’il était possible sans en altérer le premier accent. Travail délicat ! Car nous n’avions pas laissé passer pour parler de Nietzsche l’heure où nous subissions de sa part un tout nouvel et assez vif entraînement. Nietzsche nous a surtout aidé, ainsi que maint autre de notre génération, à rentrer en jouissance de certaines vérités naturelles. Mais comme ces vérités sont beaucoup plus vieilles que lui, on en arrive à oublier la fièvre qui accompagna cette récupération. Ce qu’on ne doit pas oublier, c’est qu’elle peut être communiquée avec fruit à des intelligences bien nées, mais profondément contaminées par les sophismes sur lesquels la critique de Nietzsche exerce l’action la plus corrosive.

Le nietzschéisme est moins une doctrine en effet qu’une crise, mais une crise salutaire. Il y a chez Nietzsche un contraste entre le fond des idées, classique, positif, traditionnel, et le ton, dont l’ardeur va souvent jusqu’au sar-