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LE ROMANTISME FRANÇAIS

vement aux choses, la nature qu’il nous flatte qu’elles aient, toute histoire naturelle, toute psychologie, toute politique et toute morale non fondées sur la prësupposition d’une harmonie idéale dans la nature, portant témoignag-e de la médiocrité de leur auteur : « Le véritable observateur, avoue Novalis, est celui qui sait découvrir l’analogie de la nature avec l’homme et celle de l’homme avec le ciel ».

Cette ingénuité à accommoder la vérité universelle aux désirs ducœur, estce que les Allemands nomment idéalisme. Et cet idéalisme à l’allemande entraîne le panthéisme. Je m’étonne que le critique cosmopolite Georg Brandes, qui entre avec une chaleur instructive dans les états d’âme ici recherchés, distingue si vivement celui-ci de celui-là (i). Un univers où tout est harmonieux et bon ne saurait comprendre aucune opposition de principes, aucune dualité ; il exclut notamment celle du connaissant et du connu. Et, pour mériter des transports, il faut bien qu’il soit divin. Il y a un autre idéalisme, celui des Platon, des Malebranche, selon lequel il nous est donné de participer à l’essence divine, mais par les contemplations abstraites et impersonnelles de l’intelligence, les émotions de la sensibilité étant tenues pour l’élément inférieur et impur de notre nature. C’est tout au contraire par les émotions que l’idéaliste allemand se sent en rapport direct avec le divin, et d’autant plus que l’imagination les amplifie davantage, qu’elles ont, avec un objet moins précis, un plus grand empire, qu’elles sont en un mot plus passives. « La musique (on prêle ce

(i) HauptMlrômangen, i. l, p. aoS.