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lettres coréennes ; ils s’en servent pour leur correspondance, leurs livres de compte, etc. Tous les livres de religion imprimés par les missionnaires sont en caractères coréens. Aussi presque tous les chrétiens savent lire et écrire leur langue, en lettres alphabétiques, que les enfants apprennent très rapidement.

Cette rareté des livres coréens, le peu de cas que les lettrés font de leur langue nationale, et surtout la législation barbare qui interdit l’accès du pays à tout étranger sous peine de mort, sont cause que la langue coréenne est complètement ignorée des orientalistes. Depuis bientôt quarante ans, il y a des missionnaires français en Corée ; seuls, de tous les peuples, ils ont vécu dans le pays, parlant et écrivant cette langue pendant de longues années. Et néanmoins, chose étrange, jamais aucun savant n’a songé à s’adresser à eux pour avoir, à ce sujet, les notions exactes que seuls ils pouvaient communiquer. Il n’entre pas dans notre plan de donner ici une grammaire détaillée de cette langue ; mais comme elle est absolument inconnue en Europe, quelques explications pourront intéresser tous les lecteurs par la nouveauté du sujet, et n’être pas inutiles aux savants de profession.

On verra, dans le cours de notre histoire, que les missionnaires se sont livrés avec ardeur à l’étude du coréen. Mgr Daveluy avait travaillé longtemps à un dictionnaire chinois-coréen-français ; M. Pourthié en avait composé un autre coréen-chinois-latin ; M. Petitnicolas avait fait le dictionnaire latin-coréen qui comprenait plus de trente mille mots latins et près de cent mille mots coréens. Ces divers dictionnaires, ainsi qu’une grammaire composée en commun, étaient achevés, et on travaillait au collège à les copier, afin de conserver dans la mission un exemplaire de chacun, pendant qu’un autre serait envoyé en France pour y être imprimé, lorsque éclata la persécution de 1866. Tout fut saisi et livré aux flammes.

Depuis lors Mgr Ridel, vicaire apostolique de Corée, et ses nouveaux confrères ont refait en partie le travail des martyrs, leurs prédécesseurs, et préparé, à l’aide de quelques chrétiens indigènes très instruits, une grammaire et un dictionnaire de la langue coréenne.