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elle-même. Les travaux des missionnaires et des sinologues, depuis deux siècles, ont épuisé la question, et à travers les exagérations opposées de louange ou de blâme on est aujourd’hui parvenu à en avoir une idée à peu près exacte.

Voyons seulement ce qu’elle est en Corée.

Pour la masse du peuple, elle consiste dans le culte des ancêtres, et dans l’observation des cinq grands devoirs envers le roi, envers les parents, entre époux, envers les vieillards et entre amis. À cela se joint une connaissance plus ou moins vague du Siang-tiei, que la plupart confondent avec le ciel. Pour les lettrés, il faut ajouter : le culte de Confucius et des grands hommes, la vénération des livres sacrés de la Chine.

Les missionnaires ont souvent interrogé des Coréens très instruits sur le sens qu’ils attachent au mot Siang-tiei, sans jamais obtenir de réponse claire et précise. Les uns croient que l’on désigne par là l’Être suprême, créateur et conservateur du monde ; d’autres prétendent que c’est purement et simplement le ciel, auquel ils reconnaissent un pouvoir providentiel, pour produire et faire mûrir les moissons, pour éloigner les maladies, etc. ; le plus grand nombre avouent qu’ils l’ignorent et qu’ils ne s’en inquiètent guère. Quand on offre des sacrifices publics pour obtenir la pluie ou la sérénité, ou pour conjurer divers fléaux, la prière s’adresse soit à l’Être suprême, soit au ciel, selon le texte que rédige le mandarin chargé de la cérémonie.

Voici quelques détails sur ces sacrifices, assez peu fréquents d’ailleurs.

Quand des districts ou des provinces souffrent de la sécheresse, le gouvernement envoie un ordre aux mandarins, et chacun d’eux au jour marqué se rend dès le matin avec sa suite, ses prétoriens et ses satellites, au lieu qui lui est désigné. Là il attend patiemment sans prendre aucune nourriture, sans même fumer de tabac, que l’heure propice arrive. C’est ordinairement vers minuit, et, en tout cas, le mandarin ne doit rentrer chez lui qu’après minuit passé. Au moment précis, il immole des porcs, des moutons, des chèvres, dont le sang et les chairs crues sont offerts à la divinité. Le lendemain il se repose, pour recom-