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À la capitale et dans quelques autres grandes villes, beaucoup de gens inoccupés passent leur temps à lancer des cerfs-volants, surtout pendant un ou deux mois d’hiver, quand souffle le vent du nord. La foule se presse à ce spectacle ; chacun examine les soubresauts de ces cerfs-volants et en tire des pronostics pour le bon ou mauvais succès des affaires dans lesquelles il est alors engagé. Souvent on se porte des défis mutuels, à qui usera ou coupera le plus vite la corde de son voisin, en faisant rencontrer les cerfs-volants dans les airs, et là-dessus s’engagent des paris quelquefois considérables.

On trouve dans toutes les villes des chœurs de musiciens et de chanteuses. La capitale en est remplie. Ces chanteuses, élégamment vêtues, exécutent des chants et des danses pour l’amusement des spectateurs, dans les parties de plaisir que donnent les mandarins ou les gens haut placés.

Il n’est pas rare non plus de rencontrer des saltimbanques ou comédiens ambulants qui vont par bandes, de côté et d’autre, donnant des représentations dans les maisons de ceux qui les payent, à l’occasion d’un mariage, d’un anniversaire heureux ou d’une fête quelconque. Ils sont acrobates, musiciens, joueurs de marionnettes, escamoteurs, font mille tours de force et d’adresse et passent pour être souvent d’une habileté merveilleuse. À défaut d’amateurs bénévoles, ils s’imposent aux villages, et comme ils ont la réputation d’être des bandits, capables de toutes sortes de crimes et d’actes de violence, on les subit par crainte, et on les paye sur les fonds communs pendant leur séjour.

Le théâtre proprement dit n’existe pas en Corée. Ce qui se rapproche le plus de nos pièces dramatiques est la récitation mimée de certaines histoires par un seul individu qui en représente successivement tous les rôles. Si, par exemple, il est question dans son récit d’un mandarin, d’un homme qui reçoit la bastonnade, d’un mari qui se dispute avec sa femme, etc., il imitera alternativement le ton grave et solennel du magistrat, les plaintes, les cris de celui qui est battu, la voix du mari, le fausset de la femme, les rires de celui-ci, les gestes étranges de celui-là, la stupéfac-