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Augustin avait tremblé souvent à la pensée de pareils supplices. Mais à ce moment la grâce le soutenait visiblement.

Le juge lui demanda :

« Qui donc a introduit le chef des étrangers dans notre pays ?

— C’est moi-même !

— Et les deux autres prêtres, où sont-ils ? »

À ces mots, Augustin ne répondit rien, malgré la cruelle torture employée pour le faire parler.

Charles T’sio fut digne de ses deux amis. Depuis longtemps, il pensait au martyre. Cette année-là même, à trois reprises, des visions lui annoncèrent cette grâce. Aussi était-il plein de confiance et de joie au milieu des supplices.

Comme on tenait beaucoup, à la cour, à s’emparer des deux autres prêtres, les bourreaux ne négligèrent aucun moyen barbare pour arracher des prisonniers le secret de leur retraite. Tous les trois, assis sur une planche, les mains liées au dos, et tout le corps solidement attaché à un appui, il leur fallait répondre à toutes les questions du juge. On les frappa sur le devant des jambes avec des bâtons ; on leur fit ployer les os des bras et des jambes, au moyen de morceaux de bois triangulaires. Avec des cordes de crin, frottées sur leurs membres par un mouvement de va-et-vient, on leur scia les chairs dont les lambeaux détachés tombaient à leurs pieds. Et cependant ils demeurèrent fidèles jusqu’au bout. La grâce les soutenait, et l’exemple de leur évêque souffrant, comme eux, les mêmes horribles traitements, partageant leur triste prison, les animait à la persévérance.

Enfin, au lendemain de l’exécution des trois missionnaires, Paul et Augustin furent conduits au supplice, et, quatre jours après, Charles T’sio partageait leur sort. Ainsi Dieu daigna honorer de la pourpre du martyre le dévouement de ces fidèles serviteurs à la cause de la religion.

Malgré ses soixante-dix-neuf ans, Cécile, la mère de Paul, reçut ainsi que sa fille Élisabeth, deux cent trente coups de verge. Elle mourut dans sa prison des suites de ses blessures. Sa fille fut décapitée peu après et alla ainsi rejoindre au ciel, la dernière, les membres de cette famille de martyrs.