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commandant, une commission d’aller visiter les débris du naufrage, pour favoriser, sous ce prétexte, l’introduction clandestine du missionnaire coréen.

Tout étant ainsi organisé, la jonque leva son ancre de bois, déploya ses voiles de paille et cingla sur la mer Jaune vers l’île inconnue du Camp français. Après une tempête qui obligea les missionnaires à se réfugier derrière l’île de Tsong-ming, le frêle esquif remit à la voile et vogua de nouveau vers la presqu’île coréenne. Déjà depuis longtemps on n’apercevait plus le rivage, et il était prudent de s’assurer de la direction à suivre, direction que l’équipage ignorait complètement. Le Père Hélot se mit donc en devoir d’interroger ses instruments. Il ne savait où il était.

« Courage, courage ! lui disait M. Maistre ; vos recherches nous mettront bientôt sur la voie, et nous conduiront droit à notre but. »

En effet, la première difficulté vaincue, les jours suivants, le point fut facile à prendre et la nacelle courut hardiment sur l’île du Camp. Ces navigateurs improvisés, se fiant peu à leur science, avaient pris pour patrons de ces mers dangereuses André Kim et les martyrs coréens.

Au neuvième jour, quand l’aube commençait déjà à blanchir, on se trouva devant un groupe d’îles, sur lesquelles nos voyageurs dirigèrent leur barque. M. Maistre, qui, après le naufrage, avait habité l’île du Camp, ne la reconnaissait pas. Pour ne pas perdre un temps précieux à sa recherche et exciter par là quelques soupçons parmi les habitants de la côte, il parut plus expédient d’aller à terre demander ingénûment aux insulaires bons et simples où était l’île de Ko-Koun-to.

« Nous ne la connaissons pas, » répondirent-ils.

M. Maistre les entendait distinctement se dire entre eux qu’ils ne pouvaient donner cette indication, parce qu’ils en seraient punis. Ne pouvant obtenir aucun renseignement, les deux prêtres allaient remonter à bord de leur jonque, quand sur le rivage ils rencontrèrent le mandarin, qui, déjà averti, accourait leur faire des questions embarrassantes. On lui donna rendez-vous à bord.