Page:Laurenceau - Le Petit neveu de l'Arretin, ouvrage posthume trouvé dans le portefeuille de son grand oncle, BnF Enfer-373, 1800.djvu/64

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Ce qui me reste enfin d’un ingrat trop aimé
Doit être par le feu détruit et consumé,
La prêtresse l’ordonne ; ainsi parle la reine,
Et son front s’est couvert d’une pâleur soudaine.
Toutefois au cœur d’Anne aucun pressentiment
Ne porte le soupçon d’un fâcheux dénouement ;
Elle est loin de prévoir la scène plus tragique
Qu’à la mort de Sichée, et sans plus de logique
Du funeste bûcher elle ordonne l’apprêt.

Bientôt Didon se rend dans cet endroit secret,
Y sème à pleines mains l’œillet et le narcisse,
Et d’un rameau funèbre à l’entour la tapisse,
Place d’un bras tremblant sur le lit conjugal
De son ingrat Roland, la fière Durandal,
Sa chemise de nuit de son foutre encor teinte,
Et le tableau trop cher où son image est peinte.
La sorcière à l’autel, les cheveux sur le dos,
Invoque trois cents dieux, l’Erèbe, le cahos,
Et la sœur d’Appollon, déesse en trois personnes,
Qui, variant le jeu de ses grâces mignonnes,
En tous lieux différente est vierge au sein des airs,
Dans les bois chasseresse, et putain aux enfers,