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Page:Lauris - L’Écrin du rubis, 1932.djvu/107

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L’ÉCRIN DU RUBIS

Je ne lui connaissais pas d’amant, et elle ne s’était pas fait accompagner de son mari, qui était attaché à une légation de Paris. Mais elle était inséparable d’un cercle de jeunes femmes dont, un jour qu’elle avait avancé un peu plus ses affaires avec moi, elle me donna à entendre qu’un péché mignon les enfermait parfois ensemble dans l’appartement de l’une d’elles. Cette confidence pleine de réticences égara au premier moment ma pensée sur des scènes de flagellation pour lesquelles je n’ai aucun goût. Je sus plus tard, quand Sybil eut assuré ma défaite, que la distraction de ces dames se haussait au ton de ces galantes estampes de Fragonard, de Baudoin, de Lavreince, ou de Schall qui, sous l’innocente légende de l’Amant indiscret, du Contretemps, du Curieux ou de la Servante officieuse ont érotisé d’une touche si délicate la vulgaire nécessité d’un remède dont nos aïeules faisaient le secret d’un teint de lis et de rose.

Les hasards d’une villégiature dans le Midi l’avaient mise en relation avec un groupe de charmantes émancipées qui demandaient à l’instrument de Molière un plaisir dont leur imagination ne trouvait pas l’analogue dans les autres figures de Vénus. Idolâtres de la jambe et de la croupe qui sont, certes, les parties divines du corps de la Femme, elles ne se réunissaient que pour s’en donner le spectacle réciproque et repaître leurs sens affinés de la sveltesse ou de la splendeur de ces formes souveraines dans tout l’attrait des toilettes les plus recherchées et des