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Page:Lauris - L’Écrin du rubis, 1932.djvu/119

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L’ÉCRIN DU RUBIS

gue, elle eût épuisé ses effets depuis que la Mode l’a découverte jusqu’au genou. Or son attrait est demeuré vainqueur de tous les autres. Qu’il ne soit pas émoussé un peu d’être prostitué ainsi au grand jour avec tant de complaisance, je ne le soutiendrais pas et je regrette le beau temps qui ne nous en distillait l’agrément qu’à petites gorgées.

Alors la jambe dans l’enfouissement où elle se blottissait, frileuse, câline, cachottière, gamine ou lubrique, était pour notre imagination, un monde de sensations qui s’ouvrait à son entreprise. C’était la région inconnue où chantait la Sirène. Elle hantait notre esprit comme je ne sais quel Éden merveilleux, dont l’idée seule nous jetait dans l’émoi du néophyte au seuil du temple, où l’ombre cache le mystère des mystères. Celui de l’amour et du désir était là, tapi dans des cercles concentriques de blancheurs et de ténèbres, dans des superpositions de voiles, des épaisseurs de tissus ou lourdes ou diaphanes, des enveloppements procédant d’une espèce de mystique, de sensualité spirituelle qui aurait attaché à chacune de ces pièces la valeur d’un symbole ou un sens rituel.

Mais la jambe est la perfection du corps : le plus beau sein, le bras le mieux modelé, la chute du dos la plus savoureuse, n’approchent pas de l’amoureuse vertu d’une jambe sans défaut.

Ainsi que le notait Brantôme qui en avait une extrême convoitise « il y gist plus de lasciveté qu’on ne pense ».