Page:Lautreamont - Chants de Maldoror.djvu/119

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chaque humain, dès que l’aurore s’élève bleuâtre, cherchant la lumière dans les replis de satin du crépuscule, comme, moi, je recherche la bonté, excité par l’amour du bien. Mes années ne sont pas nombreuses, et, cependant, je sens déjà que la bonté n’est qu’un assemblage de syllabes sonores ; je ne l’ai trouvée nulle part. Tu laisses trop percer ton caractère ; il faudrait le cacher avec plus d’adresse. Au reste, peut-être que je me trompe et que tu fais exprès ; car, tu sais mieux qu’un autre comment tu dois te conduire. Les hommes, eux, mettent leur gloire à t’imiter ; c’est pourquoi la bonté sainte ne reconnaît pas son tabernacle dans leurs yeux farouches : tel père, tel fils. Quoi qu’on doive penser de ton intelligence, je n’en parle que comme un critique impartial. Je ne demande pas mieux que d’avoir été induit en erreur. Je ne désire pas te montrer la haine que je te porte et que je couve avec amour, comme une fille chérie ; car, il vaut mieux la cacher à tes yeux et prendre seulement, devant toi, l’aspect d’un censeur sévère, chargé de contrôler tes actes impurs. Tu cesseras ainsi tout commerce actif avec elle, tu l’oublieras et tu détruiras complètement cette punaise avide qui ronge ton foie. Je préfère plutôt te faire entendre des paroles de rêverie et de douceur… Oui, c’est toi qui as créé le monde et tout ce qu’il renferme. Tu es parfait. Aucune vertu ne te manque. Tu es très-puis-