Page:Lautreamont - Chants de Maldoror.djvu/264

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temps, abstraction faite de toute métaphore, des instruments très dangereux entre les mains de ceux qui s’en servent, quand ils les manipulent aveuglément pour des buts divers qui se querellent entre eux, au lieu d’engendrer une opportune réaction contre la passion connue qui cause presque tous nos maux. Au bas de son dos est attachée (artificiellement, bien entendu) une queue de cheval, aux crins épais, qui balaie la poussière du sol. Elle signifie de prendre garde de ne pas nous ravaler par notre conduite au rang des animaux. Le cercueil connaît sa route et marche après la tunique flottante du consolateur. Les parents et les amis du défunt, par la manifestation de leur position, ont résolu de fermer la marche du cortège. Celui-ci s’avance avec majesté, comme un vaisseau qui fend la pleine mer, et ne craint pas le phénomène de l’enfoncement ; car, au moment actuel, les tempêtes et les écueils ne se font pas remarquer par quelque chose de moins que leur explicable absence. Les grillons et les crapauds suivent à quelques pas la fête mortuaire ; eux, aussi, n’ignorent pas que leur modeste présence aux funérailles de quiconque leur sera un jour comptée. Ils s’entretiennent à voix basse dans leur pittoresque langage (ne soyez pas assez présomptueux, permettez-moi de vous donner ce conseil non intéressé, pour croire que vous seul possédez la précieuse faculté de traduire les sentiments de votre pensée) de celui qu’ils regardèrent