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Page:Lautreamont - Chants de Maldoror.djvu/299

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je vous remercie de vos soins. Appelez mes petits frères. C’est pour eux que j’avais acheté des pralines, et je veux les embrasser. » À ces mots, il tombe dans un profond état léthargique. Le médecin, qu’on a mandé en toute hâte, se frotte les mains et s’écrie : « La crise est passée. Tout va bien. Demain votre fils se réveillera dispos. Tous, allez-vous-en dans vos couches respectives, je l’ordonne, afin que je reste seul à côté du malade, jusqu’à l’apparition de l’aurore et du chant du rossignol. » Maldoror, caché derrière la porte, n’a perdu aucune parole. Maintenant, il connaît le caractère des habitants de l’hôtel, et agira en conséquence. Il sait où demeure Mervyn, et ne désire pas en savoir davantage. Il a inscrit dans un calepin le nom de la rue et le numéro du bâtiment. C’est le principal. Il est sûr de ne pas les oublier. Il s’avance, comme une hyène, sans être vu, et longe les côtés de la cour. Il escalade la grille avec agilité, et s’embarrasse un instant dans les pointes de fer ; d’un bond, il est sur la chaussée. Il s’éloigne à pas de loup. « Il me prenait pour un malfaiteur, s’écrie-t-il : lui, c’est un imbécile. Je voudrais trouver un homme exempt de l’accusation que le malade a portée contre moi. Je ne lui ai pas enlevé un pan de son pourpoint, comme il l’a dit. Simple hallucination hypnagogique causée par la frayeur. Mon intention n’était pas aujourd’hui de m’emparer de lui, car, j’ai d’autres projets ultérieurs sur cet