Page:Lautreamont - Chants de Maldoror.djvu/304

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Lis, femme ; tu seras plus heureuse que moi, pour chasser le chagrin des jours de notre fils. » La mère ne conserve plus d’espoir ; cependant, elle s’est emparée d’un autre livre, et le timbre de sa voix de soprano retentit mélodieusement aux oreilles du produit de sa conception. Mais, après quelques paroles, le découragement l’envahit, et elle cesse d’elle-même l’interprétation de l’œuvre littéraire. Le premier-né s’écrie : « Je vais me coucher. » Il se retire, les yeux baissés avec une fixité froide, et sans rien ajouter. Le chien se met à pousser un lugubre aboiement, car il ne trouve pas cette conduite naturelle, et le vent du dehors, s’engouffrant inégalement dans la fissure longitudinale de la fenêtre, fait vaciller la flamme, rabattue par deux coupoles de cristal rosé, de la lampe de bronze. La mère appuie ses mains sur son front, et le père relève les yeux vers le ciel. Les enfants jettent des regards effarés sur le vieux marin. Mervyn ferme la porte de sa chambre à double tour, et sa main court rapidement sur le papier : « J’ai reçu votre lettre à midi, et vous me pardonnerez si je vous ai fait attendre la réponse. Je n’ai pas l’honneur de vous connaître personnellement, et je ne savais pas si je devais vous écrire. Mais, comme l’impolitesse ne loge pas dans notre maison, j’ai résolu de prendre la plume, et de vous remercier chaleureusement de l’intérêt que vous prenez pour un inconnu. Dieu me garde de ne pas montrer de la reconnaissance pour