Aller au contenu

Page:Lavalley - Légendes normandes, 1867.djvu/233

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

repas qu’on prenait en plein air ! Maîtres et domestiques vivaient dans une douce familiarité. Mêmes travaux, mêmes peines, même table ! c’était la famille du temps des rois pasteurs ; c’était l’égalité dans toute sa plénitude. Souvent la même coupe de terre servait à deux convives, et le breuvage n’en paraissait pas plus amer à Germain quand les lèvres d’Élisabeth s’y étaient déjà trempées. Élisabeth à son tour ne pouvait s’empêcher de comparer Germain aux choses qui l’entouraient, et elle trouvait que les cheveux de Germain étaient plus blonds que les épis dorés, et elle trouvait que les yeux de Germain étaient d’un plus bel azur que le bleu du ciel… Puis vinrent les veillées ; le vieillard s’asseyait sous la grande cheminée et rappelait à ses contemporains les choses de son temps, et tous riaient à ces doux souvenirs. Mais Germain et Élisabeth ne riaient pas ; ils se regardaient, tout en feignant d’écouter ; puis, quand l’histoire avait été reprise, abandonnée et reprise une dernière fois, quand le narrateur s’endormait à la suite de son auditoire, le fils du riche fermier et la pauvre servante s’échappaient sans bruit… Puis vinrent les beaux jours, et l’on dansa sous les grands marronniers du village ; mais Élisabeth