Page:Laveleye - Les Nibelungen.djvu/79

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Le sang coula de la bouche de l’intrépide Siegfrid. Mais il se leva vivement, et le guerrier hardi saisit le javelot qu’elle lui avait lancé à travers son bouclier, et sa forte main le brandit à son tour.

Mais il se dit : « Je ne veux point tuer la belle vierge, » et tournant le tranchant du javelot vers son épaule, il le jeta le bois en avant, l’homme fort, avec tant de violence qu’elle se prit à chanceler.

Le feu jaillit de la cotte d’armes comme si le vent l’eût attisé. Le fils de Sigemunt avait lancé la pique avec tant de vigueur qu’elle ne put, malgré sa force, en soutenir le coup. Le roi Gunther n’en eût jamais fait autant.

Brunhilt la belle se releva aussitôt : — « Noble guerrier Gunther, merci de ce coup ! » dit-elle. Elle croyait qu’il l’avait vaincue par sa propre force ; mais non, c’était un homme plus fort qui l’avait abattue.

Alors elle s’avança transportée de fureur. Elle leva haut la pierre, cette noble vierge, et la lança avec vigueur bien loin d’elle. Puis elle bondit après la pierre, et son armure en retentit fortement.

La pierre était tombée à douze brasses de distance. D’un bond elle avait dépassé le jet, la femme au beau corps ! Siegfrid le rapide alla vers l’endroit où se trouvait la pierre. Gunther la souleva, mais ce fut Siegfrid qui la lança.

Il était brave, fort et grand. Il lança la pierre plus loin et bondit aussi plus loin. Par ses artifices il avait assez de force pour enlever avec lui, en sautant, le roi Gunther.

Le saut était accompli, la pierre était là couchée à terre, et l’on n’avait vu personne d’autre que le guerrier Gunther. Brunhilt la belle devint rouge de colère ; Siegfrid avait sauvé Gunther de la mort.