Page:Lavergne, Jean Coste - 1908.djvu/27

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parviennent pas à se caser dans la patache qui va partir. Le conducteur, grognon et ruisselant sous la pluie, accueille d’abord avec brusquerie la demande polie de Coste.

— Arrangez-vous comme vous pourrez, je m’en moque… Est-ce que je savais que vous deviez prendre la voiture, moi ? Au moins, on retient sa place dans la journée… Mais se ravisant tout à coup, de peur que ces voyageurs inconnus ne se rendissent chez le concurrent en face :

— Où allez-vous donc, monsieur ? — dit-il plus aimable.

— À Maleval… Je suis le nouvel instituteur.

La figure du conducteur se fit plus avenante.

— Ah !… je connaissais celui d’avant vous, la crème des hommes. Il prenait toujours ma voiture, quand il s’en venait à Montclapiers… Un bon client de moins… mais non, car vous le remplacerez, j’espère — insinua-t-il, très prévenant.

— Enfin, montez, mon bon monsieur, avec votre petite dame… je vas arranger ça.

Il regarda sa montre.

— Dieu me damne ! Trois heures et demie… nous devrions être en route… Allons, vous autres, un peu de place, s’il vous plaît !…

Dans la voiture déjà bondée, personne ne remue. Enfin, sur l’insistance du conducteur jurant et sacrant, Jean et Louise arrivent à se glisser parmi toutes ces jambes récalcitrantes ; mais, tout au plus assis sur le bord de la banquette ? ils sont obligés de prendre les enfants entre leurs genoux, tandis que les voyageurs qu’ils dérangent les regardent comme des intrus et marronnent.

— Jésus ! si c’est permis, — grommelle une grosse mère qui disparaissait derrière un échafaudage de paniers et de paquets entassés sur son large giron. — Il y a place pour huit et nous voilà douze avec les mioches. On est encaqué comme des harengs…

— Ah ! oui, — soupira un vieux monsieur, — quel purga-