Page:Lavergne - Fleurs de France, 1924.djvu/127

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prendre de dentelles, et se hâta, aidée par Sabine, de remettre le salon en ordre.

Quelques instants après, le bruit du carrosse entrant dans la cour la fit tressaillir. Elle jeta un coup d’œil par la fenêtre et vit le marquis descendre et offrir la main à l’intendante.

« Ah ! se dit-elle, voilà un de ces jeunes officiers en question. Mais où est donc l’autre ? Vous pouvez vous retirer, Sabine. »

La jeune fille se hâta d’obéir et disparut.

La porte s’ouvrit, le valet annonça, et Mme l’intendante, entrant de fort bonne grâce à la main du marquis, le présenta à Mme de Haütern comme un jeune gentilhomme qui désirait passionnément obtenir l’honneur d’être reçu chez elle. Mme de Haütern répondit le mieux possible ; on s’assit, on causa du bal de la veille, et le marquis s’extasia fort sur la beauté, la parure et les grâces des bergères habillées de toile d’argent.

Mme de Haütern se croyait déjà belle-mère d’un marquis, et allait sonner pour faire appeler ses filles, lorsque l’intendante lui demanda si Mlle Sabine était malade, disant qu’on s’était étonné de ne pas la voir au bal.

Mme de Haütern répondit que Sabine n’aimait pas la danse.

« D’ailleurs, ajouta-t-elle, ma nièce est sans aucune fortune et n’est pas destinée à voir le monde.

– Mais, dit l’intendante, on la dit fort belle, et si vous la montriez un peu dans les compagnies, elle trouverait à se marier.

– Ces choses-là n’arrivent que dans les romans, madame la comtesse.

– Oh ! non, pardonnez-moi, madame la baronne, mais j’ai entendu dire que vos beaux yeux furent votre dot.

– Avec trois fermes d’un bon rapport, madame la comtesse, » dit Mme de Haütern, évidemment flattée du compliment fait à ses yeux, mais qui tirait encore plus de vanité de sa fortune que des charmes de son défunt printemps. « Mais, ajouta-t-elle, je veux que mes filles vous viennent remercier du plaisir qu’elles ont eu hier. »