Page:Lavignac - Le Voyage artistique à Bayreuth, éd7.djvu/151

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se fait entendre. Ce sont les assistants qui ont aperçu le cvgne conduisant la nacelle, vide cette fois, comme il l’avait tait au début en amenant le chevalier. Lohengrin s’approche de lui, le contemple avec tristesse, lui disant quel est son chagrin de le revoir dans de si pénibles circonstances, lui qui avait pensé le retrouver un jour dans des contrées meilleures, libre et dégagé du charme qui le tient enchaîné. Le sens de ses paroles échappe aux assistants.

Se retournant ensuite du côté d’Elsa, Lohengrin, en proie à un intense chagrin, lui dit combien il avait espéré pouvoir un jour lui ramener ce frère qu’elle croyait à jamais perdu. Cette joie lui est interdite, puisqu’il s’éloigne ; mais si jamais Godefroid est rendu à sa tendresse, qu’elle lui donne, au nom du chevalier disparu, ce cor, qui lui sera précieux dans le péril ; cette épée, qui le rendra invincible ; et cet anneau, qui rappellera à sa mémoire le défenseur de l’infortunée sans appui. Il dépose des baisers sur le front d’Elsa, qui tombe inanimée dans les bras de ses femmes ; puis il se dirige vers la nacelle, pendant que tous manifestent une douleur profonde.

Alors paraît Ortrude, donnant les signes d’une joie cruelle ; s’adressant à Elsa, elle lui révèle que le cygne mystérieux qui remmène à tout jamais le héros bien-aimé n’est autre que Godefroid lui-même, qu’elle a, par ses maléfices, transformé ainsi, et qui va maintenant être irrévocablement perdu ; que si Lohengrin était resté, il aurait pu, grâce à sa puissance, délivrer l’enfant et rendre à la tendresse de sa sœur l’héritier du Brabant.

Lohengrin, qui s’apprêtait à monter dans la nacelle, s’est arrêté en entendant cette nouvelle révélation de la noirceur d’Ortrude. Il tombe à genoux au bord du fleuve et élève au ciel une ardente et muette prière. On voit alors planer au-dessus de la nacelle une colombe blanche : c’est