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PRÉFACE.


Employés de la Préfecture de la Seine, placés dans un bureau chargé du travail des alignements et percements des rues de Paris, nous sentions la nécessité d’un ouvrage qui résumât les améliorations successives de nos voies publiques.

Les études sérieuses auxquelles on s’est livré, surtout depuis plusieurs années, dans le but d’assainir certains quartiers de la capitale, nous révélaient le besoin d’interroger avant tout le passé.

L’Administration avait un puissant intérêt à connaître tous les actes émanés de ses devancières. Chaque fois, en effet, qu’elle a cherché à rattacher le présent et le passé à la même chaîne, elle en a tiré un double bénéfice ; d’abord, elle a utilisé à son profit des clauses que la prescription n’avait pu éteindre ; ensuite, elle a trouvé des enseignements utiles à l’aide desquels il lui a été facile de réaliser certains projets d’embellissements d’une urgence constatée.

Un ouvrage conçu dans le but de créer pour ainsi dire l’état civil des rues de Paris, devait présenter une utilité également incontestable à tous les propriétaires. Il leur est indispensable de connaître non seulement les actes anciens, tels que les Arrêts du Conseil, les Édits, les Lettres-Patentes, mais encore les actes plus récents, tels que les Décisions Ministérielles, Décrets de l’Empire, Ordonnances Royales, etc. ; car chaque jour ils sont exposés à être inquiétés, troublés dans la possession de leurs immeubles.

C’est là une de ces vérités qu’on ne pourrait songer à contredire.

En effet, qu’une voie publique ait été ouverte en vertu de Lettres-Patentes, d’un Décret de l’Empire ou d’une Ordonnance Royale, l’autorisation n’a pu être accordée au propriétaire des terrains sur lesquels la nouvelle rue devait passer, qu’en lui prescrivant certaines obligations. Ces conditions, imposées au propriétaire primitif, engagent ceux qui lui ont succédé, et lieront également les personnes qui voudront acheter des terrains ou bâtir des maisons dans le parcours de cette voie publique.

Ainsi pour les propriétaires, pour ceux qui dans les procès leur servent de guides par leurs conseils ou d’appuis par leur parole ; pour les notaires, les avocats, les avoués et les architectes, il y a nécessité de connaître les documents administratifs.

Mais s’il est indispensable de fixer les personnes qui possèdent des immeubles sur leurs droits ou leurs obligations, il n’est pas moins utile de donner à celles qui sont appelées à devenir propriétaires les moyens d’acheter avec sécurité.

Dans l’intérêt de ces dernières surtout, il était convenable de rappeler les dates des Décisions Ministérielles ou des Ordonnances Royales, déterminant la largeur de chaque voie publique ; d’indiquer toutes les maisons alignées et la portion de retranchement que doit supporter un grand nombre de propriétés. Pour ces personnes, il fallait aussi mentionner l’époque précise des changements opérés dans les dénominations des voies publiques et dans le numérotage des propriétés, constater le passage des égouts et des conduites d’eau, l’éclairage au gaz avec la désignation des compagnies qui en sont chargées.

Nous n’avions donc pas à faire un livre avec des livres. Nous ne voulions pas nous borner à coudre quelques feuillets nouveaux à d’anciens ouvrages. La mission que nous avions à remplir était, pour nous servir des expressions d’un Membre du Conseil Municipal, de composer l’histoire, malheureusement peu connue, de la propriété dans Paris, et de la rendre utile et agréable à toutes les classes de la société, en groupant les faits historiques les plus curieux dans les articles des Rues ou des Monuments qui leur ont servi de théâtres.

Notre tâche, nous le savions, devait être longue et pénible, nous n’hésitâmes pas cependant à nous mettre à l’œuvre. Voici de quelle manière nous avons procédé :

Aux Archives du Royaume, nous avons recueilli les Arrêts du Conseil, les Édits, les Lettres-Patentes, les Délibérations du Bureau de la Ville qui ont rapport aux Rues et Monuments de Paris.

En étudiant tous ces documents nous apprenions à honorer le passé.

Dans les Lettres-Patentes, dans les Édits, dans les Arrêts du Conseil, l’intervention de la royauté est pleine de noblesse et de dignité. Dans l’Édit du 27 avril 1656, concernant l’Hôpital Général, Louis XIV s’exprime ainsi : Considérant les pauvres mendiants comme membres vivants de Jésus-Christ, et non comme membres inutiles de l’État, et agissant en la conduite d’un si grand œuvre, non par ordre de police, mais par le seul motif de la charité, etc.