par l’œuvre de la commission réunie par Louis XVI et que présida Malesherbes, préparé par les écrits de Lessing et de Dohm, par ceux de Mirabeau et de Grégoire. Il était l’aboutissant logique des efforts tentés depuis quelques années par les Juifs et les philosophes ; Mendelsohn, en Allemagne, en avait été le promoteur et le plus actif défenseur, et c’est à Berlin, dans les salons d’Henriette de Lemos, que Mirabeau puisa ses inspirations auprès de Dohm.
Une certaine catégorie de Juifs s’était d’ailleurs émancipée déjà. En Allemagne, les Juifs de cour (Hofjuden) avaient acquis des privilèges commerciaux ; on leur délivrait même, contre argent, des titres de noblesse. En France, les Marranes portugais, revenus au judaïsme jouissaient de grandes libertés, et, sous la direction de leurs syndics, ils prospéraient à Bordeaux, fort indifférents, du reste, au sort de leurs frères malheureux, mais très influents puisque l’un d’eux, Gradis faillit être nommé député aux États Généraux. En Alsace même, quelques Israélites avaient obtenu d’importantes faveurs ; Cerf Berr, par exemple, fournisseur des armées de Louis XV, auquel le roi avait donné des lettres de naturalisation et le titre de marquis de Tombelaine.
Grâce à tous ces privilèges, il s’était formé une classe de Juifs riches, qui avait pris contact avec la société chrétienne, classe d’esprit ouvert et subtile, intelligente et raffinée, d’un intellectualisme extrême, ayant abandonné, comme beaucoup de chrétiens, la lettre de la religion ou même la foi et n’ayant con-