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LE BŒUF DE MARGUERITE

chèrent joyeusement. Alors le jeune tanneur se tournant lentement vers les convives, clama d’une voix solennelle :

— À la santé de la jeune et tendre Marguerite-le-bœuf !

À peine avait-il lâché le mot, que le verre de Marguerite lui écorchait l’oreille et allait se briser en mille éclats, avec un tintement clair, sur le mur tout blanc. Une bordée de jurons suivit de près. Ils défilaient encore, quand retentit un beuglement formidable.

— C’est le taureau de Marguerite qui chante ses ennuis, fit une voix moqueuse.

— C’est un avertissement, répliqua la vieille fille… On cherche le bonheur, on trouve la peine… Que ceux qui peuvent comprendre comprennent.

— Ce n’est toujours pas le ciel qui parle par la bouche de ta bête, observa quelqu’un…

— Alors ton bœuf a le diable au corps, remarqua Pierre Blais.

— Et tu l’attelles à ton traîneau… Il pourrait te mener loin, dit Trébert.