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LE BŒUF DE MARGUERITE

dans ses mitaines et part en maugréant.

Quand elle fut au bout du village, elle aperçut, dans la route qui conduisait chez elle, un spectacle étrange. Les petits cèdres aux branches en éventails, les petits sapins à l’écorce embaumée, plantés deux à deux le long du chemin, brûlaient en crépitant, et leurs têtes se penchaient comme des chevelures de flamme sur le blanc manteau de la neige.

Elle s’arrêta d’abord. Elle eut peur, elle qui tout à l’heure voulait effrayer les autres. Elle pensa aux feux-follets, à la chasse-galerie, aux boules de feu qui tombent du ciel ; mais les feux-follets sont petits, légers, remuants, et ne s’accrochent pas aux branches des arbres ; la chasse-galerie passe dans les nuages avec des jappements et des cris ; les globes de feu ne tombent pas du ciel pour brûler les sapins, mais bien pour avertir les gens de leur mort.

Alors c’était de la sorcellerie. Le diable se mêlait donc de ce qui ne le regarde pas.