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Page:LeMay - Contes vrais, 1907.djvu/17

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LE HIBOU

de sapins sombres. L’eau qui se brisait sur des cailloux jetait à cette chaumière, comme des poignées de fleurs blanches, ses légers flocons d’écume. On y entendait le grondement monotone des meules qui broyaient le blé, et de la rivière qui tombait du haut de la chaussée.

Quand nous arrivâmes, le curé était en prière. Des voisins, hommes et femmes, garçons et filles, agenouillés sur le plancher nu, suivaient ses mouvements avec curiosité. Nous fîmes comme les autres. Nous avions, par respect pour le bon Dieu, laissé le fusil et le hibou sur le perron de pierre, tout près de la porte. Sur une petite table recouverte d’un drap blanc, on avait placé un crucifix de plâtre et deux pâles bougies. Le crucifix portait de larges taches rouges sur le front, sur le côté, sur les mains et les pieds, et les bougies répandaient dans la pièce basse une lueur mélancolique.

Célestin regardait, d’une façon singulière, la jeune malade dont le visage livide émergeait de l’oreiller aux grandes fleurs