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LE BAISER FATAL

leurs inquiétantes solitudes. Le monde était pour elle une immense solitude aussi. Elle n’en comprenait ni les appels séduisants, ni les douloureuses inconstances, et pourtant elle éprouvait l’amer ennui des âmes délaissées.

Célestin devenait pensif. La vue de cette femme qu’il avait aimée aux jours ensoleillés de sa jeunesse, lui rappelait des félicités à jamais perdues. Une tristesse vague passait sur son front et il commençait à ressentir un attendrissement dangereux. Il se demandait comment, dans ce cœur brisé, l’amour n’avait pas sombré avec les autres sentiments. Il sentait de plus en plus la chaleur de ce rayon mystérieux, qui l’avait inondé, malgré son indifférence et son éloignement, et il se trouvait cruel.

C’était peut-être sa faute, si le choc avait été mortel. Le désespoir avait pu s’ajouter à l’effroi. S’il fut resté près d’elle, le trouble se serait peut-être calmé. L’amour est un remède puissant quand il n’est pas un mal qui tue. Il l’eût sauvée ! Et alors