Page:LeMay - Fêtes et corvées, 1898.djvu/39

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

40
FÊTES ET CORVÉES

une journée ; et, pour prévenir l’ennui et se fouetter le courage, on convie les amis. Chacun à son tour fait sa corvée. Rien de curieux comme de voir cette troupe active qui rompt, broie, écrase et bat le lin, d’un bras infatigable, en riant, jasant et chantant sans cesse. Et pourtant la besogne est rude, car le lin crie et se tord longtemps avant d’être débarrassé de son écorce frêle et de ses frêles aigrettes, avant de se voir métamorphoser en un panache doux et luisant comme la soie. Et les aigrettes qui volent obscurcissent l’air et retombent en pluie légère sur les travailleurs. Les plaisanteries, les agaceries, les mots, drôles et les éclats de rire montent, descendent, se croisent comme les atomes de poussière dans le rayon de soleil. Oh ! le travail est facile et léger avec cet accompagnement de gaîté ! Jeunes filles et jeunes garçons, couverts de la poudre de ces combats inoffensifs, devinent souvent encore, sous le voile de poussière qui les dissimule, des sourires qui ne manquent pas de grâces et des regards qui ne manquent pas de feu.

Pendant que les braies retentissent, la chauffeuse — car c’est d’ordinaire une femme