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FANTÔME

qui recouvre d’un voile mouvant l’immensité de la plaine, et en cheminant ils regardaient à l’horizon, pour voir si la silhouette de quelque bande ne s’y lèverait point comme nuage menaçant.

Un soir, dit-il, le soleil, descendu lentement du ciel bleu, s’enfonçait dans les vagues lointaines de la prairie comme un œil sanglant qui se serait fermé, et les herbes légères qui ondulaient au souffle du vent paraissaient bercer des éclairs. Nous nous étions arrêtés pour contempler ce spectacle magnifique, et par instant, nous ne pouvions nous défendre d’un frisson de peur, car il nous semblait que le feu s’était allumé dans cet océan de verdure aride, et qu’il s’avançait sur nous avec la rapidité du torrent.

Tout à coup, dans ce rayonnement merveilleux de la prairie, à une distance immense, nous aperçûmes des ombres qui s’agitaient. Des profils d’hommes et de chevaux se dessinèrent peu à peu, noirs et superbes, sur le fond de lumière. Les chevaux couraient, les hommes étaient armés. On ne traverse point ces déserts sans carabines, revolvers ou poignards. Nul doute, c’étaient des Indiens à la