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livre premier

En roulant ces pensers dans son esprit de bête,
 Il atteignit l’arrête
 Du rocher.
 L’aigle, qui le vit approcher,
 Craignit pour sa progéniture
 Et se mit l’âme à la torture
Pour trouver le moyen d’éviter un malheur.

Avec les vaniteux il est bon de se taire
Ou de vanter bien haut leur menteuse valeur ;
 L’aigle salua jusqu’à terre :

— Je ne puis revenir de mon étonnement,
Dit-il. Monter ici sans ailes, quel mystère !
Je voudrais voir le loup, le lion, la panthère
Gravir ainsi que vous cet âpre escarpement :
 Ils en sont incapables ;
Ils se vantent, pourtant, de régner tous sur vous.

 — Sur moi ? Vous voyez qu’ils sont fous
 Autant qu’ils sont coupables.

— C’est vrai, répondit l’aigle avec un air soumis.
Tenez ! les voyez-vous, ajouta-t-il encore,