Madame D’Aucheron était sa véritable mère, il fallait donc qu’elle fut sa véritable fille. C’est ce qu’elle pensait. L’amour filial qui se réveillait tout à coup au fond de son cœur la transformait et lui donnait une grande force pour supporter les afflictions. On ne dit jamais au calice : Passe loin de moi ! quand, en le vidant jusqu’à la lie, on peut arracher à la douleur le cœur d’une mère.
Madame D’Aucheron ne se mit pas en peine de savoir d’où venait un pareil changement dans les dispositions de sa fille. Elle crut y voir le travail de la vanité. Elle ne connaissait guère d’autre mobile aux actions, la pauvre femme.
— Chère enfant, dit-elle, comme tu me fais plaisir !… comme ton père va t’aimer ! comme monsieur le ministre, ton futur mari, éprouvera de joie et de reconnaissance ! Tu seras une grande dame. La femme de l’honorable monsieur Le Pêcheur ! Il y en a qui ne trouvent point ce nom-là de leur goût, mais cela sonne bien ; surtout avec le titre d’honorable. Tu vas faire des jalouses, ma petite, tu es bien heureuse. Et moi, quand je dirai : ma fille, madame la ministresse… Il m’en passe des frissons… J’ai de l’orgueil, vois-tu. Une mère est toujours orgueilleuse de