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l’affaire sougraine

c’est que mademoiselle d’Aucheron serait peut-être éblouie par son nouveau triomphe et se montrerait touchée enfin de la constance et de la force de son attachement. Il se faisait illusion. La résolution de Léontine était bien prise, maintenant, et rien ne pourrait l’ébranler : Rodophe, ou le couvent. Rodolphe, dans son imagination exaltée, dans son cœur naïf et débordant d’amour, elle le voyait tout près, tout près… et le couvent paraissait là-bas, à demi-perdu dans une buée vaporeuse.

Madame D’Aucheron avait complètement perdu la tête, et ne se sentait plus la force de prendre une résolution. Elle était comme une épave ballotée par les flots, au gré des vents et des courants. Elle ne savait plus où était le salut ; elle ne le voyait nulle part. Menacée par le ministre qui avait surpris ses secrets, par le notaire qui la jetterait comme une vaurienne sur le pavé, par sa fille qui reculait devant le sacrifice et parlait d’entrer dans un couvent, par son mari qui se montrait maintenant tout inquiet, tout troublé, tout désolé, elle chancelait, s’affaissait. Elle eût voulu s’insurger contre elle même, braver les menaces et se moquer du monde. Elle se disait qu’il fallait désarmer ses ennemis par l’audace, et ne pas se laisser désarçonner comme cela du premier coup. À quoi lui servi-