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l’affaire sougraine

Le moment solennel arrivait. Les lustres furent allumés. La lumière ruissela sur l’or des cadres suspendus aux murs, sur la tapisserie à grands ramages, sur les consoles sculptées, les panneaux vernis des meubles. C’était un rayonnement qui semblait doux et chaud comme un rayonnement de soleil.

— N’est-ce pas que c’est beau, Léontine, fit madame D’Aucheron tout enthousiasmée ?

— Trop beau, peut-être, mère.

— Trop beau ? mais tu n’y penses pas. Pour des députés, pour des ministres rien n’est trop beau. Ce sont ces hommes-là, vois-tu, que Dieu place à la tête de la nation pour la gouverner.

— Dieu ou le diable, répondit Léontine en éclatant de rire.

— Il y a peut-être parfois des ministres prévaricateurs, ma fille, oui prévaricateurs, c’est bien le mot que j’ai entendu l’autre jour, mais ces ministres-là sont rares, ton père l’a dit.

— Ah ! mère, parlons colifichets, plutôt, nous serons mieux dans notre élément.

— Il faut que tu t’habitues à parler politique, et que tu apprennes à en causer toi-même, ma fille ; car, autrement, la position que tu vas occuper,